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sible que cette dénomination, sans tomber en désuétude, se soit déplacée, et qu'elle ait, si l'on
peut ainsi parler, franchi le fleuve.
Nous avons déjà détaché du récit de cette excursion ce qui se rapportait d'une part à Assarli-kaîa
et au récit de la lutte de Manlius contre les Trocmes (p. 215-21 G) , de l'autre à ces monuments
de style purement asiatique et primitif, que nous avons découverts à Ghiaour - /calé, et
que nous avons rapprochés des monuments phrygiens (p. 156-163). Nous n'avons donc
qu'à résumer rapidement cette course , qui ne nous a guère fait connaître , en dehors
d'Assarli-kaïa et de Ghiaour - kalé , que des restes de la fin de l'empire romain et des pre-
miers siècles de l'empire d'Orient. A vrai dire, ces steppes, où l'eau et le bois sont si rares, ne
paraissent guère avoir été habités par une population sédentaire, douée de quelque aisance et
groupée en bourgades et en petites villes, avant le siècle des Antonins. Cette prospérité se se-
rait maintenue jusqu'aux premières invasions musulmanes; elle aurait recommencé, une fois
ces provinces enlevées pour toujours aux chrétiens, sous les Seljoukides d'Iconium, pour cesser
de nouveau après la chute de cette brillante dynastie. Depuis une époque qu'il nous a été, malgré
toutes nos questions, impossible de déterminer, la Haïmaneh a été presque complètement occupée
par des Kurdes, qui vivent dans une sorte d'indépendance farouche, passant l'hiver dans des
maisons de terre, l'été sous des tentes de poil de chameau. On pourra suivre ma route sur la
feuille F des itinéraires.
26 septembre. Après avoir dépassé les vignes d''Esset et de Tchenghi-kaïa, nous nous trouvons
sur de vastes plateaux à larges ondulations ; le sol est jaune à perte de vue. Pas un arbre ; à
peine çà et là, dans les fonds, près de petits ruisseaux si appauvris par l'été qu'ils ne réussis-
sent même plus à faire verdir leurs bords, quelques tristes saules. Halte au petit village d'Aladjatlu.
Vers le soir seulement, l'horizon s'élargit; nous apercevons la belle masse des roches trachytiques
qui s'élèvent au nord du village de Baluk-koiuoandji, et, dans le fond, les montagnes d'Assi-
Malitch. Le village lui-même présente un aspect pittoresque ; il s'allonge dans une gorge étroite,
serré entre des pentes couvertes de rochers jetés dans un étrange pêle-mêle ; devant ses maisons
de terre, poussent des saules et des peupliers. Le village d'Assarli-kaïa, où nous allons coucher, pos-
sède, comme nous l'avons indiqué déjà (1), une végétation plus riche, de grands chênes sur les
pentes, de beaux noyers auprès des maisons. Quant à l'éminence de forme conique qui domine le
village, nous avons déjà dit pourquoi nous nous refusions à y voir l'Olympe de Tite-Live (2).
27 septembre. Les parois de ce cône, que j'escalade de grand matin, sans former de précipices,
sont partout assez roidespour être faciles à défendre. Le petit plateau qui le termine, orienté de
l'est à l'ouest, n'a que 60 mètres environ de longueur sur 40 de large. Barth, dont les données
m'avaient décidé à visiter Assarli-kaïa, fait beaucoup trop d'honneur à l'enceinte qui entoure ce
plateau en la qualifiant de cyclopéenne (3) : c'est aussi qu'il ne l'a examinée que d'en bas, avec la
lorgnette, comme il le déclare lui-même. Hamilton, qui avait fait l'ascension, n'avait rien dit de
pareil ; mais c'était lui qui avait eu la malencontreuse idée de chercher là l'Olympe de Tite-
Live (4).
Le mur est en pierres sèches, épais de 2 mètres et conservé sur une hauteur de 2 à 3 mètres.
Il ressemble à ceux que l'on fait partout encore en Orient pour soutenir la terre végétale ; il n'y
a là ni gros blocs, ni aucun agencement de joints, et les pierres ont tout au plus la dimension de
moellons ordinaires En retournant au village j'y trouvai un parc à moutons dont la construc-
tion était à peu près la même, et dont les murs étaient presque aussi épais.
(1) P. 182.
(2) P. ai5-2i7.
(3) Reise von Trapezunt nach Scutari, p. 8 r.
(4) T. I, p. 43a.
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sible que cette dénomination, sans tomber en désuétude, se soit déplacée, et qu'elle ait, si l'on
peut ainsi parler, franchi le fleuve.
Nous avons déjà détaché du récit de cette excursion ce qui se rapportait d'une part à Assarli-kaîa
et au récit de la lutte de Manlius contre les Trocmes (p. 215-21 G) , de l'autre à ces monuments
de style purement asiatique et primitif, que nous avons découverts à Ghiaour - /calé, et
que nous avons rapprochés des monuments phrygiens (p. 156-163). Nous n'avons donc
qu'à résumer rapidement cette course , qui ne nous a guère fait connaître , en dehors
d'Assarli-kaïa et de Ghiaour - kalé , que des restes de la fin de l'empire romain et des pre-
miers siècles de l'empire d'Orient. A vrai dire, ces steppes, où l'eau et le bois sont si rares, ne
paraissent guère avoir été habités par une population sédentaire, douée de quelque aisance et
groupée en bourgades et en petites villes, avant le siècle des Antonins. Cette prospérité se se-
rait maintenue jusqu'aux premières invasions musulmanes; elle aurait recommencé, une fois
ces provinces enlevées pour toujours aux chrétiens, sous les Seljoukides d'Iconium, pour cesser
de nouveau après la chute de cette brillante dynastie. Depuis une époque qu'il nous a été, malgré
toutes nos questions, impossible de déterminer, la Haïmaneh a été presque complètement occupée
par des Kurdes, qui vivent dans une sorte d'indépendance farouche, passant l'hiver dans des
maisons de terre, l'été sous des tentes de poil de chameau. On pourra suivre ma route sur la
feuille F des itinéraires.
26 septembre. Après avoir dépassé les vignes d''Esset et de Tchenghi-kaïa, nous nous trouvons
sur de vastes plateaux à larges ondulations ; le sol est jaune à perte de vue. Pas un arbre ; à
peine çà et là, dans les fonds, près de petits ruisseaux si appauvris par l'été qu'ils ne réussis-
sent même plus à faire verdir leurs bords, quelques tristes saules. Halte au petit village d'Aladjatlu.
Vers le soir seulement, l'horizon s'élargit; nous apercevons la belle masse des roches trachytiques
qui s'élèvent au nord du village de Baluk-koiuoandji, et, dans le fond, les montagnes d'Assi-
Malitch. Le village lui-même présente un aspect pittoresque ; il s'allonge dans une gorge étroite,
serré entre des pentes couvertes de rochers jetés dans un étrange pêle-mêle ; devant ses maisons
de terre, poussent des saules et des peupliers. Le village d'Assarli-kaïa, où nous allons coucher, pos-
sède, comme nous l'avons indiqué déjà (1), une végétation plus riche, de grands chênes sur les
pentes, de beaux noyers auprès des maisons. Quant à l'éminence de forme conique qui domine le
village, nous avons déjà dit pourquoi nous nous refusions à y voir l'Olympe de Tite-Live (2).
27 septembre. Les parois de ce cône, que j'escalade de grand matin, sans former de précipices,
sont partout assez roidespour être faciles à défendre. Le petit plateau qui le termine, orienté de
l'est à l'ouest, n'a que 60 mètres environ de longueur sur 40 de large. Barth, dont les données
m'avaient décidé à visiter Assarli-kaïa, fait beaucoup trop d'honneur à l'enceinte qui entoure ce
plateau en la qualifiant de cyclopéenne (3) : c'est aussi qu'il ne l'a examinée que d'en bas, avec la
lorgnette, comme il le déclare lui-même. Hamilton, qui avait fait l'ascension, n'avait rien dit de
pareil ; mais c'était lui qui avait eu la malencontreuse idée de chercher là l'Olympe de Tite-
Live (4).
Le mur est en pierres sèches, épais de 2 mètres et conservé sur une hauteur de 2 à 3 mètres.
Il ressemble à ceux que l'on fait partout encore en Orient pour soutenir la terre végétale ; il n'y
a là ni gros blocs, ni aucun agencement de joints, et les pierres ont tout au plus la dimension de
moellons ordinaires En retournant au village j'y trouvai un parc à moutons dont la construc-
tion était à peu près la même, et dont les murs étaient presque aussi épais.
(1) P. 182.
(2) P. ai5-2i7.
(3) Reise von Trapezunt nach Scutari, p. 8 r.
(4) T. I, p. 43a.
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