Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Saint-Non, Jean Claude Richard de
Voyage Pittoresque Ou Description Des Royaumes De Naples Et De Sicile (Band 4,2): Contenant La Description De La Sicile — Paris, 1786 [Cicognara, 2708-3]

DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.3234#0013
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
*7° VOYAGE PITTORESQUE
fit dire qu'il étoit malade; qu'il ne pouvoit descendre sur le rivage, & qu'il nous
conseilloit de partir. Nous eûmes recours au Juré qui se trouvoit Vice-Consul
de la Nation Françoise : il nous fit répondre que nulle considération ne pouvoit
le déterminer à s'approcher d'une barque peshiférée , &; qu'il ne nous verroic
pas , que nous ensilons à nous éloigner de la rade, parce qu'il se trouvoit par
sa Charge obligé de nous y contraindre 5 àC ses coquins d'Emissaires, dont le
nombre augmentait à chaque instant , n'étoient que trop disposés à lui obéir.
La populace s'en mêloit , nous barfouoit &C nous menaçoit. Il fallut payer
d'audace 5 nous déclarâmes fièrement que nous ne quitterions pas le rivage ,
que lorsqu'on nous auroit apporté quelques provisions pour continuer notre
route.
Notre contenance ferme &: décidée en imposa d'autant plus que nos Bateliers
avoient déjà sauté à l'eau, &; que nous avions l'air de protéger leurs mouvemens ;
la Garnison demanda une trêve, que nous accordâmes .5 on députa encore au
Gouverneur & au Juré -, mais comme ces deux braves gens se trouvoient en
sureté &c à d'abri de leurs murailles, nous ne pûmes obtenir d'autre réponse,
sinon que nous eusïions à nous éloigner. Nous y aurions été contraints „ aux
risques de tout ce qui pouvoit nous arriver, ayant une longue route à faire , par
un vent contraire, &: le long d'une Côte, où il nous étoit par-tout également
défendu d'aborder J si heureusement pour nous un Maltais, à qui par hazard le
bateau sur lequel nous étions appartenoit, n'eut pris sur lui de nous acheter
lui-même du pain, ô£ de nous faire apporter de l'eau &£ du vin.
Nos provisions arrivèrent enfin l'une après l'autre ; nous étions obligés, le
fusil à la main, de les garder à vue de dessus notre bord, pour empêcher qu'elles
ne ncras fussent dérobées par les mêmes Gardes qui exerçoient leur piraterie sur
tout ce qui se rencontroit. N'osant plus nous menacer, ils s'en prenoient à ceux
qui arrivoient d'un quart de lieue, car notre aventure avoit mis en émeute tout
le Pays, & les Habitans de Terranuova, curieux d'en voir la fin, surent obligés
de gagner les hauteurs, les tours Se les murailles de leur Ville.
Notre départ eut l'air d'une levée de siége 3 obligés de nous remettre en mer,
pour nous consoler de notre désaltre, nous nous mîmes à manger de nouveau de
l'ail & an pain. Quand la faim revenoit, on remettoit la nappe , &c comme
Arlequin ; Q^e mangerons-nous ? de l'ail & du pain ; le soir , le matin, même
demande, même réponse 5 mais nous avions bon appétit & nous nous portions
bien.
A chaque Fort ou Tour de garde, dès qu'on nous appercevoit, nous entendions
crier de loin : Speronara di Malta, alla larga. Enfin sur le midi le vent devint
si
 
Annotationen