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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 11.1914

DOI issue:
Nr. 5
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Jamot, Paul: [Les peintures et les dessins, 1]: la Collection Camondo au Musée du Louvre
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https://doi.org/10.11588/diglit.24888#0437

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

sous la neige à Honfleur, qui remonte à l’année 1865. Néanmoins,
dans ce paysage si solidement construit, d’un effet simple et puis-
sant, il y a déjà, malgré l’emploi d’une palette encore assez
sombre, je ne sais quoi de subtil, d’aérien, qui ne vient pas de
Courbet et dont la peinture française est redevable à Corot. Un peu
plus tard, quand Manet et M. Claude Monet auront, sans qu’il soit
facile de décider lequel a précédé l’autre, définitivement évolué
vers la peinture claire, la distance qui les sépare de Courbet s’accu-
sera tous les jours davantage, en même temps qu’ils développeront,
chacun suivant son humeur propre, les conséquences contenues
dans les exemples de Corot : gris argentés, lumière plus froide et
plus blanche, limpidité de l’atmosphère et valeur légère des figures
dans le paysage. Deux tableaux de M. Claude Monet, dans la collec-
tion Camondo, marquent cette évolution décisive : les Régates à
Argenteuil et le Bassin d'Argenteuil; l’un es! de 1874, l’autre de
1873. Ici, les voiles des barques claquent au vent qui fraîchit, le
ciel frémissant est traversé de nuages blancs et gris. Là, une impres-
sion de calme joyeux et la limpide allégresse d’un été commen-
çant s’épand du vaste ciel pommelé de blancs nuages sur l’eau
vivace du fleuve, tandis que, dans l’ombre transparente des grands
arbres feuillus, les promeneurs du dimanche animent de leur pré-
sence la rive basse et plate.

Quoique l’influence directe de Corot se soit exercée presque uni-
quement par ses paysages et surtout par ceux de ses dernières
années, on louera M. de Camondo d’avoir préféré pour le Louvre
deux de ces tableaux de figures qui furent longtemps ignorés
du public et dédaignés par les musées, deux de ces études simples
et ingénues comme Corot en peignit toute sa vie pour sa seule
satisfaction personnelle. Tantôt c’est un modèle favori du peintre
qu’il se plaît à travestir au moyen de quelques oripeaux rapportés
d’Italie; tantôt c’est une jeune tille ou une fillette de village qu’un
jour de pluie il fait poser dans la chambre qui lui sert d’atelier
pendant un séjour à la campagne. Il ne se met pas l’esprit à la tor-
ture pour trouver un sujet. La jolie Mariée de la collection Moreau-
Nélaton, c’est la bonne d’un camarade, le peintre Cibot. Ne lui
arriva-t-il pas un jour, chez son ami Robaut, de faire le portrait de
la petite fille qui loi apportait son déjeuner le matin, en l’affu-
blant d’un gilet à manches retourné du côté de la doublure, et
de nous faire accepter cette invention saugrenue par cette grâce
qu’il eut jusqu’à son dernier jour d’allier le génie à la naïve et
 
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