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rayon d'un ou deux myriamètres, suivre l'une après l'autre chacune de ces vallées souvent parallèles,
escalader les hauteurs qui les séparent, fouiller chaque groupe d'arbres et de rochers, gravir toute
pente au sommet de laquelle on verrait s'ouvrir, dans le tuf calcaire, la bouche de quelque excava-
tion. Il n'y a guère à douter que l'on n'arrivât ainsi, non-seulement à faire mieux connaître les mo-
numents déjà signalés, mais encore à en découvrir de nouveaux, à augmenter peut-être le nombre
des inscriptions phrygiennes, et par suite à en faciliter le déchiffrement. Depuis que le monument
principal a été recommandé par Leakc à la curiosité du monde savant, aucun voyageur érudit n'a
traversé ces vallées, même à la hâte, sans faire encore quelque découverte partielle, sans recon-
naître et décrire quelque monument qui avait échappé à ses prédécesseurs ; à plus forte raison l'explo-
ration lente et méthodique que nous réclamons serait-elle sûre d'obtenir encore d'importants résultats.
Ce canton a si peu d'habitants, la population est si ignorante et si insouciante, le pays si boisé, que,
pour se trouver hors de vue et à quelque distance des sentiers fréquentés, tel tombeau aussi curieux
peut-être et aussi important que l'uu des cinq ou six qui ont été dessinés jusqu'ici, aura échappé jus-
qu'à ce jour aux recherches trop rapides de tous les voyageurs. De toute manière, il y aurait profit
à réunir, pour la première fois, dans un même ouvrage, tous les monuments de cette région, à pu-
blier, d'après de nouvelles copies, d'après des vues photographiques et des estampages, toutes les
inscriptions phrygiennes que l'on aurait pu réunir. Un pareil recueil, ne contint-il même que peu ou
point de choses inédites, rendrait encore de grands services aux archéologues et aux philologues,
pourvu qu'il fût d'une exactitude parfaite, et que l'on put se fier aux représentations et aux
transcriptions qu'il contiendrait.
Nous quittâmes à regret, vers le coucher du soleil, Pichmich-kalé-si, et nous nous dirigeâmes
vers l'est, parmi de beaux pins espacés sur de vertes pelouses. Nous nous arrêtâmes au bout de
trois quarts d'heure dans une ferme isolée, qui appartient à un riche propriétaire de JJusrew-paeha-
khan. Le lendemain matin, nous en repartions à huit heures. A huit heures trois quarts, nous tra-
versions, marchant vers le nord-est, le petit village de Gahia, alors désert; il n'est, comme d'au-
tres villages de cette contrée, habité que de deux années l'une. Ce n'est que tous les deux ans
qu'on laboure les terres qui l'environnent. De 9 heures 25' à 10 heures 32' nous traversons une petite
plaine qu'entoure un cercle de collines; au milieu de cet espace, sur un tertre et dans les champs
environnants, nous trouvons des vestiges antiques aisément reconnaissables. Grands blocs taillés,
colonnes sans cannelures, nombreux fragments de poterie, tout indique qu'il y avait autrefois ici un
centre de population, tout au moins quelque riche bourg de l'époque romaine. Le débris le plus con-
sidérable est le soubassement d'un piédestal rectangulaire en grand appareil, qui a 4 mètres sur
5m,70. Une des assises a jusqu'à 0m,70 de hauteur. Cette plaine, où sont éparses quelques maisons
que l'on habite au temps des semailles et de la moisson, s'appelle maintenant Koulapa. La route
directe de Seïd-el-Ghazi à Husrew-pacha-khan s'y croise avec celle qui de Koutahia mène à Siwri-
hissar.
A mesure que nous avancions, les arbres s'abaissaient, la forêt se changeait en un taillis de plus
en plus clair. Au-delà de Koulapa, nous remontons sur une colline où poussent encore quelques pins,
courts et chétifs, sentinelles avancées de la vaste forêt où nous avions marché depuis notre départ de
Koutahia. Arrivés au sommet de cette colline, nous voyons se dérouler devant nous l'immense et
triste plateau que nous aurons à traverser jusqu'à Siwri-hissar. Pas un arbre à l'horizon, pas une
fumée de village, pas même ces balancements des épis, ces ondulations de la prairie qui donnent à
certaines plaines désertes une sorte de mouvement et de vie; mais une herbe courte et grise, le
silence, quelques tentes de nomades qui tachent çà et là, comme des points noirs, ces larges soli-
tudes : voilà ce qui s'offre à nous et nous serre le cœur, quand, vers le milieu du jour, nous disons
adieu à la colline et aux derniers arbres.
Les anciens avaient été frappés du caractère particulier de cette région; ils désignaient sous le nom
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rayon d'un ou deux myriamètres, suivre l'une après l'autre chacune de ces vallées souvent parallèles,
escalader les hauteurs qui les séparent, fouiller chaque groupe d'arbres et de rochers, gravir toute
pente au sommet de laquelle on verrait s'ouvrir, dans le tuf calcaire, la bouche de quelque excava-
tion. Il n'y a guère à douter que l'on n'arrivât ainsi, non-seulement à faire mieux connaître les mo-
numents déjà signalés, mais encore à en découvrir de nouveaux, à augmenter peut-être le nombre
des inscriptions phrygiennes, et par suite à en faciliter le déchiffrement. Depuis que le monument
principal a été recommandé par Leakc à la curiosité du monde savant, aucun voyageur érudit n'a
traversé ces vallées, même à la hâte, sans faire encore quelque découverte partielle, sans recon-
naître et décrire quelque monument qui avait échappé à ses prédécesseurs ; à plus forte raison l'explo-
ration lente et méthodique que nous réclamons serait-elle sûre d'obtenir encore d'importants résultats.
Ce canton a si peu d'habitants, la population est si ignorante et si insouciante, le pays si boisé, que,
pour se trouver hors de vue et à quelque distance des sentiers fréquentés, tel tombeau aussi curieux
peut-être et aussi important que l'uu des cinq ou six qui ont été dessinés jusqu'ici, aura échappé jus-
qu'à ce jour aux recherches trop rapides de tous les voyageurs. De toute manière, il y aurait profit
à réunir, pour la première fois, dans un même ouvrage, tous les monuments de cette région, à pu-
blier, d'après de nouvelles copies, d'après des vues photographiques et des estampages, toutes les
inscriptions phrygiennes que l'on aurait pu réunir. Un pareil recueil, ne contint-il même que peu ou
point de choses inédites, rendrait encore de grands services aux archéologues et aux philologues,
pourvu qu'il fût d'une exactitude parfaite, et que l'on put se fier aux représentations et aux
transcriptions qu'il contiendrait.
Nous quittâmes à regret, vers le coucher du soleil, Pichmich-kalé-si, et nous nous dirigeâmes
vers l'est, parmi de beaux pins espacés sur de vertes pelouses. Nous nous arrêtâmes au bout de
trois quarts d'heure dans une ferme isolée, qui appartient à un riche propriétaire de JJusrew-paeha-
khan. Le lendemain matin, nous en repartions à huit heures. A huit heures trois quarts, nous tra-
versions, marchant vers le nord-est, le petit village de Gahia, alors désert; il n'est, comme d'au-
tres villages de cette contrée, habité que de deux années l'une. Ce n'est que tous les deux ans
qu'on laboure les terres qui l'environnent. De 9 heures 25' à 10 heures 32' nous traversons une petite
plaine qu'entoure un cercle de collines; au milieu de cet espace, sur un tertre et dans les champs
environnants, nous trouvons des vestiges antiques aisément reconnaissables. Grands blocs taillés,
colonnes sans cannelures, nombreux fragments de poterie, tout indique qu'il y avait autrefois ici un
centre de population, tout au moins quelque riche bourg de l'époque romaine. Le débris le plus con-
sidérable est le soubassement d'un piédestal rectangulaire en grand appareil, qui a 4 mètres sur
5m,70. Une des assises a jusqu'à 0m,70 de hauteur. Cette plaine, où sont éparses quelques maisons
que l'on habite au temps des semailles et de la moisson, s'appelle maintenant Koulapa. La route
directe de Seïd-el-Ghazi à Husrew-pacha-khan s'y croise avec celle qui de Koutahia mène à Siwri-
hissar.
A mesure que nous avancions, les arbres s'abaissaient, la forêt se changeait en un taillis de plus
en plus clair. Au-delà de Koulapa, nous remontons sur une colline où poussent encore quelques pins,
courts et chétifs, sentinelles avancées de la vaste forêt où nous avions marché depuis notre départ de
Koutahia. Arrivés au sommet de cette colline, nous voyons se dérouler devant nous l'immense et
triste plateau que nous aurons à traverser jusqu'à Siwri-hissar. Pas un arbre à l'horizon, pas une
fumée de village, pas même ces balancements des épis, ces ondulations de la prairie qui donnent à
certaines plaines désertes une sorte de mouvement et de vie; mais une herbe courte et grise, le
silence, quelques tentes de nomades qui tachent çà et là, comme des points noirs, ces larges soli-
tudes : voilà ce qui s'offre à nous et nous serre le cœur, quand, vers le milieu du jour, nous disons
adieu à la colline et aux derniers arbres.
Les anciens avaient été frappés du caractère particulier de cette région; ils désignaient sous le nom
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