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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 11.1914

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Nr. 3
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Humbert, André: Les fresques romanes de Brinay
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https://doi.org/10.11588/diglit.24888#0250

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LES FRESQUES ROMANES DE RRINAY

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figures sont peu groupées à l’ensemble de l’action. Ainsi que partout,
dans les tableaux de Brinay, les personnages sont vus de large trois
quarts,presque de face, et les visages gardent un peu de cette impas-
sibilité hiératique longtemps de mise pour les êtres divins. Malgré
ce détail, il faut s’arrêter cependant aux silhouettes vraiment très
typiques des deux femmes. Le maître roman les a revêtues d’une
noblesse et d’une grâce élégantes qui sont tout à fait spéciales, aussi
loin des statues étirées et quasi momifiées de Chartres, que de la
majesté douce des Madones byzantines ou siennoises.

Un tableau de grandeur égale orne l’étage inférieur du côté
opposé, à droite de la fenêtre, représentant Y Avertissement de l'ange
à saint Joseph et la Fuite en Égypte. D’une part, saint Joseph assis
porte la main à son oreille en écoutant la voix de l’ange (toute petite
figure qui descend du ciel), et une porte étroite et haute nous indique
déjà le départ prochain hors de la ville. De l’autre, la Vierge, tenant
l’Enfant contre son sein, s’enfuit sur un âne blanc que Joseph guide
par la bride. La figure de la Vierge est particulièrement curieuse :
on voit, en l’observant, combien l’artiste roman, qui était un
véritable maître, restait sous l’empire des traditions; le schéma
général de sa silhouette vient, en effet, se circonscrire exactement
dans un ovale presque parfait, et l’on peut se rappeler la fréquence
de cette forme dans les représentations divines que tracèrent les
artistes de tradition byzantine. A côté de cette figure qui a la marque
précise d’une école, nous voyons par d’autres détails que le peintre
gardait des qualités personnelles de curiosité et d’observation : le
dessin du petit âne blanc, enlevé avec virtuosité — on peut prononcer
le mot,—évoque ces tracés rapides que les Japonais savent merveilleu-
sement jeter d’un coup de pinceau. Dans l’art de certains minia-
turistes du xive et du xve siècle, nous pouvons surprendre des concor-
dances encore plus surprenantes, comme vision et même comme
exécution, avec l’art des dessinateurs d’Extrême-Orient1. Ce panneau
de la Fuite en Égypte est fort intéressant à observer : à côté de la
Vierge au schéma byzantin et de l’âne semi-japonais, la figure de
saint Joseph semble tracée par un artiste de l’école de l’Ile-de-France
familiarisé avec les formes élégantes et longues que nous pouvons
voir encore à la porte Sainte-Anne de Notre-Dame de Paris.

Sur le mur latéral droit, la suite des sujets sacrés déroule égale-

1. Voir la représentation de la même scène dans le manuscrit des Belles
Heures de Jean duc de Berry (collection du baron Edmond de Rothschild), étudié
par M. le comte Durrieu dans la Gazette des Beaux-Arts (1906, t. I, p. 273).
 
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