LE CHARIVARI
Les affamés de la monarchie sont là autour de
l’écuelle. Attention !
Et surtout que pas un ne plonge la cuillère en
dehors de son tour.
A toi, là-bas, l’orléanisme !
A toi, maintenant, le droit divin !
A toi, ensuite, l’impérialisme !
A toi enfin, la réaction sans drapeau !
Et les regards de s’entre-surveiller avec une
anxieuse jalousie.
Cette attitude nous charme, car elle atteste que la
République n’a rien, à craindre.
Plus que jamais, par leurs défiances réciproques,
ses adversaires se neutralisent.
Il leur faut des mois d’élaboration pour arriver à
régler les détails d’une élection sénatoriale.
Comme on sent qu’ils se prendraient aux cheveux
s’il s’agissait de s'attabler définitivement pour man-
ger la France !
Continuez, chers monarchistes, continuez !
Les républicains ont d’autant moins envie de vous
contester le droit à la cuillerée... que vos cuillères
ne sont remplies que d’eau claire.
Paul Girard.
LE FAUTEUIL DE M. THIERS
En avant, les compétitions académiques 1
Déjà l’on met en avant divers noms pour le fau-
teuil de M. Thiers.
D’abord M. d’Audiffret-Pasquier, qui a l’air de
vouloir tourner au candidat perpétuel.
Inutile d’insister sur ce Bertron de l’immortalité.
C’est pour rire.
Ensuite vient M. Paul Féval, le néo-clérical.
Evidemment, si M. Paul Féval n’avait pas opéré
la conversion que l’on sait, nul n’aurait jamais
songé à voir en lui un académicien possible.
Ceux surtout qui demandent qu’on le bombarde
aujourd’hui, auraient naguère protesté avec viru-
lence contre le choix d’un feuilletoniste, ce genre
de littérature étant considéré, dans ce monde-là,
comme œuvre de démoralisation et de décadence.
M. Féval offrirait donc cette particularité d’être
élu, non pas pour, mais malgré ses livres.
Nous doutons qu’il soit soucieux d’un honneur
si fâcheusement motivé.
M. Féval, tout aux choses du ciel, doit être désor-
mais inaccessible aux vaines ambitions terrestres.
Si l’on veut voir en lui un nouveau saint Paul, il
ne faut pas l’académiser, il faut le canoniser.
Les nouvellistes mettent aussi en avant deux
noms qui ont plus de chances de réunir la ma-
jorité.
Ce sont les noms de MM. Henri Martin et Eugène
Pelletan.
Mais voici qui coupera court à toutes les ru-
meurs.
Les académiciens pressentis ont déclaré que
leur intention était d’ajourner à un an la succession
de M. Thiers, l’illustre homme d’Etat n’étant pas
de ceux dont on se hâte d’eflacer le souvenir et de
prendre la place.
Cet hommage si légitime pourra décontenancer
certaines ambitions, mais il honorera l’Académie,
qui a tant à se faire pardonner.
E. Villiers.
•--
LA CHASSE AUX CANARDS
Qu’adviendra-t-il de tout cela?
Chacun se livre aux suppositions les plus étran-
ges, je dirai même les plus grotesques.
Autant de personnes que l’on rencontre, autant
d’opinions diverses.
Aussi, à la fin de la journée, on rentre chez soi
très-souffrant. On ale cerveau fatigué et les nerfs
surexcités.
Je connais plus de dix ménages qui sont en froid
à cause de la politique.
La femme est aimable, mais le mari agacé répond
par des mots violents.
La querelle dégénère souvent en menacés, et la
vaisselle est brisée.
Si la crise continue encore quelques semaines,
les marchands de porcelaine feront fortune.
Messieurs les nouvellistes à sensation, vous serez
cause de bien des maux.
Les bruits qu’ils font courir sont certes faits pour
troubler les esprits les mieux organisés.
— Mon cher, dit celui-ci, vous savez que j’ai une
bonne dont le cousin est le mari du frère d’un valet
de chambre du président de la République.
— Eh bien?
— Je puis donc mieux que personne être au cou-
rant de ce qui se passe à l’Elysée.
— Vers quelle combinaison marchons-nous?
— Le maréchal demandera la dissolution au Sé-
nat.
— Il croit donc pouvoir compter encore une fois
sur la majorité?
— Il a fait venir chaque sénateur de la droite, et
il a fait jurer à chacun de voter la dissolution si elle
était de nouveau demandée.
— Mais si le pays renvoie les mêmes députés ?
— On dissoudra tous les trois mois jusqu’en
1880.
— Et le budget ?
— Les trois millions de conservateurs s’engage-
ront par devant notaire à fournir les fonds néces-
saires pour faire face aux dépenses ; ils recevront,
en échange, des bons du Trésor, payables en 1880,
après la révision de la Constitution.
— Et les ministres ?
— Ils resteront jusqu’en 1880 ; ce n’esLqu’à cette
condition que les conservateurs prêteront de l’ar-
gent au gouvernement.
— Cher monsieur, il faut que je vous fasse part
d’un secret; vous ne le communiquerez à aucun
reporter?
— Je n’en connais pas.
— Depuis trois semaines le duc de Magenta n’est
plus président de la République.
— Qui donc gouverne à sa place ?
— Le comte de Chambord; tous les matins, à huit
heures, il arrive à l’Elysée, s’installe devant son
bureau et y reste jusqu’à minuit pour travailler
avec ses ministres,
— Comment !... MM. de Fourtou et Brunet sont
les dévoués serviteurs du comte de Chambord?
— Mais ce ne sont plus eux. M. Baragnon (Numa)
a été chargé, après le 14 octobre, de former un mi-
nistère,
— Et l'Officiel n’en a point parlé?
— Non.
— Quel sournois!
— 11 a gardé le silence le plus absolu, afin de ne
pas émouvoir les populations.
— Et le comte de Chambord conserve sur l’Elysée
le drapeau tricolore?
— Il en a un blanc dans le salon.
— Et quand Henri V se fera-t-il proclamer roi?
— Au moment où la France s’y attendra le
moins. Surtout pas un mot de tout cela, car la
moindre indiscrétion pourrait m’attirer des désa-
gréments et me fâcher avec la famille de ma
femme, qui...
— Ne me dites pas un mot de plus, car cela
pourrait me donner envie de parler.
— Ahl cher ami, comme je suis heureux!
— Vons venez de faire un héritage?
— Non, mais je connais la solution.
— ... Selon la formule, pour donner un remède à
votre femme qui est si souffrante.
— Il ne s’agit pas de ma femme, mais de la
France.
— Expliquez-vous.
— Vous savez que le général Grant est à Paris?
— Oui, tous les journaux ont annoncé son ar-
rivée.
— Mais savez-vous pourquoi il est dans nos
murs?
■ - Afin de visiter la capitale.
— Quelle erreur!... C’est le maréchal qui l’a fait
venir, cet ex-président des Etats-Unis , afin de lui
confier la présidence de la République française.
— Pas possible!...
— Je vous l’affirme. Le maréchal, très-ennuyé de
tout ce qui se passe, veut se retirer ; mais pour
contrarier les républicains qui ont arrêté leur
choix sur M. Grévy, il tient à se démettre en fa-
veur du général Gi ant.
Adrien Huart.
♦
CHRONIQUE DU JOUR
C’était vendredi le jour des Morts, et les ministres
n ont pas donné leur démission.
Les amis de ces messieurs auraient profité de cette
occasion pour porter des couronnes sur le tombeau du
cabinet du 16 mai.
En attendant, le ministère a l’agonie prend ses dis-
positions testamentaires.
Il donne des places très-avantageuses à tous ses ne-
veux, oncles ou cousins.
L'Officiel est bourré chaque jour de ces nominations
in extremis.
Les malheureux préfets, eux seuls, sont destinés à
être sacrifiés.
Un ministre n’ose pas, en effet, nommer receveur
général un préfet en activité, il faut que ce fonction-
naire reste sur la brèche jusqu'au bout.
Il peut bombarder ses préfets officiers et comman-
deurs de la Légion d’honneur, mais voilà tout.
Quelques-uns préféreraient un bon bureau de tabac.
Je suis certain que le roi de Hollande voudrait bien
que ses sujets proclamassent la République.
Ce monarque filerait comme un fromage avancé, et
viendrait s’établir en France pour y vivre en simple
rentier avec sa femme.
Le roi de Hollande, en effet, se marie. Il épouse une
actrice, et le grand conseil du royaume veut que
l’épouse habite Paris.
Mais ce souverain est habitué à ces voyages fatigants.
Il y a quelques années il connaissait une dame fran-
çaise qu’il rencontrait à Genève.
Voilà un roi qui a toujours mené la vie d’un chef de
train.
On demandait l’autre jour au général Grant ce qui
l’étonnait le plus en France.
_ Parbleu!.., répondit-il, c’est de voir une Républi-
que gouvernée par des monarchistes.
Galino causait politique.
— MM. Buffet, de Broglie et de Fourtou, lui disait-on,
se sont compromis en taisant de la mauvaise politique,
ils ne pourront plus revenir au pouvoir.
A leur place, répondit Calino, je changerais de
nom, et comme ce sont des hommes de talent, iis pour-
raient un jour rentrer dans de nouvelles combinaisons
ministérielles.
Les bruits que l’on a fait courir au sujet de l’Expo-
sition universelle ont jeté le trouble, non seulement
chez les industriels, mais aussi dans l’esprit de M11» Clara,
Cette petite dame du quartier Maubeuge a écrit au
commissaire général de l’Exposition universelle :
Monsieur,
Veuillez me faire savoir si l’Exposition aura décidé-
ment lieu en 1878, parce que je suis avec un vieux qui
m’ennuie et que je me propose de congédier à la fin
de l’année.
Mais si l’Exposition était reculée, je patienterais en-
core pour attendre l’arrivée des étrangers.
Que M110 Clara se rassure, l’Exposition ouvrira le
1er mai 1878.
Les rédacteurs des menus quotidiens ont un style
très-bizarre.
Ils adressent les mots les plus aimables au gibier
quand il n'est pas cher; mais aussitôt qu’il atteint des
prix élevés, ils ne lui ménagent pas les expressions les
plus dures. " .....
Si, un jour, uu perdreau susceptible et un lieyre
rageur allaient envoyer leurs témoins a ces écrivains
peu révérencieux ?
Sur la liste des souscriptions organisées parle comité
républicain, on lit :
Bazaine. ^ francs.
Est-ce l’ex-maréchal qui se convertit à la foi républi-
caine ?
Dans notre intérêt, nous espérons qu’il n’en est rien.
Brébant vient de recommencer à donner gratis, tous
les matins, des soupes aux indigents du neuvième
arrondissement.
Maintenant, quand un gommeux, en sortant de chez
Brébant avec une cocotte, est rencontré par un oncle
rageur qui fait des observations au jeune homme :
— Mon oncle, dit celui-ci, ne me gronde pas.
— Cependant lu sors avec cette dame de ce restau-
rant.
— C’est vrai, mon cher oncle, mais nous venons de
nous faire inscrire pour avoir une soupe demain ma-
tin.
Chez des bourgeois. *
— Mou ami, est-ce que tu ne sors pas aujourd hui ?
— Non.
— Il fait pourtant une belle journée. Serais - tu ma
lade?
Les affamés de la monarchie sont là autour de
l’écuelle. Attention !
Et surtout que pas un ne plonge la cuillère en
dehors de son tour.
A toi, là-bas, l’orléanisme !
A toi, maintenant, le droit divin !
A toi, ensuite, l’impérialisme !
A toi enfin, la réaction sans drapeau !
Et les regards de s’entre-surveiller avec une
anxieuse jalousie.
Cette attitude nous charme, car elle atteste que la
République n’a rien, à craindre.
Plus que jamais, par leurs défiances réciproques,
ses adversaires se neutralisent.
Il leur faut des mois d’élaboration pour arriver à
régler les détails d’une élection sénatoriale.
Comme on sent qu’ils se prendraient aux cheveux
s’il s’agissait de s'attabler définitivement pour man-
ger la France !
Continuez, chers monarchistes, continuez !
Les républicains ont d’autant moins envie de vous
contester le droit à la cuillerée... que vos cuillères
ne sont remplies que d’eau claire.
Paul Girard.
LE FAUTEUIL DE M. THIERS
En avant, les compétitions académiques 1
Déjà l’on met en avant divers noms pour le fau-
teuil de M. Thiers.
D’abord M. d’Audiffret-Pasquier, qui a l’air de
vouloir tourner au candidat perpétuel.
Inutile d’insister sur ce Bertron de l’immortalité.
C’est pour rire.
Ensuite vient M. Paul Féval, le néo-clérical.
Evidemment, si M. Paul Féval n’avait pas opéré
la conversion que l’on sait, nul n’aurait jamais
songé à voir en lui un académicien possible.
Ceux surtout qui demandent qu’on le bombarde
aujourd’hui, auraient naguère protesté avec viru-
lence contre le choix d’un feuilletoniste, ce genre
de littérature étant considéré, dans ce monde-là,
comme œuvre de démoralisation et de décadence.
M. Féval offrirait donc cette particularité d’être
élu, non pas pour, mais malgré ses livres.
Nous doutons qu’il soit soucieux d’un honneur
si fâcheusement motivé.
M. Féval, tout aux choses du ciel, doit être désor-
mais inaccessible aux vaines ambitions terrestres.
Si l’on veut voir en lui un nouveau saint Paul, il
ne faut pas l’académiser, il faut le canoniser.
Les nouvellistes mettent aussi en avant deux
noms qui ont plus de chances de réunir la ma-
jorité.
Ce sont les noms de MM. Henri Martin et Eugène
Pelletan.
Mais voici qui coupera court à toutes les ru-
meurs.
Les académiciens pressentis ont déclaré que
leur intention était d’ajourner à un an la succession
de M. Thiers, l’illustre homme d’Etat n’étant pas
de ceux dont on se hâte d’eflacer le souvenir et de
prendre la place.
Cet hommage si légitime pourra décontenancer
certaines ambitions, mais il honorera l’Académie,
qui a tant à se faire pardonner.
E. Villiers.
•--
LA CHASSE AUX CANARDS
Qu’adviendra-t-il de tout cela?
Chacun se livre aux suppositions les plus étran-
ges, je dirai même les plus grotesques.
Autant de personnes que l’on rencontre, autant
d’opinions diverses.
Aussi, à la fin de la journée, on rentre chez soi
très-souffrant. On ale cerveau fatigué et les nerfs
surexcités.
Je connais plus de dix ménages qui sont en froid
à cause de la politique.
La femme est aimable, mais le mari agacé répond
par des mots violents.
La querelle dégénère souvent en menacés, et la
vaisselle est brisée.
Si la crise continue encore quelques semaines,
les marchands de porcelaine feront fortune.
Messieurs les nouvellistes à sensation, vous serez
cause de bien des maux.
Les bruits qu’ils font courir sont certes faits pour
troubler les esprits les mieux organisés.
— Mon cher, dit celui-ci, vous savez que j’ai une
bonne dont le cousin est le mari du frère d’un valet
de chambre du président de la République.
— Eh bien?
— Je puis donc mieux que personne être au cou-
rant de ce qui se passe à l’Elysée.
— Vers quelle combinaison marchons-nous?
— Le maréchal demandera la dissolution au Sé-
nat.
— Il croit donc pouvoir compter encore une fois
sur la majorité?
— Il a fait venir chaque sénateur de la droite, et
il a fait jurer à chacun de voter la dissolution si elle
était de nouveau demandée.
— Mais si le pays renvoie les mêmes députés ?
— On dissoudra tous les trois mois jusqu’en
1880.
— Et le budget ?
— Les trois millions de conservateurs s’engage-
ront par devant notaire à fournir les fonds néces-
saires pour faire face aux dépenses ; ils recevront,
en échange, des bons du Trésor, payables en 1880,
après la révision de la Constitution.
— Et les ministres ?
— Ils resteront jusqu’en 1880 ; ce n’esLqu’à cette
condition que les conservateurs prêteront de l’ar-
gent au gouvernement.
— Cher monsieur, il faut que je vous fasse part
d’un secret; vous ne le communiquerez à aucun
reporter?
— Je n’en connais pas.
— Depuis trois semaines le duc de Magenta n’est
plus président de la République.
— Qui donc gouverne à sa place ?
— Le comte de Chambord; tous les matins, à huit
heures, il arrive à l’Elysée, s’installe devant son
bureau et y reste jusqu’à minuit pour travailler
avec ses ministres,
— Comment !... MM. de Fourtou et Brunet sont
les dévoués serviteurs du comte de Chambord?
— Mais ce ne sont plus eux. M. Baragnon (Numa)
a été chargé, après le 14 octobre, de former un mi-
nistère,
— Et l'Officiel n’en a point parlé?
— Non.
— Quel sournois!
— 11 a gardé le silence le plus absolu, afin de ne
pas émouvoir les populations.
— Et le comte de Chambord conserve sur l’Elysée
le drapeau tricolore?
— Il en a un blanc dans le salon.
— Et quand Henri V se fera-t-il proclamer roi?
— Au moment où la France s’y attendra le
moins. Surtout pas un mot de tout cela, car la
moindre indiscrétion pourrait m’attirer des désa-
gréments et me fâcher avec la famille de ma
femme, qui...
— Ne me dites pas un mot de plus, car cela
pourrait me donner envie de parler.
— Ahl cher ami, comme je suis heureux!
— Vons venez de faire un héritage?
— Non, mais je connais la solution.
— ... Selon la formule, pour donner un remède à
votre femme qui est si souffrante.
— Il ne s’agit pas de ma femme, mais de la
France.
— Expliquez-vous.
— Vous savez que le général Grant est à Paris?
— Oui, tous les journaux ont annoncé son ar-
rivée.
— Mais savez-vous pourquoi il est dans nos
murs?
■ - Afin de visiter la capitale.
— Quelle erreur!... C’est le maréchal qui l’a fait
venir, cet ex-président des Etats-Unis , afin de lui
confier la présidence de la République française.
— Pas possible!...
— Je vous l’affirme. Le maréchal, très-ennuyé de
tout ce qui se passe, veut se retirer ; mais pour
contrarier les républicains qui ont arrêté leur
choix sur M. Grévy, il tient à se démettre en fa-
veur du général Gi ant.
Adrien Huart.
♦
CHRONIQUE DU JOUR
C’était vendredi le jour des Morts, et les ministres
n ont pas donné leur démission.
Les amis de ces messieurs auraient profité de cette
occasion pour porter des couronnes sur le tombeau du
cabinet du 16 mai.
En attendant, le ministère a l’agonie prend ses dis-
positions testamentaires.
Il donne des places très-avantageuses à tous ses ne-
veux, oncles ou cousins.
L'Officiel est bourré chaque jour de ces nominations
in extremis.
Les malheureux préfets, eux seuls, sont destinés à
être sacrifiés.
Un ministre n’ose pas, en effet, nommer receveur
général un préfet en activité, il faut que ce fonction-
naire reste sur la brèche jusqu'au bout.
Il peut bombarder ses préfets officiers et comman-
deurs de la Légion d’honneur, mais voilà tout.
Quelques-uns préféreraient un bon bureau de tabac.
Je suis certain que le roi de Hollande voudrait bien
que ses sujets proclamassent la République.
Ce monarque filerait comme un fromage avancé, et
viendrait s’établir en France pour y vivre en simple
rentier avec sa femme.
Le roi de Hollande, en effet, se marie. Il épouse une
actrice, et le grand conseil du royaume veut que
l’épouse habite Paris.
Mais ce souverain est habitué à ces voyages fatigants.
Il y a quelques années il connaissait une dame fran-
çaise qu’il rencontrait à Genève.
Voilà un roi qui a toujours mené la vie d’un chef de
train.
On demandait l’autre jour au général Grant ce qui
l’étonnait le plus en France.
_ Parbleu!.., répondit-il, c’est de voir une Républi-
que gouvernée par des monarchistes.
Galino causait politique.
— MM. Buffet, de Broglie et de Fourtou, lui disait-on,
se sont compromis en taisant de la mauvaise politique,
ils ne pourront plus revenir au pouvoir.
A leur place, répondit Calino, je changerais de
nom, et comme ce sont des hommes de talent, iis pour-
raient un jour rentrer dans de nouvelles combinaisons
ministérielles.
Les bruits que l’on a fait courir au sujet de l’Expo-
sition universelle ont jeté le trouble, non seulement
chez les industriels, mais aussi dans l’esprit de M11» Clara,
Cette petite dame du quartier Maubeuge a écrit au
commissaire général de l’Exposition universelle :
Monsieur,
Veuillez me faire savoir si l’Exposition aura décidé-
ment lieu en 1878, parce que je suis avec un vieux qui
m’ennuie et que je me propose de congédier à la fin
de l’année.
Mais si l’Exposition était reculée, je patienterais en-
core pour attendre l’arrivée des étrangers.
Que M110 Clara se rassure, l’Exposition ouvrira le
1er mai 1878.
Les rédacteurs des menus quotidiens ont un style
très-bizarre.
Ils adressent les mots les plus aimables au gibier
quand il n'est pas cher; mais aussitôt qu’il atteint des
prix élevés, ils ne lui ménagent pas les expressions les
plus dures. " .....
Si, un jour, uu perdreau susceptible et un lieyre
rageur allaient envoyer leurs témoins a ces écrivains
peu révérencieux ?
Sur la liste des souscriptions organisées parle comité
républicain, on lit :
Bazaine. ^ francs.
Est-ce l’ex-maréchal qui se convertit à la foi républi-
caine ?
Dans notre intérêt, nous espérons qu’il n’en est rien.
Brébant vient de recommencer à donner gratis, tous
les matins, des soupes aux indigents du neuvième
arrondissement.
Maintenant, quand un gommeux, en sortant de chez
Brébant avec une cocotte, est rencontré par un oncle
rageur qui fait des observations au jeune homme :
— Mon oncle, dit celui-ci, ne me gronde pas.
— Cependant lu sors avec cette dame de ce restau-
rant.
— C’est vrai, mon cher oncle, mais nous venons de
nous faire inscrire pour avoir une soupe demain ma-
tin.
Chez des bourgeois. *
— Mou ami, est-ce que tu ne sors pas aujourd hui ?
— Non.
— Il fait pourtant une belle journée. Serais - tu ma
lade?