L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne (3,1.1900/1901)

NOVEMBRE 1900


A. LANDRY
qu'est-ce que le style, sinon l'éclatante manifes-
tation du vrai?
Le caractère de beaucoup de nos «
)) est précisément l'absence de style,
bien plus, la violation préméditée du style.
Emportés par l'ardente recherche du nouveau,
nombre de novateurs en arrivent à ne plus
chercher que l'originalité à tout prix. Trouver
quelque chose qui ne ressemble à rien de ce
qui s'est vu, voilà leur but, but auquel tout est
sacrifié. De là ces constructions hybrides où les
lois de la mécanique sont métamorphosées; ces
formes où les propriétés de la matière devien-
nent méconnaissables; ces combinaisons où les
pièces, cessant d'être organes pour se réduire
à des lignes, n'obéissant à d'autre loi que le
caprice, énervent l'œil de leur dérèglement
voulu. Créations morbides, qui portent en elles
le germe d'une caducité précoce et ne survi-

A. LANDRY

débattons depuis la chute de la monarchie, je
veux dire des copies du passé. Il n'y a pas zz/z
s(yz7? — dont personne ne se soucie d'ailleurs —
mais une foule de styles.
Ceci n'est vrai toutefois qu'à condition de
ne pas se montrer trop difficile sur les mots.
Pour l'admettre, il faut admettre aussi que tout
tic d'artiste est un style, ce qui n'est rien
moins que certain. Dans un temps pas très
reculé — une quinzaine d'années — un archi-
tecte écrivain alors encore très écouté, César
Daly, posait cette question dans une brochure :
«La Renaissance est-elle un style? )) et répon-
dait catégoriquement non. Le vieux précurseur
disait vrai, car derrière l'élégance, la grâce fa-
cile des lignes, l'abondance décorative, la Re-
naissance cache la négation constante des lois
du vrai; tout n'est en elle que surface. Or,

7i