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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 11.1914

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Nr. 1
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Leprieur, Paul: La Vierge du "Diptyque de Melun"
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https://doi.org/10.11588/diglit.24888#0046

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LA VIERGE DU « DIPTYQUE DE MELUN

statue de son tombeau, au château de Loches, ne permet qu’im-
parfaitement de l’étayer. Elle eut cours, en tout cas, au xvie et au
xvne siècle, alors que les portraits historiques étaient en pleine vogue,
et donna lieu à de nombreuses transcriptions en buste, sans l’Enfant,
que la gravure de M. Toupey n’est pas sans rappeler. On vit une de
ces transcriptions à l'Exposition des Primitifs français. Le musée de
Versailles en possède également une, copie par Comairas. Charles
Sorel, mentionnant ces portraits dans la Solitude de Cléomède, sans
se douter que l’œuvre originale est une Vierge prête à allaiter
l’Enfant, s’étonne d’y voir Agnès représentée « en courtisane, avec
une robe desgrafée et un sein à découvert, les yeux demy fermés ».
Henri Bouchot est parti de ces données fragiles pour imaginer,
contre toute vraisemblance, l’œuvre originairement placée à Loches
et vouée par Etienne Chevalier à la mémoire d’Agnès, avant d’être
transportée à Melun. C'est là une invention de roman.

Il ne nous parait pas moins aventureux de prétendre dissocier,
comme on l’a fait, les volets du diptyque, en les supposant de dates
ou de mains différentes. L’Exposition des Primitifs français, qui fut
une occasion unique de les étudier cote à côte, n’a fait que confirmer
— toutes réserves faites quant à un état de conservation différent —
notre opinion ancienne sur l’homogénéité de l’œuvre1. Non seule-
ment les tableaux sont peints sur le même bois et dans des dimen-
sions concordantes; mais on y retrouve identiquement les mêmes
procédés, la même technique, la même façon de modeler les chairs,
de plisser les vêtements ou d’indiquer les lumières par touches
soigneuses et menues. La Vierge est d’un type féminin qui reparaît
fréquemment dans les Heures d’Etienne Chevalier, à Chantilly, où
se voient également des couronnes analogues, des angelots sem-
blables, ou un enfant presque textuellement pareil, plusieurs fois
répétés. Gardons-nous donc des conjectures téméraires. Le diptyque,
que Üenys Godefroy (Histoire de Charles VIE 1661, p. 881 et suiv.)
vit encore à l’église Notre-Dame de Melun, près de la sépulture
d’Etienne Chevalier, dans son merveilleux cadre de velours bleu,
enrichi par alternance de médaillons d’émail et de lacs d’amour,
brodés d’or, d'argent et de perles, au chiffre du donateur, était
vraisemblablement alors, en son emplacement d’origine, absolu-
ment tel qu’il avait été commandé à bouquet et exécuté par lui.

PAUL LEPRIEUR

1. Cf. Revue de l'art ancien et moderne, août 1897, p. 19-2G.
 
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