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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 25.1901

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Nr. 5
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Michel, Émile: La galerie de M. Rodolphe Kann
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https://doi.org/10.11588/diglit.24807#0420

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

dosage et la répartition de la lumière qui fait l’excellence spéciale
de Pieter de Hooch.

Mais il est plus que temps d’en venir aux paysagistes hollandais,
dont M. Kann a su réunir une collection aussi complète que choisie.
Le plus grand d’entre eux, Jacob van Ruisdael, y est royalement
représenté par six ouvrages, qui nous offrent comme un résumé des
acceptions diverses d’un talent dont la sincérité absolue égale
l'élévation et la poésie. Ce que Rembrandt avait fait pour les petits,
pour les pauvres, Ruisdael l’a fait, à son tour, pour les humbles
aspects de cette nature âpre et sauvage à laquelle, solitaire lui-même
et ignoré de ses contemporains, il demanda les seules satisfactions
réservées à une existence toujours misérable. Il nous en offre ici,
dans des exemplaires excellents, les aspects les plus attachants et
les plus variés, soit avec ces Blanchisseries d’Overveen qu’il a peintes
si souvent, vues de la dune qui les domine et d’où se découvrent, en
un mince raccourci, les perspectives infinies des vastes plaines et
de la mer ; soit avec une de ces Cascades qu’on a dit, bien à tort,
copiées d’Lverdingen et qui, parla grandeur de l’impression et la
vérité singulière avec laquelle y sont traitées les eaux écumantes et
les remous compliqués de leurs flots, dénotent, au contraire, une
étude ti’ès personnelle et très attentive de la nature elle-même.
Quelles saisissantes et magistrales compositions que ce Moulin à
vent cm bord d’un fleuve, œuvre de la jeunesse de l’artiste, ou
cette Chaumière ombragée par des chênes séculaires, dont les
silhouettes fièrement découpées se détachent avec force, mais sans
dureté, sur un ciel nuageux! Abrités par leur épaisse végétation,
quelques maigres épis de blé achèvent de mûrir, mal défendus contre
les ronces et les rudes broussailles qui les pressent de toutes parts.
L’aspect dece paysage est imposant et tous les détails en renforcent
l’impression. Rien do vague dans les formes; aucune indécision dans
les couleurs austères. Tout cela est peint et dessiné en perfection,
sans artifice, avec une honnêteté scrupuleuse. C’est le propre de
Ruisdael d’avoir, avec cette netteté dans les formes et cette force
dans le coloris, obtenu cette poésie grandiose, que soutient et renou-
velle incessamment chez lui un amour respectueux de la nature.
Dans l’extrême simplicité du motif et l’exiguïté de ses dimensions,
la Cabane en ruines est peut-être plus remarquable encore. Au pre-
mier plan, une flaque d’eau, près de laquelle croissent à l’aventure
des herbes folles, des bruyères et des roseaux, et, s’enlevant sur un
ciel grisâtre, à côté d’un buisson penché, une cabane déjetée dont
 
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