Archives alsaciennes d'histoire de l'art (3.1924)

LE FERRONNIER D’ART
EDGAR BRANDT
par Raymond Régamey.
IL était indiqué de consacrer une étude à Edgar Brandt dans ce recueil
des Archives Alsaciennes d’Histoire de l’Art. Alsacien, Brandt l’est par ses
origines', et quant à l’histoire de l’art, nous sommes assurés qu’elle retiendra
son nom. Sans doute, ce serait montrer beaucoup de présomption qu’essayer
de devancer le jugement qu’elle portera sur son œuvre ; mais, dès mainte-
nant, on voit se dessiner assez bien la place que cette œuvre occupe dans la
production artistique contemporaine, et, sans la juger, il n’est pas préma-
turé 4e la caractériser.
I.
Brandt est venu trop tard pour être, à proprement parler, un rénovateur.
Le sort, en le faisant débuter vers 1905 1 2, alors qu’étaient passés les temps
héroïques de la lutte pour la renaissance de la Forge, ne lui a pas permis de
participer aux recherches inquiètes, aux essais toujours méritoires mais
souvent malheureux et aux efforts que couronnaient insuffisamment les
succès. L’histoire de toutes les renaissances offre de la sorte (si l’on schéma-
tise un peu) après la génération des chercheurs celle des artistes qui réalisent
les œuvres équilibrées. Ainsi, dans la renaissance moderne des arts du métal,
le mérite de Brandt est d’avoir ordonné les tendances un peu confuses de
1 Si M. Edgar Brandt est né à Paris (en 1880), il est petit-fils de Mulhousiens qui avaient
émigré après 1870. La famille Brandt a acquis le droit de bourgeoisie à Mulhouse au XVIIe siècle-
2 Sa première exposition est de 1903, au Salon d’Automne.