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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 10.1893

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Nr. 3
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Bouchot, Henri: Exposition des portraits des écrivains et journalistes du siècle
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PORTRAITS D'ÉCRIVAINS ET DE JOURNALISTES. 207

Vigneron, mais il eût été plus juste de mentionner Hersent, que
Vigneron a simplement copié et amolli dans une transcription falote.
Tout pareillement Delphine Gay, aussi portraiturée par Hersent,
subit les adaptations de Mme Amélie Leduc; les connaisseurs ne s’y
tromperont pas. Hersent n’était point un maître classé ; sa facture est
étroite et sa pratique assez mince, mais il avait encore le souci des
ressemblances, le soin des poses, la recherche très subtile de cer-
taines galanteries dont les femmes jolies lui savaient un gré infini.
Mme de Girardin préférait cette figure d’elle à toutes les autres; on
l’y voyait en Muse papillotée, le menton sur la main, découvrant un
joli bras rond, gentiment poétisée et inspirée. L’original est à Ver-
sailles, où il ne produit aucun effet; il fallait en vérité que l’exposition
des écrivains lui ramenât l’intérêt et forçât les pèlerinages qu’on ne
va pas manquer de faire tout à l’heure.

Aroyez le retour des choses! Dans la cohue des littérateurs du
siècle, Delphine Gay ne tient qu’une place secondaire ; au temps de sa
jeunesse et de ses grands succès, on eût fait rire de lui prédire cette
médiocrité. Un temps fut où il n’était question que d’elle, et La Mésan-
gère l’en savait agréablement railler. Que le roi Charles X distribuât
les récompenses au Musée, il avait devant lui à la première place une
personne fort voyante en ses atours, très entourée, et comme il était
extrêmement myope il demandait à Sosthène de La Rochefoucauld : «Qui
est donc cettecharmante?» La Rochefoucauld répondait : «MlleDelphine
Gay, sire. —■ Ah ! — Elle va dire des vers, sire. — Ah ! » Dans toutes
les fêtes, aux bals de l’Hôtel de Ville, au Grand Vermeil, la même
personne blonde était là assise, toute prête, provoquant de ses plumes
et de ses coques les regards du vieux roi. Il faisait la même demande,
on lui retournait la même réponse et il poussait des ah! de plus en
plus agacés. Un jour il est à la chasse, il pontifie, la bête bat l’eau et
le grand veneur prend les ordres pour servir le cerf. Une dame est
là. « Qui est cette dame? — Mlle Delphine Gay. sire! —Elle va dire
des vers? — Oh! je ne pense pas, sire. — En tout cas, priez-la d’at-
tendre la curée... »

Elle, et surtout Mrae de Staël n’ont pas dans l’exposition la place
que leurs contemporains eussent-faite à toutes deux. C’est peu
que la toile prêtée par M. le duc de Broglie pour donner à Mme de
Staël le rang occupé par elle dans notre littérature. On eût aimé à
revoir Corinne, fût-ce la copie autrefois donnée par le prince Henri
de Prusse à Mme Récamier; puis l’auteur de ïAllemagne; enfin, la
dame de Coppet, envahie par les emphases d’une maturité robuste.
 
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