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L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne — 2,1.1899/​1900

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No. 18 (Mars 1900)
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Jacques, G. M.: Digressions
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https://doi.org/10.11588/diglit.34203#0278

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L'ART DÉCORATIF

paré. Il faut me contenter de jeter quelques
indications sur le papier, pêle-mêle.
Le dos du buffet est une planche découpée;
l'armoire est un solide. L'œil ni l'esprit ne
peuvent se contenter pour le second de ce
qui suffit au premier. Arrêter une surface, c'est
découper; terminer un solide, c'est modeler.
Deux choses tout à fait différentes.
On voit bien ce qu'a voulu l'artiste. Il a
voulu échapper à la corniche traditionelle, con-
vention qu'il regarde sans doute comme surannée,
lui et maints autres.
Convention? Cela n'est pas si sûr. Condam-
nons les lignes de moulures coupant les pièces
de la charpente. Ces lignes, qui détruisent la
vision de l'ossature, ne sont dans le meuble,
construction en bois, que l'illogique simulacre
des bandeaux saillants sur les murs de l'édifice,
construction en pierre. Il est bien de les proscrire.
Mais la corniche est-elle dans le même cas?
Non. Elle est l'intention de souligner la présence
du fond du meuble, de même qu'elle est celle
de souligner la démarcation du mur et du toit
de la maison. Et cette intention s'exécute sans
qu'aucune convenance de vision ni de logique
en souffre. Le rôle de toutes les autres pièces
reste visible, l'agencement de l'ensemble par-
faitement net et clair.
Il n'est pas vrai que la corniche ne soit
qu'une convention. C'est une démonstration.
La convention, ce serait, par exemple, de
faire apparaitre, en-dessous de la saillie du fond
du meuble, des simulacres d'abouts de poutrelles
faisant semblant de supporter ce fond. Des
dessinateurs anglais ont fait cela. C'est le vrai
dans la maison, et le faux dans le meuble.
Il y a mille pratiques à saper dans l'art
industriel. Cela ne veut pas dire qu'il faille
ériger le chambardement universel en principe.
En combattant ce qui n'est pas d'une logique
absolue (ceci suppose qu'il y en aie une !) prenons
garde de tomber dans le pire. Un artiste bien
connu a voulu inventer une formule nouvelle
pour terminer le meuble. Qu'a-t-il trouvé? Des
crampons qui terminent les montants et font
semblant de serrer le toit du meuble contre sa
charpente. Naturellement, ces simili-crochets ne
peuvent être obtenus qu'au moyen d'une
demi-douzaine de petits morceaux de bois collés

ensemble Dieu sait comme. Découvrez, si vous
pouvez, une plaisanterie de ce calibre-là dans
tout l'arsenal des vieux styles!
Ceci n'est pas un plaidoyer pour la corniche.
J'établis seulement qu'en condamnant et en
innovant, il faut regarder à deux fois, et que
l'idée fixe de tout balayer ne suffit pas pour
faire bien.
Evidemment, il n'est pas impossible de se
passer de la corniche pour former le faîte d'un
meuble (je ne parle que des solides, des cubes).
Mais c'est très difficile. Dans l'armoire dont j'ai
parlé tout-à-l'heure, M. de Beckerath n'y a pas
réussi. Dans l'autre armoire (celle de droite) il
approche d'une solution acceptable. La termi-
naison bien accentuée des montants, et la
vigueur de l'ensemble que la traverse supérieure
forme avec eux donnent un faîte dont l'énergie
corrige jusqu'à un certain point le manque
d'accidentation du cube.
Autre chose. Revenons au buffet et à l'ar-
moire de gauche. Ces deux pièces ne font point
partie du même ensemble; mais les profils de
leurs faites sont assez voisins pour les prendre
comme exemples du cas d'un meuble plan et
d'un meuble solide entre lesquels on aurait voulu
établer l'unité: par exemple, le dos du lit et
l'armoire d'une chambre à coucher. Comment
cette unité doit-elle être établie?
Dans certains styles anciens — le Louis XVI
par exemple — cela va tout seul. Les colonnes,
on trouve toujours moyen de les placer par-
tout, et le fronton est un artifice très commode.
Vous taillez le faîte du dos de lit comme il
vous plaît; vous découpez une planche sur le
même patron, la campez droite au-dessus de
l'armoire, et ça y est : vous avez du même
coup le «style!» et l'unité. Malheureusement,
c'est un peu sommaire.
Il me semble qu'il n'est pas du tout naturel
de s'astreindre à donner au sommet d'un solide
la même forme qu'au sommet d'une sur-
face, parceque cela ne peut se faire qu'en violen-
tant dans l'un ou dans l'autre les besoins, les
convenances, le dessin, la matière, le mode de
travail, tout. Rien n'est moins raisonnable.
C'est pourtant le but que tous les dessinateurs
de meubles poursuivent; et les yeux du public
sont tellement habitués à cela, que personne

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