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Laborde, Léon Emmanuel Simon Joseph de [Editor]; Laborde, Alexandre Louis Joseph de [Editor]
Voyage de la Syrie — Paris, 1837

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https://doi.org/10.11588/diglit.6093#0011
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— 2 —

D'ALEX ANDRETTE
A IÎEYLAN,

3 heures.
7 janvier 1827.

DE BEYLAN
A ANTIOCHE,

8 heures 1/2.

8 JANVIER.

Nous prenons le chemin de Beylan et d'Antioche pour nous rendre à Alep. On passe près d'un ancien
fort, situé autrefois sur le bord de la mer, et qui en est éloigné aujourd'hui d'un quart de lieu. La
roule monte ensuite sur les flancs d'un ravin profond. Arrivés au haut de la montagne, nous nous re-
tournons pour jouir d'une vue magnifique qui embrasse tout le golfe. Notre route passe au bord d'affreux
précipices et fait des circuits tellement resserrés que l'on marche souvent dans la direction diamétrale-
ment opposée à celle que l'on a suivie d'abord; de façon que les caravanes qui entrent dans ces montagnes
et celles qui en sortent marchent par moments parallèlement el à une portée de pistolet de distance. Au
débouché d'un défilé, entre deux rochers, on aperçoit Beylan dans une position tout à fait singulière,
et comme caché au bout du monde. 11 semble qu'arrivé là on ne puisse aller plus loin. Cette petite ville
compte environ 2,000 habitants, presque tous musulmans. Elle est bâtie au fond d'une gorge et s'étend
des deux côtés sur le versant des montagnes, traversée d'aqueducs et de canaux pleins d'une eau excel-
lente qui se précipite en abondance par toules les issues. Les environs sont boisés ou plantés de vignes
et de mûriers, culture qui semble extraordinaire à une si grande élévation au-dessus du niveau de la
mer. Le cimetière est au bas de la ville; on y montre le tombeau du père de Mouslapha pacha, qui a
gouverné Alep.

Nous prenons la route d'Antioche; on monte pendant une heure, en suivant la rive droite du ruisseau
qui se précipite à travers Beylan au fond d'un grand ravin. On descend ensuite constamment jusqu'à
Khan Karamout, à 4 heures de marche de Bevlan. A oVoite sur la montagne apparaît un vieux châ-
teau ruiné dont on ne peut s'expliquer l'utilité, car il est trop loin de la route actuelle pour en défendre
le passage, et jamais route d'ailleurs n'a pu passer au pied de ces murailles.

Khan Karamout est un vaste bâtiment ruiné entourant une grande cour. C'est là qu'esl placé un poste
chargé d'examiner les teskérès ou passe-ports des voyageurs, à leur entrée dans le pachalik d'Alep. Hors
du Khan se sont groupées une vingtaine de cabanes remplies pour Je moment de pestiférés. Nous
passons sans y faire attention, et déjà rendus insouciants par l'habitude ; cependant nous allons déjeuner
plus loin près d'une fontaine à l'ombre de beaux arbres et hors de la compagnie des hommes.

Notre route continue toute la journée à travers la plaine d'Antioche. A notre gauche s'étend le lac, à
notre droite s'élèvent les montagnes formant la séparation entre la mer et le bassin du lac. Nous traver-
sons plusieurs cours d'eaux dont tous les ponls ont élé rompus par le terrible tremblement de terre
de 1822. La célèbre ville d'Antioche, que les Turcs appellent Antakia, se présente à nos regards, à deux
lieues de distance, au pied du mont Cassius et comme écrasée par cette masse gigantesque. A mesure
que nous approchons, nous distinguons les immenses murailles de la ville bâties en pierres énormes, et
composées d'une si forte maçonnerie que, si elles ne résistèrent pas aux secousses du tremblement de
terre, du moins elles ne cédèrent que par monceaux gigantesques qui se sont affaissés ou superposés dans
des poses convulsives et étranges. Ces murs embrassent dans un vaste circuit deux hauteurs séparées par
un grand ravin d'où sort un cours d'eau qui traversait la ville. Sur la plus élevée était une citadelle d'où
la muraille de la ville descendait jusqu'au fond du ravin et joignait les deux hauteurs. On voit encore
aujourd'hui, presque au fond de cetle gorge, des deux côtés d'un ruisseau bordé par des montagnes
tellement rapprochées que les rochers paraissent en passant suspendus perpendiculairement au-dessus de
la tête, deux énormes piliers de soixante pieds de haut, réunis autrefois par des arcades et qui apparte-
naient à la muraille de défense. De nombreuses tours carrées flanquaient l'enceinte de la ville ; elles sont
plus serrées du côté de la plaine, et elles bordent le cours de TOronte sur une ligne continue. Ce fleuve
qui traverse de jolis vergers et coule sur une assez grande largeur; cette riche végétation encadrant des
maisons neuves bâties en pierres de taille; un pont bien pavé avec des quais d'où l'on descend sur le
rivage par de beaux escaliers construits en larges dalles; ces grandes fortifications jetées au milieu de ces
immenses rochers : tout cet ensemble donne à la moderne Antakia un air de grandeur et un aspect ma-
jestueux en rapport avec l'histoire de la célèbre Antioche, et que nous n'avons encore trouvé dans au-
cune ville turque. Ajoutez une particularité qui égayé la vue, au moins pour des yeux fatigués par les
toits plats et les terrasses bordées de boue, c'est que les toits des maisons sont pointus et faits de tuiles
aux teintes chaudes et harmonieuses.

BEIT-EL-MA (Planche I, 1).

Site de l'ancienne Daphné, près d'Antioche.

Nous allons loger à Antioche chez un Grec né dans le pays, M. Dip, l'agent consulaire de presque tous
 
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