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Bulletin de l' art pour tous — 1904

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No 225 (Septembre 1904)
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https://doi.org/10.11588/diglit.19282#0033
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L ART-POUR -TOUS

cSèh*annuel: 24,^fr.
43e Année

ENCYCLOPEDIE DE L'ART INDUSTRIEL ET DECORA 77>

■joarai-ss a rut tous les itwhs

FONDÉ PAR ÉMILE REIBER
Directeur: Henry GUÉDY, architecte {S. K. F.) k

Librairies-Imprimeries réunies

Arvcienae Alaison /'Torc.l

Septembre 1904

LE DÉCOR D’ARCHITECTURE

AU THÉÂTRE

PHILIPPE CHAPERON, éléve de Cicéri.

Les origines de ce que nous pouvons appeler
la science perspective sont fort anciennes; il
n’est plus permis dedire aujourd’hui que le trait
perspectif date de la Renaissance Italienne et j
prit seulement naissance vers 1540 avec comme j
père présumé: Pietro Délia Francesca. j

Certes nous ne possédons pas les traités Grecs |
anciens : celui signalé des deux élèves d’Aga-
tharcus, Démocrite et Anaxagoras, celui aussi
d’Ictinos (Iktinus) l’architecte du temple de Mi-
nerve à Athènes, le Parthénon : mais ceci ne
saurait nous donner le droit de mettre en doute
la connaissance par les anciens des principales
règles de la perspective.

Le traité de l’architecte Vitruve, premiersiècle
avant J.-C., est le seul qui nous renseigne un
peu sur ce sujet. Parlant de la Scénographie il
explique que par certains tracés de lignes con-
courant en un certain point au centre du tableau ;
comme quoi l’on peut représenter non seule-
ment les façades de front, mais aussi les façades j
latérales ou en retour. Les lignes imitent alors
les rayons rectilignes sortant des yeux et enve-
loppant les objets vus. (Conception du Géomè- j
tre Grec Euclide.) Alors ce qui est peint sur
une surface plane paraît s’avancer en certains
endroits et se reculer dans d’autres.

L’on pourrait faire la remarque que le texte
de Vitruve n’est pas suffisant pour assurer
l’existence du trait perspectif, notre auteur a pu
donner trop d’importance à quelques ébauches
de lignes tracées de façon toute intuitive, etc...
Vitruve a souvent été contredit de cette manière
etcependantles rechercheseldécouverlesToules
modernes ont démontré que notre auteur latin
n’avait pas avancé certains dire à la légère. Je
ne citerai qu’un fait typique.

11 parle de la mise en peinture ou à l’encaus-
tique des murs et sculptures des temples grecs,
il donne certains détails très caractéristiques, j
ceci n’a pas empêché les modernes de formuler j
une réserve absolue.

Peut-être dans une époque de décadence, les
architectes grecs ont-ils eu recours à ces b a- j
riolages imités à l’envi par les Romains moins
raffinés sur les choses de Varchitecture, mais à
la belle époque, fi donc! la pureté des lignes
dans une réalisation monochrome devait suffire
à satisfaire le goût sûr de ce peuple si artiste}
etc... et pourtant, tout près de nous, l’archi- j
lecte Hittorf, 1830, finissait par faire admettre,
en le prouvant, que les Grecs au goût si délicat
avaient su profiter des effets colorés pour déta-
cher chaque surface, chaque moulure, chaque
sculpture en plaçant là le ton convenable pour
l’avancer ou la reculer par apparence.

Cette question des apparences n’était pas
ignorée des anciens et l’optique d’Euclide (285
avant Jésus-Christ) contient une foule de propo-
sitions et de théorèmes qui feraient fort bien en
tête d’un ouvrage, sur le trait perspectif.

Admettons, jusqu’à preuve certaine du con-
traire, le dire de Vitruve. Les principes de la
décoration théâtrale seraient dus à l’auteur grec
Eschyle. Pour l’une de ses pièces le Grec Aga-
tharcus en 428, aurait tracé sur une surface
plane une architecture peinte où était appliquée
la science des raccourcis.

Aujourd’hui il nous est permis d’aller plus loin
encore et de montrer, dans la construction
architecturale en nature, la supériorité des
Grecs de l’antiquité ; nous les voyons ne pas
craindre de transporter dans le monument réel
les artifices de la perspective relief que les mo-
dernes croient naïvement avoir inventée. Vitruve
fait allusion à ces déformations et les traduc-
teurs (Perrault 1864, puis Nisard) ont été certai-
nement embarrassés pour nous donner en fran-
çais le sens exact de ce qu’ils ne pouvaient
saisir clairement.

Dessin de Pli. Chaperon, montrant la luminosité dépendant, non
de l'intensité lumineuse, mais d'un effet de contraste.

Les remarquables relevés du Parthénon
d’Athènes ont permis à Pennelhorncet Penrose
(Anglais), à Paccard (Français) d’établir sans
conteste possible, les déformations voulues par
les architectes grecs. Ictinos a su profiler des
notions de perspective sphérique, la seule en
concordance avec l’image rétinienne, donc la
sensation visuelle (ainsi que je l’ai montré de

façon toute élémentaire (1), et il a incurvé toutes
les lignes de son édifice, pour grandir de façon
heureure l’œil ne jugeant que les apparences
des choses, les dimensions du monument qu il
a construit.

Celle pratique se retrouve dans d’autres édi-
fices contemporains ; j’ai montré reprenant
l’essai de Penrose (1851) (2), qu’en nous basant
sur la forme globulaire de l’œil il était possible
de justifier les incurvations des lignes de ces
monuments. Ces pratiques,' si opposées aux
nôtres ne sonl pas nées tout à coup; elles exis-
taient tout au moins à l’état embryonnaire en
Egypte, nous les retrouvons aussi au Cambodge
et à l’île de Java.

Dans ce mémoire j’ai pu, la chose est amu-
sante, montrer par opposition, la formidable
diminution apparente de Saint-Pierre de Rome,
due à quelques fautes de perspective relief
dans la disposition des masses architecturales
de cette église et de ses abords. 11 y a donc une
supériorité perspective à reconnaître chez les
anciens Grecs, comparés aux architectes de la
Renaissance Italienne, soi-disant seuls inven-
teurs du trait perspectif.

Ainsi les Grecs ne craignaient pas, ce que
nous n’oserions pas faire aujourd’hui, d’appli-
quer les raccourcis de la perspective relief aux
constructions en nature. Toutefois cette science
spéciale n’est pas ignorée des modernes et nous
trouvons son application dans la décoration
théâtrale. L’artiste fait pour la scène, sur feuil-
lets plans et sur accessoires rustiques ce que
l’architecte de l’antiquité faisait en nature; ce
sont les mêmes procédés, par l’emploi des rac-
courcis des lignes; ils grandissent tous deux, de
façon très heureuse, leurs créations.

2. — L’architecture scénique a recours aux
tracés de la perspective relief, elle imite donc
la pratique des anciens avec cette différence,
toutefois :

Tandis que l’architecte grec déformait les
masses et les profils de la construction, incur-
vait les droites horizontales, verticales ou
obliques à l’effet d’obtenir un grandissement
convenable, le décorateur moderne cherche à
obtenir le même résultat par des déformations
analogues peintes sur une série de plans ou
feuillets de décoration, répartis d’une façon sou-
vent imposée, sur le sol du théâtre.

Il y a, sauf de très rares exceptions, nécessité
pour lui de peindre tout sur des surfaces planes :
non seulement le grand décor, mais encore les
meubles et les accessoires. Tous les éléments
d’une décoration scénique doivent se replier les
uns sur les autres, à la façon des feuilles d’un
paravent, ce qui permettra les changements à
vue, les transports et le magasinage.

(1) Manuel du Dessinateur. Causeries sur le dessin
industriel (1894).

(2) Mémoire sur l'Étude de la Vision pour la sensation
de la forme, du relief, du mouvement et de la coulçur ( 1897).

BULLETIN DE L’ART POUR TOUS. — N” 225.
 
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