Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

La chronique des arts et de la curiosité — 1885

DOI issue:
Nr. 39 (12 Décembre)
DOI Page / Citation link: 
https://doi.org/10.11588/diglit.18474#0317
Overview
loading ...
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
ET DE LA CURIOSITE 307

Aujourd'hui, nous nous y trouvons en présence
d'une véritable renaissance des industries artisti-
ques, renaissance qui, demain, s'épanouira. Par-
tout il s'est élevé des usines, des ateliers dont les
produits aliuienlent abondamment la consomma-
tion intérieure et commencent même à s'exporter
lointainement, des écoles qui fourniront des maî-
tres et des ouvriers habiles. L'Amérique du Nord a
fermé sa frontière économique; l'Allemagne l'en-
tre-bâille; la Russie menace de la murer. La con-
currence étrangère, favorisée par des conditions
sociales exceptionnelles, modifie nos marchés, nous
écrase sur les places extérieures et nous fait en
tous lieux une guerre impitoyable. C'est là une ré-
volution générale, qui, en bouleversant notre si-
tuation commerciale, nous impose impérieusement
l'urgence de modifier radicalement nos mœurs et
notre outillage industriels. Ii est une supériorité
qui nous reste, supériorité réelle, incontestée, celle
de l'art. En dépit de toutes les tentatives faites à
l'étranger, nos œuvres restent encore les plus bel-
les, les plus originales. La grâce, J'élégance dans
les formes, l'éclat et la délicatesse dans le coloris,
le goût dans J'ensemble, les distinguent brillam-
ment de tous les produits des industries concur-
rentes. Mais cette supériorité artistique ne consti-
tuerait point une source de prospérité et de ri-
chesse nationales si nous n'adaptons pas notre
génie à l'état nouveau delà société contemporaine.
L'art doit descendre de son piédestal élevé et se
mêler à la foule. Se démocratiser n'est point dé-
choir, et quand, des conceptions sublimes d'un
idéal de l'antiquité ou de la Renaissance, un artiste
passera à l'étude pratique d'une œuvre industrielle
destinée à alimenter une branche du commerce na-
tional, à nourrir cent ouvriers, il n'aura point ré-
trogradé dans sa carrière honorable et diminué
son nom. Les produits de notre art industriel sont
beaux, mais ils sont trop chers. L'Allemagne s'en-
richit et nous ruine à les contrefaire habilement
et à les vendre très bon marché. Le problème à ré-
soudre, qui n'est certainement point insoluble,
consiste à imiter son système. Sinon, c'est la déca-
dence de plus en plus rapide de notre industrie
et la misère complète de nos ouvriers.

L'ART ET L'ARCHÉOLOGIE AU THÉÂTRE

L'Ode'o n a monté fort convenablement le
Jacobiies, de M. F. Coppée, dont MM. Rube'
Chaperon et Jambon, ainsi que M. Lemonnier,
ont peint les de'cors. Ceux-ci encadrent
discrètement l'action à laquelle ils se su-
bordonnent, tandis que M. Lacoste a dessiné
des costumes de coloration très sobre, dont
sont habillés les personnages.

Les higlanders étaient-ils encore armés de
claymores au xvin6 siècle, portaient-ils encore
le bouclier ? Cela est douteux, si cela estpit
toresque.

Rodrigue de Bivar, dit le Cid Campeador,
mourut, dit-on, en 1099.

En voyant le rideau se lever sur l'architec-
ture étrange du premier tableau du Cid, à l'O-
péra, nous avons cru qu'on allait y essayer une

reconstitution, fort problématique d'ailleurs,
de l'Espagne au xi6 siècle.

Ce décor, de M. Carpezat. représente une
fenêtre, encadrée de lourds pilastres de pierre
qui ont pour chapiteaux des guirlandes super-
posées, lesquelles se retrouvent sur la clef
du linteau de la fenêtre. Ceci est invention
pure, ce nous semble, et ne procède en rien
ni de l'architecture romaine dégénérée, ni de
l'architecture arabe ou mauresque. Mais c'est
une tentative.

Lorsqu'au second tableau, du même artiste,
nous avons vu un cloître, du xme siècle par
les chapiteaux des colonnes qui en supportent
les arcades, bien que celles-ci ne dessinent pas
des ogives bien caractérisées, nous avons été
entièrement dérouté. D'autant plus que la
statue de saint Georges, de Donatello, qui est
ici un saint Jacques, se dresse contre un pilier.
Mais qu'apercevons-nous, en outre, à travers
les arcades du cloître, au delà du jardin où
va se promener Chimène ? Une ville italienne
bâtie en briques, comme Sienne ou Pérouse,
sinon d'aujourd'hui, du moins du xvme siècle:
car sur la corniche de ses églises cubiques se
dressent des campaniles plats, accotés de
consoles, qui n'apparaissent guère qu'à la fin
du xvie siècle.

Nous ne nous arrêterons pas à faire obser-
ver ce qu'il y a d'insolite à terminer par le
portail d'une église la galerie d'un cloître.
En tout cas, ce décor est fort beau, et d'une
perspective très profonde, grâce à la planta-
tion, à des plans successifs, demurettes basses
entre le cloître et la toile du fond.

La rue de Burgos, où se passe le duel entre
don Gomar et Rodrigue, la nuit, est d'un pit-
toresque assez sinistre, mais d'un xie siècle
fort douteux.

Que de choses et de constructions compli-
quées MM. Robecchi et Amable ont distri-
buées autour de la place de Burgos, où va se
danser le ballet! Et quelle lumière partout.
Cela papillotte aux yeux presque autant que
les personnages qui l'animent.

A gauche, un grand arc, formant porche
d'une église, que traverse une poutre où est
suspendue une bannière. Au delà, la courtine
crénelée des murs,avacle5 escaliers du chemin
de ronde. Au delà, encore, une porte de la
ville surmontée d'une plate-forme sur laquelle
s'élève une sorte de lopgia, et percée d'un arc
praticable, avec une échappée sur la plaine.
En arrière, un massif de maisons formant coin,
entre la place et une rue qui monte sous des
arcs-boutants qui vont d'une maison à l'autre et,
tout au fond, sur une éminence, la cathédrale
de Burgos, telle qu'elle est aujourd'hui, avec
ses deux flèches du xiv6 siècle, sa tour cen-
trale du xve et les hauts combles de la cha-
pelle du connétable, qui estpresque du xvi6.
A droite, des maisons, des terrasses, des ver-
dures et un praticable amorçant la rue qui
monte au fond. De quoi meubler une demi-
douzaine de places publiques. C'est fort ingé-
nieux, mais fourmillant de détails qui nuisent
à l'ensemble.

A ce trop brillant décor succède une scène
de nuit dans une jûèce de l'appartement de
Chimène. Une cheminée à haut manteau ar-
 
Annotationen