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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
à ses meilleurs artistes; elle n’a pas perdu l’habitude de les
mettre à contribution, et les plus remarquables modèles soumis par
M. Jeffrey, M. Essex, avaient pour auteurs MM. Walter Crane ou
Heywood Sumner, M. Day ou M. Stephen Webb. L’avertissement ne
devait pas échapper à M. Schutz, de Dessau; il s’est tourné vers les
décorateurs réputés de son pays, et non en vain : le succès a répondu,
éclatant, immédiat. Encore qu’ils aient apporté moins de bâte, les
fabricants de France peuvent se féliciler d’avoir sollicité le concours
de M. Ruepp, de M. Couty, de M. Bigaux; la production s'est diver-
sifiée; le penchant se dénonce pour les nuances tendres, pour les
larges frises développant l’alternance de leurs motifs sous les cor-
niches, dans la partie de la paroi trop élevée pour recevoir aucune
décoration mobile. Parfois encore, la tenture se plaît, avec M. Heaton,
M. Préaubert, à revêtir les apparences du cuir ou de l’étoffe
pelucheuse...
Qu’il s’agisse de papiers peints, de tissus, de tapis, de broderies
ou de dentelles, toujours le nom de M. Félix Aubert1 reviendra sous
notre plume avec le même sentiment de gratitude. La renaissance
décorative à laquelle nous assistons n'a pas compté de servant plus
actif ni plus utile. Sa stylisation de la plante est claire sans séche-
resse, élégante sans redondance. Combien on doit déplorer qu’un si
considérable effort se soit trouvé disséminé, que la faculté n’ait pas
été laissée de l’embrasser dans son entier! Il eût fait beau mettre en
parallèle avec les cretonnes de Turnbull celles dont M. Félix Aubert
a conçu le dessin pour MM. Scheurer et Lauth; en dehors de lui, la
rénovation du tissu imprimé se poursuivait, à Lyon chez M. Duplan,
à Rouen chezM. Bessclièvre. On a fait grand honneur à M. Besselièvre
de son exposition, el en toute justice : elle est d’une infaillibilité de
1. M. Félix Aubert était aussi l’auteur de plusieurs décorations au pochoir
d’un capital intérêt ; on ne saurait leur comparer que celles exécutées par
M. Marcel Ruty. Parmi les peintures décoratives proprement dites, s’imposaient
celles de M. Albert Besnàrd pour le pavillon des Arts décoratifs et pour l’instal-
lation de la maison Pi ver, le plafond de M. Jules Chéret (pavillon du Printemps),
les panneaux de M. Steinlen (classe de la tapisserie), de M. Jose-Maria Sert (salle
à manger de 1’« Art nouveau »). Nous avons déploré, à propos des frises de M. Koro-
vine (voir Gazette des Beaux-Arts, 1900, t. XXIV, p. 400), que l’on ait négligé de
faire appel à M. Henri Rivière. Il faut étendre cette remarque et ce regret à
M. Auriol, ainsi qu’à tout le groupe d’artistes nouveaux qui avaient bien mérité
de l’art décoratif et dont l’Exposition Universelle de 1900 laissait ignorer le rôle
et même l’existence dans l’école contemporaine : MM. Maurice Denis, Vuillard,
Bonnard, Ranson, Roussel, Sérusier et Vallollon.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
à ses meilleurs artistes; elle n’a pas perdu l’habitude de les
mettre à contribution, et les plus remarquables modèles soumis par
M. Jeffrey, M. Essex, avaient pour auteurs MM. Walter Crane ou
Heywood Sumner, M. Day ou M. Stephen Webb. L’avertissement ne
devait pas échapper à M. Schutz, de Dessau; il s’est tourné vers les
décorateurs réputés de son pays, et non en vain : le succès a répondu,
éclatant, immédiat. Encore qu’ils aient apporté moins de bâte, les
fabricants de France peuvent se féliciler d’avoir sollicité le concours
de M. Ruepp, de M. Couty, de M. Bigaux; la production s'est diver-
sifiée; le penchant se dénonce pour les nuances tendres, pour les
larges frises développant l’alternance de leurs motifs sous les cor-
niches, dans la partie de la paroi trop élevée pour recevoir aucune
décoration mobile. Parfois encore, la tenture se plaît, avec M. Heaton,
M. Préaubert, à revêtir les apparences du cuir ou de l’étoffe
pelucheuse...
Qu’il s’agisse de papiers peints, de tissus, de tapis, de broderies
ou de dentelles, toujours le nom de M. Félix Aubert1 reviendra sous
notre plume avec le même sentiment de gratitude. La renaissance
décorative à laquelle nous assistons n'a pas compté de servant plus
actif ni plus utile. Sa stylisation de la plante est claire sans séche-
resse, élégante sans redondance. Combien on doit déplorer qu’un si
considérable effort se soit trouvé disséminé, que la faculté n’ait pas
été laissée de l’embrasser dans son entier! Il eût fait beau mettre en
parallèle avec les cretonnes de Turnbull celles dont M. Félix Aubert
a conçu le dessin pour MM. Scheurer et Lauth; en dehors de lui, la
rénovation du tissu imprimé se poursuivait, à Lyon chez M. Duplan,
à Rouen chezM. Bessclièvre. On a fait grand honneur à M. Besselièvre
de son exposition, el en toute justice : elle est d’une infaillibilité de
1. M. Félix Aubert était aussi l’auteur de plusieurs décorations au pochoir
d’un capital intérêt ; on ne saurait leur comparer que celles exécutées par
M. Marcel Ruty. Parmi les peintures décoratives proprement dites, s’imposaient
celles de M. Albert Besnàrd pour le pavillon des Arts décoratifs et pour l’instal-
lation de la maison Pi ver, le plafond de M. Jules Chéret (pavillon du Printemps),
les panneaux de M. Steinlen (classe de la tapisserie), de M. Jose-Maria Sert (salle
à manger de 1’« Art nouveau »). Nous avons déploré, à propos des frises de M. Koro-
vine (voir Gazette des Beaux-Arts, 1900, t. XXIV, p. 400), que l’on ait négligé de
faire appel à M. Henri Rivière. Il faut étendre cette remarque et ce regret à
M. Auriol, ainsi qu’à tout le groupe d’artistes nouveaux qui avaient bien mérité
de l’art décoratif et dont l’Exposition Universelle de 1900 laissait ignorer le rôle
et même l’existence dans l’école contemporaine : MM. Maurice Denis, Vuillard,
Bonnard, Ranson, Roussel, Sérusier et Vallollon.