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Boespflug, François; Załuska, Yolanta: Le Prologue de l'Évangile selon saint Jean dans l'art médiéval (IX-XII siecle): L'image comme "commentaire"
DOI Seite / Zitierlink: https://doi.org/10.11588/diglit.20620#0046
L’initiale I du Prologue de Jean dans la Bibie de
1’abbaye benedictine Saint-Benigne de Dijon, vers
1130-1140 (Dijon, BM, ms 2°, f. 442v; fig. 20),
montre, dans le bas, les personnifications des ąuatre
fleuves du paradis; en haut, saint Jean a tete d’aigle
tenant couteau et trempant sa plume, assis, regarde
vers une figurę de Dieu assis, dote d’un nimbe uni,
tenant livre et presentant, au niveau de sa poitrine,
un medaillon enfermant une figurę du Logos juveni-
le et en buste148.
Parmi les illustrations du Prologue comportant
deux figures anthropomorphes, chacune etant dans
sa mandorle, nous rencontrons un certain nombre
d’images encore. Les unes sont construites selon un
schema horizontal : ainsi, dans le Tetraeyangile Pa-
ris, BNF, ms gr. 64, f. 158v (Constantinople, XIe ou
XIIe siecle; fig. 10)149. Les autres, selon un schema
vertical, avec deux Majestes superposees. Ainsi dans
deux Bibles probablement chartraines du XIIe siecle
conservees a Troyes150. La Bibie ms 2391 (fig. 21),
dite “des Comtes de Champagne”, montre, de haut
en bas, le Pere, designe comme A et D, 1’Emmanu-
el portant un grand nimbe crucifere, et la Colombe
tournee vers le haut. La miniaturę de la deuxieme
Bibie, connue comme Bibie de saint Bernard151,
Troyes, BM, ms 458, t. II, f. I66v (fig. 22), est d’in-
terpretation plus delicate ; elle represente une ada-
ptation audacieuse d’une scene du Bapteme du
Christ qui figurę comme enseigne de l’evangile de
Marc dans le meme manuscrit (f. 147; fig. 23). Sur
ce dernier feuillet, 1’initiale I de Marc, est remplie
d’un rinceau qui formę trois medaillons enchaines
une bonne part des theologiens grecs, fournit un commentaire
eclairant de cette image (Jean Scot, Homelie sur le Prologue de
Jean..., p. 225).
148 Załuska, Manuscrits enlumines de Dijon..., n°104,
p. 134; Boespflug et Załuska, “Le dogme trinitaire...”,
p. 200 et pi. II a.
149 Cat. d’expo, Byzance, n° 268, p. 356—357; cette image
a ete longuement analysee par nous dans Bcespflug et
Załuska, “Notę sur 1’iconographie du Prologue de Jean”...,
p. 293-303.
150 Troyes, BM, ms 2391 (Cahn, Bibie Romanę ..., p. 283,
n° 114), et Troyes, BM, ms 458 {ibid., n° 113). L’origine de ces
bibles a ete longuement discutee, mais dernierement, de longues
recherches ont conduit Patricia Stirnemann a les attribuer a un
scriptorium travaillant aupres de la cathedrale de Chartres; P.
Stirnemann, dans cat. d’expo, Splendeur de la cour de Cham-
pagne au temps de Chretien de Troyes, Troyes, 1999 (numero
special de La Vie en Champagne), p. 61, n° 23.
151 Cat. d’expo, Saint Bernard et le monde cistercien, Paris,
1990, n° 21, p. 207 [notice par P. Stirnemann]; P. Stirne-
mann, “Ou ont ete fabriąues les livres de la Glosę ordinaire
dans la premiere moitie du XIIe siecle?”, dans F. Gasparri, ed.,
Le XIV siecle: mutations et renoureau en France dans la pre-
a la yerticale. De haut en bas y figurent: la Colombe
de 1’Esprit, Jesus nu a mi-corps dans les flots du Jou-
rdain, saint Jean-Baptiste. Dans 1’initiale I de Jean,
ou il n’y a pas de rinceau, et ou les trois medaillons,
separes par un motif yegetal, sont superposes, la
Colombe et Jesus ont gardę leur place, Jesus etant
maintenant habille; le Jean du troisieme medaillon
a ete transforme en Dieu le Pere christique et en
Ancien des jours en meme temps, par le nimbe cru-
cifere et la chevelure blanche. Ainsi s’explique pour-
quoi les Personnes ont change de place par rapport
a la Bibie precedente qui les presentait dans 1’ordre
inyerse, theologiquement plus juste si fon doit lirę
1’image de haut en bas, et non de bas en haut com-
me un yitrail. D’autres images egalement sont dune
rare audace, telle 1’etonnante initiale I d’un
eyangeliaire conserye au Tresor de la cathedrale de
Padoue, sans cote, f. 6152 (fig. 24) avec, de haut en
bas, un Dieu-Pere153 en pied, puis la Colombe et, en
dernier, tete-beche, le Fils-Emmanuel, dans une po-
sition tout a fait singuliere, qui cherche a traduire
plastiquement la Descente du Verbe en vue de son
Incarnation. L’Aigle de Jean se trouve tout en bas de
1’initiale. On pourrait mentionner d’autres exemples
encore154.
D’autres manuscrits ont eu recours, pour illustrer
le Prologue, a des types trinitaires deja stabilises,
comme Trinite du Psautier155 et Tróne de grace. Ce
dernier type, par exemple, a ete utilise pour 1’illustra-
tion du Prologue dans les evangiles autrichiens du
debut du XIIIe siecle conserves a Graz, Univer-
sitatsbibliothek, cod. 185, fi 126, ou un Tróne de
miere moitie du XIIe siecle, Paris, 1994, Cahiers du leopard d’or,
3, p. 257—301 (269—277); J.-P Bouhot et J.-F. Genest, in
A. Vernet (dir.), La Bibliotheąue de Clairvaux, t. 2: Les ma-
nuscrits conserves, I: Manuscrits bibliąues, patristiąues et theo-
logiąues, Paris, 1997; P. Stirnemann, “Le temoignage des
manuscrits: scribes et enlumineurs (1140—1220) ”, dans M.
Peyrafort-Huin, La Bibliotheąue medievale de l’abbaye de
Pontigny (KIP—XIXe siecle), Paris 2001, p. 57, attribue a cette
bibie une origine chartraine, des annees 1140.
152 B. Kat terbach, Le Miniaturę dell’Evangeliario di
Padova delLanno 1170, Romę, 1931.
153 Pour les notions specifiąuement iconographiąues de
“Dieu-Christ” et de “Dieu-Pere”, voir Fr. Boespflug, “Un etrange
spectacle: Le Buisson ardent comme theophanie dans fart Occi-
dental”, Revue de Part, 97, 1992, p. 11—31, part. 17—18.
154 Telle la peinture en pleine page du Sacramentarium
Leodiense ad usum Sancti Bertini monasterii accomodatum (Paris,
BNF, ms lat. 819, f. 13; FI. Swarzenski, Monuments ojRoman-
esąue Art. The Art of Church Treasures in North Western Europę,
Londres, 1954, pl. 83, n°192.
155 Ainsi dans les Evangiles gloses Vat. Lat. 120, f. 274, une
Trinite du Psautier preside a la Creation du monde en tete du
Prologue de Jean.
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1’abbaye benedictine Saint-Benigne de Dijon, vers
1130-1140 (Dijon, BM, ms 2°, f. 442v; fig. 20),
montre, dans le bas, les personnifications des ąuatre
fleuves du paradis; en haut, saint Jean a tete d’aigle
tenant couteau et trempant sa plume, assis, regarde
vers une figurę de Dieu assis, dote d’un nimbe uni,
tenant livre et presentant, au niveau de sa poitrine,
un medaillon enfermant une figurę du Logos juveni-
le et en buste148.
Parmi les illustrations du Prologue comportant
deux figures anthropomorphes, chacune etant dans
sa mandorle, nous rencontrons un certain nombre
d’images encore. Les unes sont construites selon un
schema horizontal : ainsi, dans le Tetraeyangile Pa-
ris, BNF, ms gr. 64, f. 158v (Constantinople, XIe ou
XIIe siecle; fig. 10)149. Les autres, selon un schema
vertical, avec deux Majestes superposees. Ainsi dans
deux Bibles probablement chartraines du XIIe siecle
conservees a Troyes150. La Bibie ms 2391 (fig. 21),
dite “des Comtes de Champagne”, montre, de haut
en bas, le Pere, designe comme A et D, 1’Emmanu-
el portant un grand nimbe crucifere, et la Colombe
tournee vers le haut. La miniaturę de la deuxieme
Bibie, connue comme Bibie de saint Bernard151,
Troyes, BM, ms 458, t. II, f. I66v (fig. 22), est d’in-
terpretation plus delicate ; elle represente une ada-
ptation audacieuse d’une scene du Bapteme du
Christ qui figurę comme enseigne de l’evangile de
Marc dans le meme manuscrit (f. 147; fig. 23). Sur
ce dernier feuillet, 1’initiale I de Marc, est remplie
d’un rinceau qui formę trois medaillons enchaines
une bonne part des theologiens grecs, fournit un commentaire
eclairant de cette image (Jean Scot, Homelie sur le Prologue de
Jean..., p. 225).
148 Załuska, Manuscrits enlumines de Dijon..., n°104,
p. 134; Boespflug et Załuska, “Le dogme trinitaire...”,
p. 200 et pi. II a.
149 Cat. d’expo, Byzance, n° 268, p. 356—357; cette image
a ete longuement analysee par nous dans Bcespflug et
Załuska, “Notę sur 1’iconographie du Prologue de Jean”...,
p. 293-303.
150 Troyes, BM, ms 2391 (Cahn, Bibie Romanę ..., p. 283,
n° 114), et Troyes, BM, ms 458 {ibid., n° 113). L’origine de ces
bibles a ete longuement discutee, mais dernierement, de longues
recherches ont conduit Patricia Stirnemann a les attribuer a un
scriptorium travaillant aupres de la cathedrale de Chartres; P.
Stirnemann, dans cat. d’expo, Splendeur de la cour de Cham-
pagne au temps de Chretien de Troyes, Troyes, 1999 (numero
special de La Vie en Champagne), p. 61, n° 23.
151 Cat. d’expo, Saint Bernard et le monde cistercien, Paris,
1990, n° 21, p. 207 [notice par P. Stirnemann]; P. Stirne-
mann, “Ou ont ete fabriąues les livres de la Glosę ordinaire
dans la premiere moitie du XIIe siecle?”, dans F. Gasparri, ed.,
Le XIV siecle: mutations et renoureau en France dans la pre-
a la yerticale. De haut en bas y figurent: la Colombe
de 1’Esprit, Jesus nu a mi-corps dans les flots du Jou-
rdain, saint Jean-Baptiste. Dans 1’initiale I de Jean,
ou il n’y a pas de rinceau, et ou les trois medaillons,
separes par un motif yegetal, sont superposes, la
Colombe et Jesus ont gardę leur place, Jesus etant
maintenant habille; le Jean du troisieme medaillon
a ete transforme en Dieu le Pere christique et en
Ancien des jours en meme temps, par le nimbe cru-
cifere et la chevelure blanche. Ainsi s’explique pour-
quoi les Personnes ont change de place par rapport
a la Bibie precedente qui les presentait dans 1’ordre
inyerse, theologiquement plus juste si fon doit lirę
1’image de haut en bas, et non de bas en haut com-
me un yitrail. D’autres images egalement sont dune
rare audace, telle 1’etonnante initiale I d’un
eyangeliaire conserye au Tresor de la cathedrale de
Padoue, sans cote, f. 6152 (fig. 24) avec, de haut en
bas, un Dieu-Pere153 en pied, puis la Colombe et, en
dernier, tete-beche, le Fils-Emmanuel, dans une po-
sition tout a fait singuliere, qui cherche a traduire
plastiquement la Descente du Verbe en vue de son
Incarnation. L’Aigle de Jean se trouve tout en bas de
1’initiale. On pourrait mentionner d’autres exemples
encore154.
D’autres manuscrits ont eu recours, pour illustrer
le Prologue, a des types trinitaires deja stabilises,
comme Trinite du Psautier155 et Tróne de grace. Ce
dernier type, par exemple, a ete utilise pour 1’illustra-
tion du Prologue dans les evangiles autrichiens du
debut du XIIIe siecle conserves a Graz, Univer-
sitatsbibliothek, cod. 185, fi 126, ou un Tróne de
miere moitie du XIIe siecle, Paris, 1994, Cahiers du leopard d’or,
3, p. 257—301 (269—277); J.-P Bouhot et J.-F. Genest, in
A. Vernet (dir.), La Bibliotheąue de Clairvaux, t. 2: Les ma-
nuscrits conserves, I: Manuscrits bibliąues, patristiąues et theo-
logiąues, Paris, 1997; P. Stirnemann, “Le temoignage des
manuscrits: scribes et enlumineurs (1140—1220) ”, dans M.
Peyrafort-Huin, La Bibliotheąue medievale de l’abbaye de
Pontigny (KIP—XIXe siecle), Paris 2001, p. 57, attribue a cette
bibie une origine chartraine, des annees 1140.
152 B. Kat terbach, Le Miniaturę dell’Evangeliario di
Padova delLanno 1170, Romę, 1931.
153 Pour les notions specifiąuement iconographiąues de
“Dieu-Christ” et de “Dieu-Pere”, voir Fr. Boespflug, “Un etrange
spectacle: Le Buisson ardent comme theophanie dans fart Occi-
dental”, Revue de Part, 97, 1992, p. 11—31, part. 17—18.
154 Telle la peinture en pleine page du Sacramentarium
Leodiense ad usum Sancti Bertini monasterii accomodatum (Paris,
BNF, ms lat. 819, f. 13; FI. Swarzenski, Monuments ojRoman-
esąue Art. The Art of Church Treasures in North Western Europę,
Londres, 1954, pl. 83, n°192.
155 Ainsi dans les Evangiles gloses Vat. Lat. 120, f. 274, une
Trinite du Psautier preside a la Creation du monde en tete du
Prologue de Jean.
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