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**** ANDRÉ GILL ** 335 **

Après la réponse faite d'un trait de plume par J. Grand-Carteret, il nous
reste à dire que l'insistance du rédacteur de la Gazette de France à traiter
André Gill de « contemplatif » est autant malhabile que l'expression est
impropre dans le sens qu'il lui prèle. Ce mot, qui revient dans son article,
comme un leitmotiv, ne saurait être à double tranchant. Voyez plutôt
M. Joseph Prudhomme !

Boileau, qui admirait Molière, le qualifiait de « contemplateur »; Jean-
Jacques aussi était un contemplalif. Or, ce qui est un hommage pour le
grand comédien et ce qu'on nous présente pour une grande qualité chez le
philosophe écrivain, ne peut , par le bon plaisir de la vieille gazette royaliste,
se changer en un défaut à l'égard du dessinateur ironiste.

Contemplateur !

Gill a-t-il jamais envié ce titre?

Dans tous les cas, il y a droit autant que le grand poète comique.

Comme lui, n'eut-il pas le cœur si généreux que sa porte fut toujours
ouverte aux malheureux, et, comme lui encore, ne passa-t-il pas tristement
sa vie à faire rire les hommes?

Que ceux qui se défendent de contemplation lisent et méditent les der-
nières lignes que nous donnerons de lui sous ce titre :

SERMON DE CARÊME

« J'ai l'honneur d'être admis dans l'intimité de quelques sexagénaires
qui m'émerveillent parla vitalité physique et intellectuelle qu'ils développent
incessamment. Quand une heure sombre m'arrive, il me faut fuir en hâte les
hommes de mon âge, et surtout l'entretien stérile des plus jeunes. — C'est
près de quelque grand aîné que je me réfugie.

Difficilement, en effet, trouverais-je autre part, en été, un géant de belle
humeur qui, comme l'illustre professeur Pajot, m'entraînât, tout une après-
midi, sur les flots jaseurs et ombragés de la Marne, àforce d'avirons; l'hiver,
un viveur intéressant, de causerie prestigieuse, enthousiaste et consolant
comme Miolin, dont l'esprit, l'appétit et le eœur sont toujours en éveil;
ou même, en tout temps, un espiègle de haute futaie, comme Nadar qui,
fatigué de photographie, de dessin, d'aérostation et de littérature, se
repose en bondissant, comme un clown, à travers ses ateliers, défaisant , de
minute en minute, le nœud de ma cravate, avec les cris de joie d'un écolier
lâché!
 
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