lia
MÉLANGES D'ARCHÉOLOGIE.
du chapiteau. Si ie serpent à deux têtes dévore i'épauie deia femme auiieude son sein, comme
dans un grand nombre d'autres monuments, cette variante est suffisamment motivée par ie
défaut d'espace; mais ie serpent à deux têtes n'en est pas moins de ia famiiie de tous ces ser-
pents qui se tordent entant de manières autour des membres nus de femmes aviiies, à
Montmoriiion, à La Charité-sur-Loire, à Yezelai, à Chartres, etc. Et queis sont tous ces ser-
pents, si ce n'est i'image de celui qui a séduit ia première femme et qui continue de séduire
tant de fiiies d'Eve? qui les désole par ses tortures après les avoir trompées par ses séductions?
Ver rongeur qui ne meurt pas pour que le châtiment dure autant que la flétrissure. Quant
au geste de l'homme, nous aurons ailleurs l'occasion d'établir qu'il rend d'une autre manière
l'idée des mêmes souillures: la barbe des idoles gnostiques peut mettre sur la voie du vrai
sens.
En opposition avec ce chapiteau, le pilier représente donc la vertu, la vertu, qui pour les
peuples simples s'offre surtout sous les traits de la force : elle emprunte ici ceux de Sigurd,
comme elle prend ailleurs ceux de Samson ou de David. On se demande comment des
chrétiens ont pu représenter dans un lieu aussi saint des fables toutes païennes. Je deman-
derai à mon tour s'il est certain que ces fables aient eu, dans la pensée de l'artiste et du
peuple, un caractère païen ; et, de ce que le sujet de la sculpture est pris en bonne part, je
conclurais au contraire que le vieux mythe, en passant à travers les siècles et les imagina-
tions chrétiennes, s'est modifié sous leur influence, et que le Sigurd ou le Siegfried de la
crypte est un guerrier chrétien. Au reste il y a ici plus qu'une présomption, plus qu'une
probabilité, puisque dans l'Hürnin Siegfried (composition du quinzième siècle, mais incon-
testablement formée d'éléments anciens) le victorieux fils d'Odin est devenu tout simplement
unpreux chevalier de Franconie, défenseur invinciblede l'innocence opprimée', et la Yalkyrie
du Yalhalla une fille du roi bourguignon Cibich de Worms, enlevée par un infâme géant
transformé en dragon. Criemhild, c'est ie nom de la vierge, transportée sur un roc inacces-
sible comme un château de Burgrave, invoque notre Dame par de naïves prières, et Siegfried
en face d'une mort presque inévitable, sans trembler plus que les héros païens, met hum-
blement tout son espoir dans le secours de Dieu. Ajoutez que, d'après les mêmes traditions,
si le dragon est condamné à vivre sous une forme odieuse, c'est à cause de sa lubricité ; et si
le chevalier chrétien frappe ses terribles coups, c'est pour sauver l'honneur d'une vierge ; de
' Aussi ie nom de Sicgfrid ctait-ii en grand honneur. On en (ffaâa sacra, t. V., n. 12A8J Singifred, Sigeard et Sigheard.
trouve bon nombre dans ies documents dipiomatiques rc- On a pu remarquer (p. 7A) que sous l'évêque Vaido i! y avait
cueiiiis par Meikeibeck dans son Hùfoâ-c r/c àFrisingue un prêtredequeique renom appeiéSigefrid. Notre
c'est $:7dAar?,, piiier ne serait-ii pas de son temps, peut-être son ouvrage et
Nfyf/n/o -Sf/a'/râ/, .Sàjrc/iayv, Nep/Wt/. On reconnaît sa signature pariante. Nui n'ignore ies faits anaiogues de i'art
aisément ie même nom sous ces variantes : ainsi ie chance- grec.
Hcr de Henri. IV qui signe Sigefrid est appeié dans Ugheiii
MÉLANGES D'ARCHÉOLOGIE.
du chapiteau. Si ie serpent à deux têtes dévore i'épauie deia femme auiieude son sein, comme
dans un grand nombre d'autres monuments, cette variante est suffisamment motivée par ie
défaut d'espace; mais ie serpent à deux têtes n'en est pas moins de ia famiiie de tous ces ser-
pents qui se tordent entant de manières autour des membres nus de femmes aviiies, à
Montmoriiion, à La Charité-sur-Loire, à Yezelai, à Chartres, etc. Et queis sont tous ces ser-
pents, si ce n'est i'image de celui qui a séduit ia première femme et qui continue de séduire
tant de fiiies d'Eve? qui les désole par ses tortures après les avoir trompées par ses séductions?
Ver rongeur qui ne meurt pas pour que le châtiment dure autant que la flétrissure. Quant
au geste de l'homme, nous aurons ailleurs l'occasion d'établir qu'il rend d'une autre manière
l'idée des mêmes souillures: la barbe des idoles gnostiques peut mettre sur la voie du vrai
sens.
En opposition avec ce chapiteau, le pilier représente donc la vertu, la vertu, qui pour les
peuples simples s'offre surtout sous les traits de la force : elle emprunte ici ceux de Sigurd,
comme elle prend ailleurs ceux de Samson ou de David. On se demande comment des
chrétiens ont pu représenter dans un lieu aussi saint des fables toutes païennes. Je deman-
derai à mon tour s'il est certain que ces fables aient eu, dans la pensée de l'artiste et du
peuple, un caractère païen ; et, de ce que le sujet de la sculpture est pris en bonne part, je
conclurais au contraire que le vieux mythe, en passant à travers les siècles et les imagina-
tions chrétiennes, s'est modifié sous leur influence, et que le Sigurd ou le Siegfried de la
crypte est un guerrier chrétien. Au reste il y a ici plus qu'une présomption, plus qu'une
probabilité, puisque dans l'Hürnin Siegfried (composition du quinzième siècle, mais incon-
testablement formée d'éléments anciens) le victorieux fils d'Odin est devenu tout simplement
unpreux chevalier de Franconie, défenseur invinciblede l'innocence opprimée', et la Yalkyrie
du Yalhalla une fille du roi bourguignon Cibich de Worms, enlevée par un infâme géant
transformé en dragon. Criemhild, c'est ie nom de la vierge, transportée sur un roc inacces-
sible comme un château de Burgrave, invoque notre Dame par de naïves prières, et Siegfried
en face d'une mort presque inévitable, sans trembler plus que les héros païens, met hum-
blement tout son espoir dans le secours de Dieu. Ajoutez que, d'après les mêmes traditions,
si le dragon est condamné à vivre sous une forme odieuse, c'est à cause de sa lubricité ; et si
le chevalier chrétien frappe ses terribles coups, c'est pour sauver l'honneur d'une vierge ; de
' Aussi ie nom de Sicgfrid ctait-ii en grand honneur. On en (ffaâa sacra, t. V., n. 12A8J Singifred, Sigeard et Sigheard.
trouve bon nombre dans ies documents dipiomatiques rc- On a pu remarquer (p. 7A) que sous l'évêque Vaido i! y avait
cueiiiis par Meikeibeck dans son Hùfoâ-c r/c àFrisingue un prêtredequeique renom appeiéSigefrid. Notre
c'est $:7dAar?,, piiier ne serait-ii pas de son temps, peut-être son ouvrage et
Nfyf/n/o -Sf/a'/râ/, .Sàjrc/iayv, Nep/Wt/. On reconnaît sa signature pariante. Nui n'ignore ies faits anaiogues de i'art
aisément ie même nom sous ces variantes : ainsi ie chance- grec.
Hcr de Henri. IV qui signe Sigefrid est appeié dans Ugheiii