DES POUMONS.
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ACTION DES POUMONS.
Les poumons sont les organes tic la respiration. L'objet essen-
tiel de cette fonction est la conversion du sang noir ou veineux
en sang rongeou artériel, par le contact de l'air et sous l'influence
de l'innervation. Ayant eu à disenter, pour chacune des parties
composantes du poumon, la part qui lui appartient dans l'ac-
tion commune, il ne me reste qu à en présenter un résumé
d'ensemble.
i° Mécanisme respiratoire. L'ainpliation de la poitrine est dé-
terminée par le jeu des muscles inspirateurs ; l'air se précipite
dans les poumons. Cet effet, résultat nécessaire de la pression
atmosphérique, est réel, mais est-il le seul? En d'autres termes, le
poumon, qui déjà offre une résistance à vaincre, pour son alon-
gement et sa distension, est-il absolument passif dans Mnspira-
tion; ou, au contraire, les canaux bronchiques aident-ils à faire
parvenir l'air jusque dans les ramifications labyrinthiques? En
fait, chacun a pu voir, sur un animal vivant dont la poitrine
est ouverte, le double mouvement respiratoire s'exécuter en-
core avec énergie. Cette expérience est d'un haut intérêt, en ce
qu'elle prouve que le poumon, indépendamment des forces
auxiliaires qui aident à la respiration, y concourt lui-même
d'une manière très active. En théorie, la dilatation des grands
canaux a paru, à la plupart des physiologistes, un simple fait
d'élasticité, les parois revenues à leur forme première, après
qu'elles ont été resserrées activement dans l'expiration , obéis-
sant de nouveau à la pression de l'air. Au-delà , on s'est de-
mandé si, dans les petits canaux , les fibres annelées, par une
sorte de mouvement vermiculaire, analogue à celui de la plu-
part des organes cylindriques, ne peuvent pas contribuer à
chasser l'air de proche en proche dans les dernières divisions
aériennes. Cette opinion, interprétée de la texture, me paraît
très probable, toutefois on ne peut la présenter qu'avec réserve
comme toutes les explications des phénomènes intimes qui, se
passant hors de la portée des sens, se refusent à l'observation
expérimentale.
Le phénomène de ^expiration s'explique assez clairement. Les
parois thoraciques reviennent sur elles-mêmes par l'influence
de trois causes: leur propre élasticité, le relâchement des mus-
cles inspirateurs et l'action des expirateurs. Le poumon lui-
même, comme le témoigne l'observation directe, participe ac-
tivement à ce mécanisme par la rétraction de ses fibres longitu-
dinales et la constriction de ses fibres circulaires. La théorie
physique de la respiration paraît donc assez bien comprise;
mais, pour qu'elle soit complète, il reste à déterminer le rôle
que jouent, dans le double mouvement respiratoire, les canaux
labyrinthiques formant la substance intime du poumon. L'opi-
nion la plus générale est que les parois de ces canaux (vésicules
pulmonaires des auteurs), quelle que soit la nature propre de
leur tissu, sont douées d'une élasticité très prononcée; en sorte
que, distendues d'une manière passive dans l'inspiration, elles
reviennent sur elles-mêmes dans l'expiration. On peut citer à
l'appui de cette opinion le retrait considérable que subit le
poumon sain et insufflé d'un jeune sujet, comparé à l'absence
plus ou moins complète de cette propriété dans le poumon
emphysémateux d'un vieillard.
2° Hématose. L'air étant introduit dans les poumons, nous
avons vu que la forme conique inverse des vaisseaux avait le
T. IV.
double effet d'empêcher son retour dans le cœur droit, et de
faciliter son transport vers le cœur gauche. L'air atmosphérique,
dans son état de pureté, est composé, sur cent parties, de 0,2 1
d'oxigèneeto,79 d'azote; il contient,en outre, une faible propor-
tion de gaz acide carbonique et de vapeur d'eau, variable suivant
les lieux et l'état hygrométrique ambiant. A la sortie du poumon,
l'air contient la même quantité d'azote, mais il a perdu de un
à trois centièmes d'oxigène, remplacés par une proportion à-
peu-près semblable d'acide carbonique, plus une quantité no-
table de vapeur d'eau, contenant, comme le remarqueChaussier,
une matière animale en dissolution. Tel est le résultat général
des travaux de la chimie pneumatique; on ignore absolument
si, dans la respiration, il y a ou non un peu d'azote absorbé.
L'effet apparent du contact de l'air est la conversion du sang
noir en sang rouge, appelée du nom d'hématose. Du reste, que
se passe-t-il dans ce phénomène? Le peu de précision des ré-
sultats obtenus a donné lieu à trois hypothèses. Les uns ont
pensé que l'oxigène absorbé se partageait en trois parties ; deux
d'entre elles servant à la combustion d'une portion du carbone
et de l'hydrogène du sang veineux, pour former de l'acide car-
bonique et de l'eau, tandis que la troisième partie se combinait
avec le sang. Dans une deuxième opinion, l'oxigène se fixerait
en entier sur le sang, l'acide carbonique et l'eau n'étant que dé-
gagés du sang veineux où ils sont tous formés; car, suivant
M. Brodie, le sang noir laisse dégager du gaz carbonique sous
la machine pneumatique. Enfin une opinion tierce croirait au
partage entre les deux sortes de phénomènes, admettant que
l'eau et l'acide carbonique peuvent être en partie émanés du
sang veineux, en partie le produit de la combustion pulmo-
naire ; cette dernière hypothèse n'est qu'une concession insigni-
fiante ; la première a été long-temps dominante; la seconde est
peut-être la plus probable. Le seul doute porte sur l'acide car-
bonique. En ce qui concerne la vapeur d'eau, elle est géné-
ralement trop abondante pour être le produit de la combustion
locale. Ce fait ressortait déjà des expériences de Sanctorius et de
Séguin ; mais M. Magendie lui a donné une autorité invincible
par ses expériences, d'où il résulte que la surface des voies
aériennes, auxiliaires de la peau et des organes sécréteurs de
l'urine, débarrasse le sang d'une quantité d'eau considérable in-
jectée dans les veines, et qu'elle sert aussi d'émonctoire pour les
substances diffusibles. Ces faits, s'ils ne prouvent pas positive-
ment l'absence de combustion de l'hydrogène dans le poumon,
rendent du moins cette hypothèse tout-à-fait inutile pour ex-
pliquer la présence de la vapeur d'eau dans l'air expiré.
Reste à déterminer quels sont proprement les vaisseaux par
l'intermédiaire desquels s'effectue l'hématose. Il était naturel de
penser que ce devaient être les capillaires sanguins intermédiai-
res aux artères et aux veines pulmonaires. La forme spéciale de
l'appareil sanguin, sa capacité, le passage de l'injection des
artères aux veines, et enfin la vue directe, sur les animaux
vivans, du changement de sang noir en sang rouge, tout s'ac-
cordait à rendre cette opinion irrécusable. On comprend à
peine comment a pu s'établir la singulière hypothèse de Chaus-
sier d'une prétendue absorption de l'air par les vaisseaux lym-
phatiques , hypothèse qui placerait le phénomène de la san-
guification dans les veines avant le cœur droit. En nous en
tenant aux faits anatomiques, il me semble que les recherches
énoncées plus haut sur la structure intime des poumons ont
singulièrement élucidé le mécanisme de l'hématose. Ce sont
évidemment les anneaux vasculaires qui en sont le siège. C'est
pour multiplier le contact du sang noir avec l'air que les ar-
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Les poumons sont les organes tic la respiration. L'objet essen-
tiel de cette fonction est la conversion du sang noir ou veineux
en sang rongeou artériel, par le contact de l'air et sous l'influence
de l'innervation. Ayant eu à disenter, pour chacune des parties
composantes du poumon, la part qui lui appartient dans l'ac-
tion commune, il ne me reste qu à en présenter un résumé
d'ensemble.
i° Mécanisme respiratoire. L'ainpliation de la poitrine est dé-
terminée par le jeu des muscles inspirateurs ; l'air se précipite
dans les poumons. Cet effet, résultat nécessaire de la pression
atmosphérique, est réel, mais est-il le seul? En d'autres termes, le
poumon, qui déjà offre une résistance à vaincre, pour son alon-
gement et sa distension, est-il absolument passif dans Mnspira-
tion; ou, au contraire, les canaux bronchiques aident-ils à faire
parvenir l'air jusque dans les ramifications labyrinthiques? En
fait, chacun a pu voir, sur un animal vivant dont la poitrine
est ouverte, le double mouvement respiratoire s'exécuter en-
core avec énergie. Cette expérience est d'un haut intérêt, en ce
qu'elle prouve que le poumon, indépendamment des forces
auxiliaires qui aident à la respiration, y concourt lui-même
d'une manière très active. En théorie, la dilatation des grands
canaux a paru, à la plupart des physiologistes, un simple fait
d'élasticité, les parois revenues à leur forme première, après
qu'elles ont été resserrées activement dans l'expiration , obéis-
sant de nouveau à la pression de l'air. Au-delà , on s'est de-
mandé si, dans les petits canaux , les fibres annelées, par une
sorte de mouvement vermiculaire, analogue à celui de la plu-
part des organes cylindriques, ne peuvent pas contribuer à
chasser l'air de proche en proche dans les dernières divisions
aériennes. Cette opinion, interprétée de la texture, me paraît
très probable, toutefois on ne peut la présenter qu'avec réserve
comme toutes les explications des phénomènes intimes qui, se
passant hors de la portée des sens, se refusent à l'observation
expérimentale.
Le phénomène de ^expiration s'explique assez clairement. Les
parois thoraciques reviennent sur elles-mêmes par l'influence
de trois causes: leur propre élasticité, le relâchement des mus-
cles inspirateurs et l'action des expirateurs. Le poumon lui-
même, comme le témoigne l'observation directe, participe ac-
tivement à ce mécanisme par la rétraction de ses fibres longitu-
dinales et la constriction de ses fibres circulaires. La théorie
physique de la respiration paraît donc assez bien comprise;
mais, pour qu'elle soit complète, il reste à déterminer le rôle
que jouent, dans le double mouvement respiratoire, les canaux
labyrinthiques formant la substance intime du poumon. L'opi-
nion la plus générale est que les parois de ces canaux (vésicules
pulmonaires des auteurs), quelle que soit la nature propre de
leur tissu, sont douées d'une élasticité très prononcée; en sorte
que, distendues d'une manière passive dans l'inspiration, elles
reviennent sur elles-mêmes dans l'expiration. On peut citer à
l'appui de cette opinion le retrait considérable que subit le
poumon sain et insufflé d'un jeune sujet, comparé à l'absence
plus ou moins complète de cette propriété dans le poumon
emphysémateux d'un vieillard.
2° Hématose. L'air étant introduit dans les poumons, nous
avons vu que la forme conique inverse des vaisseaux avait le
T. IV.
double effet d'empêcher son retour dans le cœur droit, et de
faciliter son transport vers le cœur gauche. L'air atmosphérique,
dans son état de pureté, est composé, sur cent parties, de 0,2 1
d'oxigèneeto,79 d'azote; il contient,en outre, une faible propor-
tion de gaz acide carbonique et de vapeur d'eau, variable suivant
les lieux et l'état hygrométrique ambiant. A la sortie du poumon,
l'air contient la même quantité d'azote, mais il a perdu de un
à trois centièmes d'oxigène, remplacés par une proportion à-
peu-près semblable d'acide carbonique, plus une quantité no-
table de vapeur d'eau, contenant, comme le remarqueChaussier,
une matière animale en dissolution. Tel est le résultat général
des travaux de la chimie pneumatique; on ignore absolument
si, dans la respiration, il y a ou non un peu d'azote absorbé.
L'effet apparent du contact de l'air est la conversion du sang
noir en sang rouge, appelée du nom d'hématose. Du reste, que
se passe-t-il dans ce phénomène? Le peu de précision des ré-
sultats obtenus a donné lieu à trois hypothèses. Les uns ont
pensé que l'oxigène absorbé se partageait en trois parties ; deux
d'entre elles servant à la combustion d'une portion du carbone
et de l'hydrogène du sang veineux, pour former de l'acide car-
bonique et de l'eau, tandis que la troisième partie se combinait
avec le sang. Dans une deuxième opinion, l'oxigène se fixerait
en entier sur le sang, l'acide carbonique et l'eau n'étant que dé-
gagés du sang veineux où ils sont tous formés; car, suivant
M. Brodie, le sang noir laisse dégager du gaz carbonique sous
la machine pneumatique. Enfin une opinion tierce croirait au
partage entre les deux sortes de phénomènes, admettant que
l'eau et l'acide carbonique peuvent être en partie émanés du
sang veineux, en partie le produit de la combustion pulmo-
naire ; cette dernière hypothèse n'est qu'une concession insigni-
fiante ; la première a été long-temps dominante; la seconde est
peut-être la plus probable. Le seul doute porte sur l'acide car-
bonique. En ce qui concerne la vapeur d'eau, elle est géné-
ralement trop abondante pour être le produit de la combustion
locale. Ce fait ressortait déjà des expériences de Sanctorius et de
Séguin ; mais M. Magendie lui a donné une autorité invincible
par ses expériences, d'où il résulte que la surface des voies
aériennes, auxiliaires de la peau et des organes sécréteurs de
l'urine, débarrasse le sang d'une quantité d'eau considérable in-
jectée dans les veines, et qu'elle sert aussi d'émonctoire pour les
substances diffusibles. Ces faits, s'ils ne prouvent pas positive-
ment l'absence de combustion de l'hydrogène dans le poumon,
rendent du moins cette hypothèse tout-à-fait inutile pour ex-
pliquer la présence de la vapeur d'eau dans l'air expiré.
Reste à déterminer quels sont proprement les vaisseaux par
l'intermédiaire desquels s'effectue l'hématose. Il était naturel de
penser que ce devaient être les capillaires sanguins intermédiai-
res aux artères et aux veines pulmonaires. La forme spéciale de
l'appareil sanguin, sa capacité, le passage de l'injection des
artères aux veines, et enfin la vue directe, sur les animaux
vivans, du changement de sang noir en sang rouge, tout s'ac-
cordait à rendre cette opinion irrécusable. On comprend à
peine comment a pu s'établir la singulière hypothèse de Chaus-
sier d'une prétendue absorption de l'air par les vaisseaux lym-
phatiques , hypothèse qui placerait le phénomène de la san-
guification dans les veines avant le cœur droit. En nous en
tenant aux faits anatomiques, il me semble que les recherches
énoncées plus haut sur la structure intime des poumons ont
singulièrement élucidé le mécanisme de l'hématose. Ce sont
évidemment les anneaux vasculaires qui en sont le siège. C'est
pour multiplier le contact du sang noir avec l'air que les ar-
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