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L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne — 2,1.1899/​1900

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No. 16 (Janvier 1900)
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Muthesius, Hermann: Architecture anglaise d'intérieurs: M. George Walton
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https://doi.org/10.11588/diglit.34203#0170

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L'ART DÉCORATIF

ne sauraient se résigner à vivre au milieu des
splendeurs du plâtre doré! Pour le gros du
public, ce faux art est au contraire un besoin.
^ Il en serait tout autrement si chacun accordait
plus de sollicitude aux murs entre lesquels il
vit, s'il ne se considérait pas comme un hôte
de passage dans la chambre d'hôtel préparée
pour lui, chambre qu'il quittera pour une autre
au terme suivant, mais s'il s'inquiétait d'un
séjour durable, s'il établissait entre lui-même et
sa demeure un rapport assez intime pour la
faire installer selon ses propres penchants. La
seule pensée de la sottise des moyens auxquels
recourt le simulacre de luxe des maisons de
rapport suffirait à le préserver des fautes les
plus grossières contre le goût ; le simple senti-
ment du séant se révolterait chez lui contre
l'idée de les employer aussi. Ensuite, le rapport
entre la dépense et le résultat qu'on peut en
tirer apparaîtrait plus clair à son esprit ; il
s'apercevrait que les meilleurs partis à prendre
sont les plus simples, ne fut-ce que parce qu'ils
sont les plus économiques, et cela seul serait
un progrès immense, car par là, les portes
seraient ouvertes à la formation du goût sur
ce principe, le seul vrai, de la mise en rapport
du milieu avec l'individu.
Il est clair qu'un pays comme l'Angleterre,
où l'usage s'est perpétué d habiter une maison
à soi, est privilégié à cet égard, en comparaison
de ceux où la population est parquée dans les
maisons de rapport. Plusieurs siècles de tran-
quilité politique et de développement continu
de la richesse publique ont favorisé l'Angleterre
dans son travail de constitution artistique de
la demeure. Là comme ailleurs, la décadence
profonde des arts appliqués pendant la première
moitié de ce siècle ht sentir ses effets, et eut
pour conséquence un temps d'arrêt dans ce
travail latent. Mais dès 1860 l'élan fut redonné
par Morris, l'homme de génie auquel le monde
entier doit les accomplissements de l'art d'aujour-
d'hui. Une génération anglaise l'a suivi tout
entière; la seconde, celle d'aujourd'hui, marche
encore sur ses traces, mais tend sensiblement
à se séparer du maître. La manière de sentir
de Morris le rapprochait du moyen-âge ; on
veut être aujourd hui moderne jusqu'à l'affec-
tation. Pour Morris, la Renaissance avait été
le signal de l'embourbement de l'art; les jeunes
se rapprochent de plus en plus des lignes élé-
gantes que la Renaissance introduisit dans l'art
du Nord. Il ne reste debout qu'une des con-
ceptions de Morris: celle de l'unité dans la
maison, qui reste le principe directeur de tous
non-seulement en Angleterre, mais partout,
f. L'avenir verra sans doute naître une branche
nouvelle de l'architecture : l'ordonnancement des

intérieurs. Elle deviendra le partage d'un
groupe d'artistes qui possédait déjà un ancêtre
dans le «décorateur», honnête artisan dont
l'habileté ne va pas au-delà de s'épuiser en
combinaisons pour draper ingénieusement les
rideaux de fenêtres. Le champ du futur
ordonnateur d'intérieurs est autrement vaste :
c'est à lui qu'appartiendra la direction et la
mise en œuvre de l'art appliqué tout entier,
de même que l'architecture est la grande
directrice des beaux-arts. Partout se forme le
type de ce nouvel «artiste de la demeure».
En Angleterre, il sort ordinairement des rangs
des architectes, dont la manière d'entendre sa
tâche dans ce pays le rapproche; sur le Continent,
c'est plus souvent un peintre — ce qui suffit
à faire comprendre la cause des erreurs dans
lesquelles non-seulement l'art d'ordonnancer les
intérieurs, mais l'architecture elle-même y a
versé dans les derniers temps; car l'organisation
de la demeure devrait être le but final de
l'architecture domestique, si elle se renfermait
dans ses attributions naturelles.
M. George Walton est un des architectes
d'intérieurs qui se sont fait le plus remarquer
en Angleterre depuis quelques années. Il limite
strictement ses occupations à l'ordonnancement
intérieur, mais il embrasse absolument tout ce
qui touche à celui-ci. La façon des murs, du
plafond, du plancher, l'établissement de la
cheminée et de ses accessoires, les tapis, les
meubles, les vitraux, les rideaux, les appareils
d'éclairage et leur verrerie, la vaisselle, les
ustensiles et le linge de table, en un mot tout
ce qui entre dans la maison, c'est lui qui l'y
introduit, en imprimant à tout dans celle-ci
l'unité de caractère. Chez M. Walton, ce
caractère prend sa source dans une simplicité
de bon ton, presque aristocratique, de con-
ception de la vie extérieure, dans une réserve
bien entendue qui place sa confiance dans
l'effet des formes élémentaires et dans le bon
choix de la couleur, laisse leurs droits na-
turels aux surfaces, et ne recourt au décor
que là où il peut agir efhcacament par le
contraste avec celles-ci. Contrairement à ce qui
se voit présentement en Angleterre chez beau-
coup d'autres, la décoration de M. Walton
est empreinte d'un agréable raffinement, qui
s'accorde avec les exigences de notre meilleure
société. Une liberté consciente et maîtresse
d'elle-même dans le choix des formes, quoique
non exempte de quelque préciosité, leur com-
munique à un haut degré l'intérêt et le charme
de l'original. M. Walton n'est pas du nombre
de ces modernistes par qui tout ce qui nous
vient du passé est vu d'un mauvais œil; il ne
se croit pas tenu de renier toute forme de l'art

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