DOI Heft:
Nr. 4
DOI Artikel:Sandoz, Marc: Les peintures decoratives de la Chambre des Seigneurs du Château de Varsovie: "aujourd'hui au Musée National de Varsovie
DOI Seite / Zitierlink: https://doi.org/10.11588/diglit.18860#0132
destiné à être exécuté en tapisserie à la manufacture royale des Gobelins1". La tendance sculpturale
y est déjà marquée. La belle figure de Proserpine reparaîtra, inchangée, dans une des figures
des quatre saisons (fig 3) de la décoration commandée par Mme Geoffrin précisément, jusqu'ici
perdue, mais reparue récemment à Paris17, et présentée au Salon de 1763. On ne sera donc pas
surpris de retrouver dans le tableua de Stanislas-Auguste, au travers de la gracieuse Proserpine
de Mme Geoffrin, la composition de 1757 ,à laquelle notre tableau correspond point par point.
L'artiste y a ajouté les deux figures du coin inférieur gauche, qui allègent heureusement la
sévérité masculine du tab.eau, et rappellent, à travers Bologne encore, la grace si originale
des célèbres "grecques" des Salons de 1761 et 1763.
L' "idée de justice", selon le voeu de Stanislas-Auguste, est représentée par le sujet bien
connu : La continence de Scipion (fig. 4)ls. La peinture ne paraît pas au Salon. C'est qu'en effet
le sujet était celui qui avait été réservé à Boucher, assez âgé déjà, n'arrivait pas à sortir son
tableau de 1' "ébauche". Mme Geoffrin écrit au roi, à la fin du Salon : "Il y en a trois de Votre
Majesté de faits ; ils ne pourront partir qu'au printemps. Celui de Boucher n'est qu'ébauché.
Boucher est vieux et infirme, il va doucement, mais il va encore bien"10. Vien, qui était son
"ami", aura sans doute accepté, à la demande de Mme Geoffrin, de traiter le sujet. En février
1768 le tableau est achevé.
Il faut sans doute attribuer à l'extrême hâte de ce grand tableau les bonheurs inégaux de sa
composition, comme de son exécution. Il faut du moins reconnaître à Vien le mérite d'avoir
exorcisé son tableau de la préciosité et de la "petite manière" qu'on voit trop dans ce sujet
si fréquemment traité. Les figures principales sont intéressantes, et les draperies admirables :
et pour les figures secondaires le réalisme bolonais fournit encore son opportune contribution.
Le schéma de composition sera repris par Vien quelques années plus tard dans sa contribution
à l'école royale militaire, dans le tableau aujourd'hui heureusement revenu à sa place (fig. 5) :
Saint Louis, à son avènement à la Couronne, remet à la reine Blanche de Castille, sa mère, la régence
du royaume, en présence du cardinal légat du pape.
"L'idée de concorde ' est confiée à Noël Hallé, qui n'est pas nommé dans la correspondance
conservée, et qui présente son tableau au Salon (fig. 6), avec le long titre : Scilurus, Roi des
Scythes, se voyant près de mourir, fait assembler ses enfants, (l'Histoire lui donne 80 enfants mâles).
ordonne au plus jeune de prendre une flèche et de la rompre, ce qu'il fit sans peine. Il commande
ensuite aux ainés d'en rassembler plusieurs, d'en former un faisceau et d'essayer de le rompre. Tous
leurs efforts furent vains. Telle est force de l'union, dit ce père à ses fils : vivez amis vous serez invin-
cibles. Le tableau... appartient à S.M. le Roi de Pologne*".
La composition sans profondeur, et tout entière ramenée au premier plan, est la parfaite composi-
tion décorative, et convient à la tapisserie. Hallé deviendra d'aileurs le surinspecteur des Gobelins
en 1770. Mais Hallé traite plus volontiers les petits sujets mythologiques et pieux, et on ne
saurait lui demander de restituer dans sa peinture le grand souffle poétique de l'Histoire. Le
tableau, cependant, se souvient de Lebrun, et cette composition se retrouvera à plusieurs reprises
dans la peinture d'histoire de la deuxième moitié du XVIIIe siècle. L'ensemble, ici, parait devoir
quelque peu à La Prince, qui, depuis deux ans, se faisait une célébrité avec ses nouvelles "rus-
series" et "jeux russiens".
16. Le tableau est aujourd'jui au Musée de Grenoble.
17. Vente des collections Penur y Fernandez. Paris, palais Galliera, 7 décembre I960, no 42 (reproduit).
18. Joseph-Marie Vien, La continence de Scipion. signé : jo.m. vien. 1768 ; toile, 298 X 157 ; Musée Nationul de Varsovie, no inv.
130298. Publié: Correspondance... op. cit.; L. Réau, Histoire de l'expansion, op. cit., p. 30-32 ; T. Mańkowski, op. cit..
no 869 ; K. Brokl, op. cit., p. 55 ; Diderot, op. cit., III, p. 11, 87 ; Catalogue of Paintings..., op. cit., no 1382 ; Sztuka fran-
cuska. .., op. cit., no 61.
19. Lettre du 27 décembre 1767 (Correspondance____ op. cit., p. 319).
20. Noël Hallé, Scilures, roi des Scythes fait rassembler ses enfants, toile, 300 X I 58 ; Musée National de Varsovie, no inv. 130414.
Publié : Estournet, op. cit., no 137 ; L. Dussieux, op. cit., p. 92 ; Correspondance..., op. cit. ; L. Réau, Histoire de l'expansion,
op. cit., p. 30-32 ; T. Mańkowski, op. cit., no 867 ; K. Brokl, op. cit., p. 56 ; H. Bardon, op. cit., p. 225, 237, 240 ; Diderot,
op. cit., p. 11, 18-19, 72-73; Catalogue of Paintings... op. cit., no 477 ; Sztuka francuska... op. cit., no 28.
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y est déjà marquée. La belle figure de Proserpine reparaîtra, inchangée, dans une des figures
des quatre saisons (fig 3) de la décoration commandée par Mme Geoffrin précisément, jusqu'ici
perdue, mais reparue récemment à Paris17, et présentée au Salon de 1763. On ne sera donc pas
surpris de retrouver dans le tableua de Stanislas-Auguste, au travers de la gracieuse Proserpine
de Mme Geoffrin, la composition de 1757 ,à laquelle notre tableau correspond point par point.
L'artiste y a ajouté les deux figures du coin inférieur gauche, qui allègent heureusement la
sévérité masculine du tab.eau, et rappellent, à travers Bologne encore, la grace si originale
des célèbres "grecques" des Salons de 1761 et 1763.
L' "idée de justice", selon le voeu de Stanislas-Auguste, est représentée par le sujet bien
connu : La continence de Scipion (fig. 4)ls. La peinture ne paraît pas au Salon. C'est qu'en effet
le sujet était celui qui avait été réservé à Boucher, assez âgé déjà, n'arrivait pas à sortir son
tableau de 1' "ébauche". Mme Geoffrin écrit au roi, à la fin du Salon : "Il y en a trois de Votre
Majesté de faits ; ils ne pourront partir qu'au printemps. Celui de Boucher n'est qu'ébauché.
Boucher est vieux et infirme, il va doucement, mais il va encore bien"10. Vien, qui était son
"ami", aura sans doute accepté, à la demande de Mme Geoffrin, de traiter le sujet. En février
1768 le tableau est achevé.
Il faut sans doute attribuer à l'extrême hâte de ce grand tableau les bonheurs inégaux de sa
composition, comme de son exécution. Il faut du moins reconnaître à Vien le mérite d'avoir
exorcisé son tableau de la préciosité et de la "petite manière" qu'on voit trop dans ce sujet
si fréquemment traité. Les figures principales sont intéressantes, et les draperies admirables :
et pour les figures secondaires le réalisme bolonais fournit encore son opportune contribution.
Le schéma de composition sera repris par Vien quelques années plus tard dans sa contribution
à l'école royale militaire, dans le tableau aujourd'hui heureusement revenu à sa place (fig. 5) :
Saint Louis, à son avènement à la Couronne, remet à la reine Blanche de Castille, sa mère, la régence
du royaume, en présence du cardinal légat du pape.
"L'idée de concorde ' est confiée à Noël Hallé, qui n'est pas nommé dans la correspondance
conservée, et qui présente son tableau au Salon (fig. 6), avec le long titre : Scilurus, Roi des
Scythes, se voyant près de mourir, fait assembler ses enfants, (l'Histoire lui donne 80 enfants mâles).
ordonne au plus jeune de prendre une flèche et de la rompre, ce qu'il fit sans peine. Il commande
ensuite aux ainés d'en rassembler plusieurs, d'en former un faisceau et d'essayer de le rompre. Tous
leurs efforts furent vains. Telle est force de l'union, dit ce père à ses fils : vivez amis vous serez invin-
cibles. Le tableau... appartient à S.M. le Roi de Pologne*".
La composition sans profondeur, et tout entière ramenée au premier plan, est la parfaite composi-
tion décorative, et convient à la tapisserie. Hallé deviendra d'aileurs le surinspecteur des Gobelins
en 1770. Mais Hallé traite plus volontiers les petits sujets mythologiques et pieux, et on ne
saurait lui demander de restituer dans sa peinture le grand souffle poétique de l'Histoire. Le
tableau, cependant, se souvient de Lebrun, et cette composition se retrouvera à plusieurs reprises
dans la peinture d'histoire de la deuxième moitié du XVIIIe siècle. L'ensemble, ici, parait devoir
quelque peu à La Prince, qui, depuis deux ans, se faisait une célébrité avec ses nouvelles "rus-
series" et "jeux russiens".
16. Le tableau est aujourd'jui au Musée de Grenoble.
17. Vente des collections Penur y Fernandez. Paris, palais Galliera, 7 décembre I960, no 42 (reproduit).
18. Joseph-Marie Vien, La continence de Scipion. signé : jo.m. vien. 1768 ; toile, 298 X 157 ; Musée Nationul de Varsovie, no inv.
130298. Publié: Correspondance... op. cit.; L. Réau, Histoire de l'expansion, op. cit., p. 30-32 ; T. Mańkowski, op. cit..
no 869 ; K. Brokl, op. cit., p. 55 ; Diderot, op. cit., III, p. 11, 87 ; Catalogue of Paintings..., op. cit., no 1382 ; Sztuka fran-
cuska. .., op. cit., no 61.
19. Lettre du 27 décembre 1767 (Correspondance____ op. cit., p. 319).
20. Noël Hallé, Scilures, roi des Scythes fait rassembler ses enfants, toile, 300 X I 58 ; Musée National de Varsovie, no inv. 130414.
Publié : Estournet, op. cit., no 137 ; L. Dussieux, op. cit., p. 92 ; Correspondance..., op. cit. ; L. Réau, Histoire de l'expansion,
op. cit., p. 30-32 ; T. Mańkowski, op. cit., no 867 ; K. Brokl, op. cit., p. 56 ; H. Bardon, op. cit., p. 225, 237, 240 ; Diderot,
op. cit., p. 11, 18-19, 72-73; Catalogue of Paintings... op. cit., no 477 ; Sztuka francuska... op. cit., no 28.
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