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Bulletin de l' art pour tous — 1895

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No 111 (Mars 1895)
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https://doi.org/10.11588/diglit.19283#0009
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BULLETIN DE MARS 1895

Histoire du Livre

A TRAVERS LES AGES

Au début de celle étude sur l'histoire du Livre
à travers les âges, il est important de bien pré-
ciser le but qu'on se propose, et le sens qu il
faut attacher au titre choisi.

Ce serait sortir de noire cadre que de vouloir
traiter ici du Livre, production de 1 esprit
humain, littérature ou histoire, poésie ou ro-
man; nous voulons examiner les phases diffé-
rentes par lesquelles il a passé, en ne le consi-
dérant que comme produit industriel, et essayer
de dégager les divers aspects qu'il a présentés
suivant qu'il a été exécuté dans l'antiquité, au
moyen âge et de nos jours. Ce n'est là, on le
voit, qu'un des côtés de l'histoire du Livre,
c'est seulement l'histoire d'un produit de l'art
industriel, mais d'un art industriel qui a été et
est heureusement encore une gloire bien fran-
çaise et bien parisienne.

Le Livre, de nos jours, est une réunion de
feuilles, brochées ou reliées; ces feuilles ne sont
pas blanches, — nous aurions alors un registre,
— elles sont couvertes de caractères, imprimés
le plus souvent, ou bien de dessins ou de gra-
vures. Le format est déterminé rigoureusement
par le pliage de la feuille. Ajoutez que le Livre
se produit à un nombre très considérable
d'exemplaires, que les libraires sont très nom-
breux, et qu'il n'y a peut-être pas au monde
d'agent de civilisation et d'instruction plus actif,
et, tant bien que mal, vous aurez déterminé ce
qu'est, à notre époque, le Livre, c'est-à-dire la
chose la plus commune et la plus répandue.

Il n'en fut pas toujours ainsi. A des époques,
bien lointaines il est vrai, le Livre a été une
plaque de terre-cuite, à ce que semblent prouver
des fouilles en Assyrie et en Chaldée; là, on a
trouvé une véritable bibliothèque, dont tous les
livres sont des briques couvertes de caractères.
Ailleurs, le Livre était chose à peu près incon-
nue ; l'inscription le remplaçait, et l'empereur
romain Auguste, voulant faire connaître au
monde sa volonté et ses bienfaits, ne crut pas
trouver de moyen meilleur que de les faire
graver sur les parois des temples, et pourtant,
depuis bien des siècles, le Livre existait.

Tout ce qui est écrit n'est pas un livre. On a
écrit sur des peaux, dès le moment sans doute
où il fut nécessaire de conserver autrement que
par la mémoire certains faits, certains événe-
ments, et, surtout, des comptes. Mais un des
caractères du Livre est la répétition, à un cer-
tain nombre d'exemplaires, d'un même texte.

Ce caractère semble pour la première fois se

rencontrer en Egypte. Du moins, c'est de ce
pays que nous viennent les premiers monuments
que l'on peut considérer comme des Livres.

C'était un des usages les plus respectés de
l'ancienne Egypte que la sépulture sacrée des
morts. Rien n'était épargné pour ensevelir le
défunt: depuis l'embaumement jusqu'à la dépo-
sition au tombeau, creusé dans le roc et orné de
peintures, le cadavre faisait l'objet de soins tout
particuliers. Mis dans une bière décorée et
sculptée, dont le couvercle représentait fré-
quemment une tête humaine, le corps était
entouré de figurines, de scarabées, de statuettes
émaillées, dont le nombre et la valeur variaient
suivant le degré de fortune du défunt. Mais cela
ne suffisait point. Les Égyptiens, croyant à l'im-
mortalité de l'âme, voulaient se présenter devant
le Dieu des Enfers, nous dirions aujourd'hui en
état de grâce. Pour cela, il existait un formulaire,
des prières consacrées, réunies en volume.
C'est ce volume, ce Rouleau des Morts, que
nous retrouvons aujourd'hui dans les boîtes à
momie. C'est là, probablement, le plus ancien

livre conservé.

A une époque plus récente, en Grèce, nous
avons la preuve de l'existence du Livre; les
grands orateurs, les poètes, les historiens étaient
connus par tous les gens instruits, chez ce
peuple qui ne comptait pas un ignorant. A Rome,
il y eut des libraires, et un ami de Cicéron,
Atticus, est considéré par plusieurs bibliographes
comme un éditeur important. Les auteurs latins
nous initient à l'existence du Livre dans la Rome j
antique, et, alors comme aujourd'hui, un méchant
livre finissait chez l'épicier.

Tous ces livres, de même que nos livres mo-
dernes, sont formés par une série de signes, de
caractères, dont l'ensemble forme les mots,
constitue les phrases, et, sans entrer dans le
détail, je ne crois pas inutile de vous parler
rapidement de ces signes, en un mot de I'écri-

ture.

Tous, nous connaissons l'alphabet, cette série
de caractères différents de forme et de sens,
que nous apprenons dès notre enfance, et qui

nous semble si naturelle.

Avant nous, avec des proportions différentes,
avec un dessin plus ou moins semblable au
dessin actuel de nos lettres, cet alphabet, ou du
moins un alphabet à peu près identique, a été
en usage chez les Romains et chez les Grecs.
C'est par ces peuples que l'Europe a connu
l'alphabet, aussi bien les peuples qui emploient
les lettres dites latines, que ceux qui se servent
des lettres gothiques ou des caractères russes.

En cette matière, comme en beaucoup
d'autres, nous n'avons fait qu'imiter. Sans doute,
des modifications considérables ont été intro-
duites; c'est ainsi que nos caractères d'impri-
merie sont ou romains ou elzéviriens, et ne
remontent guère qu'au xvic et au xvne siècle, à
deux graveurs, français d'ailleurs : les carac-
tères romains à Jenson, les caractères elzé-
viriens à Garamond; c'est ainsi également que

les lettres italiques seraient, dit-on, la repro-
duction de l'écriture de Pétrarque, exécutée
pour Aide Manuce.

Mais, en somme, les formes sont à peu près
les mêmes; ici les déliés et les pleins ont une
différence plus accentuée qu'ailleurs, là c'est la
direction de la lettre, qui s'écarte de la verti-
cale; au fond, le contour de la lettre, son dessin,
n'a pas de modification essentielle.

C'est dans l'antiquité la plus reculée qu'il faut
aller chercher les grandes différences. Les Grecs
avaient emprunté leur alphabet aux peuples
de la Phénicie, ces grands navigateurs de l'anti-
quité, qui, dans leurs voyages, avaient été cher-
cher en Egypte la première idée de l'alpha-
bet, au moins quinze cents ans avant notre ère.
C'est à ces Phéniciens, qui firent, comme l'a dit
M. Renan, un objet d'exportation de leur alpha-
bet, que revient donc l'honneur de l'invention.

Avant eux, on écrivait avec des signes dont
chacun représentait des syllabes; les Chinois
ont conservé ce mode d'écriture; avant encore,
on a employé de véritables dessins, qui n'étaient
en somme, que la reproduction exacte de l'objet
que l'on voulait décrire, ou encore qui figuraient
un véritable rébus.

Livres égyptiens, livres grecs, bon nombre de
livres romains étaient sur papyrus ; les biblio-
thèques de Pompéi en sont la preuve encore
visible. Le parchemin n'est qu'une invention
relativement récente.

Le papyrus est vraisemblablement d'origine
égyptienne; ce fut l'Egypte le grand papetier
du monde ancien. Dans les marais créés par les
crues du Nil, poussaient des roseaux très nom-
breux, de nature particulière, dont la tige une
fois coupée peut être divisée en nombreuses
bandes. Ces bandelettes, rapprochées et entre-
croisées, collées légèrement, forment le papyrus,
matière légère, assez transparente, fragile
; d'ailleurs, sur laquelle on écrivait à l'aide d'un
roseau. Les qualités comme les formats furent
; assez nombreux; Pline l'Ancien nous en donne
î la liste.

Jusque vers le 111e siècle avant Jésus-Christ, le
! papyrus fut seul connu. A cette époque, une
J invention nouvelle vint, non pas ruiner l'industrie
du papyrus, mais lui faire une redoutable con-
currence. Ce fut en Asie Mineure, dans la région
de Pergame, alors que les rois égyptiens inter-
disaient l'exportation du précieux papyrus,
qu'un perfectionnement important fut apporté
au traitement des peaux; on eut ainsi une
nouvelle matière, plus solide, plus souple, plus
durable que le papyrus. Du nom de Pergame,
elle prit le nom de Pergatnena, dont le moyen
âge français fit pergamin, puis parchemin.

Comme le papyrus, le parchemin eut plusieurs
qualités; le plus blanc, le plus fin de grain, le
plus souple aussi, était fabriqué avec la peau de
jeunes veaux : on le nomma vélin. Quant au
format, il ne pouvait dépasser les limites de la
peau employée; le vélin est en général de
moindre taille que le parchemin ordinaire.

.g


L'ARTPOUR - TOUS

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34e Année

BULLETIN DE L'ART POUR TOUS. — N°
 
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