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L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne — 3,1.1900/​1901

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No. 26 (Novembre 1900)
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Thomas, Albert: La peinture décorative à l'exposition
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https://doi.org/10.11588/diglit.34205#0070

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L'ART DECORATIF

Car le goût est notre apanage. Ce sûr ins-
tinct du trop et du trop peu en toutes choses,
ce sens exquis de ia mesure, c'est nous qui ie
détenons aux yeux de l'univers. Grâce à notre
bon goût, nous paraissons dominer les autres
peuples. Si fiers qu'ils se disent de leurs créa-


THOMAS HANSEN DÉCORATION MURALE AU POCHOIR
(SECTION DANOISE, GR. VII.) o o o

dons originales, de leur génie individuel, les
étrangers demeurent devant nous inquiets et
dépités, ils se sentent souvent mal compris;
nous avons vis-à-vis d'eux la plus riante assu-
rance; nous savons que notre langage ils l'en-
tendent toujours, même quand ils ne le parlent
pas. Sans doute, le goût, source de notre force,

fait aussi notre faiblesse, il nous préserve trop
bien des grandes ivresses lyriques, des grands
transports de la pensée et de l'âme, il nous in-
terdit d'égaler jamais la sublimité d'un Shakes-
peare ou d'un Goethe. Au demeurant c'est le
meilleur des guides. Lorsque toutes les nations,
en quête d'une esthétique nouvelle, s'attardent
à des essais bizarres, il permet à la France
d'atteindre assez promptement les formules les
plus heureuses et les plus sages. Ce fait, sen-
sible dans la décoration figurative, l'est surtout
dans la décoration proprement dite. Je n'en
veux pour preuve que les compositions de
MM. Ruty et Félix Aubert.
Ces œuvres sont bien françaises, elles ré-
sument nos meilleurs dons, elles résolvent avec
grâce et simplicité la question du décor floral.
On avait dans ces derniers temps abusé des
thèmes naturels. On avait pillé sans discerne-
ment les jardins, les champs et les bois; la jon-
chée de feuillages et de corolles — lierres,
trèfles, chardons, iris, nénuphars, marguerites
— s'était répandue au hasard sur les murs, les
tapis, les rideaux, les meubles et les moindres
objets de nos appartements. Le gaspillage était
manifeste ; les critiques s'indignèrent avec
raison. Des artistes étrangers s'appliquèrent
alors à des compositions purement convention-
nelles, à des combinaisons de formes et de
lignes souvent déconcertantes, mais qui répon-
daient chez eux à un instinct profond du géné-
ral et de l'abstrait. Nous prétendîmes les suivre
dans cette voie. Notre esprit, trop attaché aux
choses concrètes, trop ennemi de la géométrie
pure, s'accommoda fort mal de ces fantaisies spé-
culatives; il n'y trouva qu'insupportable ennui.
Force lui fut donc de revenir à la fleur. Echappé
aux régions inhospitalières où s'esquissait dans
les nuées le monde menaçant des figures, sauvé
du lacet belge et du crochet autrichien, secouant
la brume qui restait à ses ailes, il s'ébroua parmi
le peuple vivant des roses. Mais il avait appris
la sagesse. Il répudia l'imitation servile des
formes végétales et l'usage inconsidéré qu'il
avait fait de ces formes. Il synthétisa les élé-
ments fournis par la nature, il les concentra en
certaines surfaces. Il trouva, dans quelques
œuvres, le juste degré de la stylisation et les
limites précises du décor. Au pavillon du Prin-
temps, grâce au jeune artiste Ruty, il se montra
discret, ingénieux et fin. Sur les murs de l'édi-
fice, doté par Cheret d'un adorable plafond, il
fit s'épanouir, comme le nom l'incitait à le faire,
toute la floraison charmante du « printemps )).

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