Revue égyptologique (12.1907)

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E. Amélineau.

l'époque quaternaire dans ses premières périodes de constitution géologique et même l'époque
tertiaire. De l'époque tertiaire nous ne pouvons rien savoir jusqu'à présent pour ce qui
regarde l'Egypte; pour l'époque quaternaire, divisée en période paléolithique et néolithique,
nous savons seulement que certains silex, découverts par les divers explorateurs de l'Égypte
préhistorique, ont la forme et les particularités des silex qu'on range dans la catégorie des
silex paléolithiques, mais nous ne pouvons savoir aucunement si ces silex sont contempo-
rains d'une population vraiment d'âge paléolithique et si nous atteignons réellement cette
population. 11 en est tout autrement des silex néolithiques et de la population égyptienne
correspondant à cette période de la civilisation : là nous sommes certains d'atteindre cette
civilisation et, par conséquent, la population qui la possédait. Mais nous ne pouvons absolu-
ment pas déterminer si les monuments découverts atteignent, pour quelques-uns, la période
la plus haute de cette civilisation : il est même presque certain, vu la perfection des docu-
ments qui ont été mis à la disposition de la science, que nous n'atteignons de cette civili-
sation que les périodes les plus rapprochées de nous, tellement les œuvres qui nous sont
parvenues accusent de perfection. Aussi, s'il faut réserver l'épithète de préhistorique pour les
œuvres des hommes au moment où ils ouvraient les voies de la civilisation, parce qu'ils
sortaient de la barbarie primitive, ou au moment où, après avoir fait certains progrès, des
progrès même remarquables dans ces voies, ils arrivaient à une certaine habileté dans la
pratique des arts et des industries primitifs, nous ne pouvons aucunement appeler préhisto-
rique la civilisation égyptienne, telle que nous l'ont découverte les travaux des dix ou onze
dernières années. Nous ne pouvons lui donner l'épithète de préhistorique que dans le sens
restreint du mot préhistorique signifiant avant l'histoire. Or, l'histoire en Egypte commence
ou est censée commencer avec Ménès et la première dynastie historique. Il me semble donc
plus rationnel et plus facilement compréhensible d'employer le mot antéhistorique, pour
désigner une époque non historique, mais où déjà l'homme sorti des langes de la préhistoire
se montre paré des ornements qu'il ne fera qu'accroître et multiplier jusqu'à l'époque où il
entrera en pleine lumière historique.

Cette époque antéhistorique n'a pas cependant été admise par tout le monde : personne
ne conteste et ne peut contester désormais qu'elle a dû exister de toute nécessité, mais on
veut que cette période soit limitée par les trois premières dynasties historiques, auxquelles
on réserve l'épithète d'archaïques. Il est, en effet, évident que le peuple égyptien existait
avant Ménès, puisque ce personnage est dit avoir le premier réuni sur sa tête les deux cou-
ronnes de la Haute et Basse Egypte, que son successeur avait transporté le siège de sa
royauté à Memphis, que sans doute il organisa le système de canaux qui devait servir à
irriguer Memphis, ses environs et peut-être toute la Basse Egypte alors connue et habitée :
on ne fonde pas une ville, quand il n'y a pas d'habitants, on ne crée pas tout un système
d'irrigations, quand il n'y a pas de gens qui peuvent en tirer parti, on ne transporte pas
le siège de la royauté dans une ville nouvelle dont l'on fait choix, quand il n'y a aucune
nécessité gouvernementale qui le demande ou qui l'exige. L'Egypte était donc habitée et
peuplée au moment où Ménès monta sur le trône et que son successeur transporta le
siège de la royauté dans la ville de Memphis; avant lui, il avait dû exister d'autres
rois ou d'autres chefs, qui régnaient sur telle ou telle partie de l'Egypte. J'ai déjà fait