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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 10.1893

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Leprieur, Paul: Correspondance d'Angleterre
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GAZETTE DES BEAUX-AIITS.

l’habile graveur Félicien Rops (YAtirapadé). La Hollande représentée par Mesdag,
Israëls ou Jacob Maris; la Suède et la Norvège, par Zorn ou Thaulow; la Suisse,
par Mlle Kreslau; l’Allemagne, par Hœcker, Liebermann, Kiihl, Holzel, Uhde et ses
curieux Disciples d'Emmaüs; l’Italie enfin par Segantini, le seul artiste italien qui
compte actuellement, âpre et dur parfois, mais puissant, achevaient de composer
le cadre intelligent et sympathique, où les nouveautés anglaises s’offraient à nous.
On avait fait une place d’honneur à M. Whistler (Portrait cle lady Meux), et ce
n’était que justice : car il était un de ceux dont l’influence se sentait le plus nette-
ment en ce milieu.

C’est entre deux pôles, en effet, qu’oscillent incertains et troublés les novateurs
d’Ecosse. Les uns, tels que MM. Guthrie, Lavery, Dow, Austen Brown, Lochhead,
Alexander Roche sont tentés par la saveur des gris, par la douceur de rêves encore
inachevés. Portraits ou paysages, leurs scènes se passent toujours dans un monde
crépusculaire, où les figures ont l'air d’apparitions : des couleurs apaisées tachent
çà et là seulement la pénombre; et il faut avouer que certains d’entre eux se ser-
vent du procédé avec une infinie délicatesse. Il dérive toutefois de Whistler en sa
source première, quelque ingénieuses et souples qu’en soient les dérivations.
Beaucoup plus personnels, indépendants et hardis, coloristes avant tout, d’autres
ne voient dans la nature que prétexte à tons violents, à taches éclatantes, heurtées,
brutales en apparence, juxtaposées on ne sait comment, par larges traînées, par
placages, ainsi que du ciment par un maître maçon, et qui finissent par composer
des tableaux d’une harmonie étrange, d’une force et d’un brillant inattendus. On a
comparé justement leur peinture pour l’effet à une tapisserie un peu grossière ou
au bariolage d’un tapis d’Orient. L’Été de M. Ilornel, par exemple, acheté pour
son musée, au grand scandale de quelques-uns, par la Corporation de Liverpool,
est un des bons exemples de ce parti pris curieux. Cela donne parfois matière à des
paysages tout à fait savoureux et francs, quoique bizarres, dans une gamme de
bruns, de bleus ou de rouges poussés jusqu’aux dernières limites de l’intensité :
ainsi chez MM. Georges Henry et J. lteid Murray. Plus ou moins exagérés ou
calmes, MM. Harrington Mann, Wbitelaw Hamilton Newbery, Kennedy, Gauld,
Morton sont également à citer. M. Melville surtout triomphe dans un séduisant
portrait de jeune femme aux tonalités japonaises et dans une éblouissante marine,
aussi rare qu’imprévue d’aspect (La Mer de saphir).

Les Parisiens ont pu faire, du reste, connaissance avec l’un et l’autre système
au Salon des Champs-Elysées, où furent transportés, avant même la fermeture de
l'Exposition, deux des plus caractéristiques échantillons de laGrafton Gallery : Y Idylle
assombrie, tendre, plutôt esquissée que faite d’Alexander Roche, et les Boucaniers
truculents, endiablés, comme à l’emporte-pièce, de M. Brangwyn. A laquelle des
deux doctrines appartiendra l’avenir? 11 est difficile de le dire encore. Les coloristes
nous paraissent avoir plus de vie et de chances de succès, surtout s’ils tempèrent
un peu leurs exagérations. En tout cas, l’Academy n’a plus qu’à se bien tenir
désormais. L’ennemi est aux portes. Delenda Carthago !

PAUL LEPRIEUR.

Le Rédacteur en chef, gérant : LOUIS GONSE.

Sceaux. •— lmp. Charaire et Cie.
 
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