226 DES ETATS DE L’EUROPE
hommes et sélon les temps. Les papes sont presque
toujours des italiens blanchis dans les affaires, sans
paillons qui les aveuglent; leur conseil est compote
de cardinaux qui leur ressemblent , et qui sont tous
animés du même esprit. De ce conseil émanent des
ordres qui vont jusqu’à la Chine et à l’Amérique :
il embrasse en ce sens l’univers , et on a pu dire
quelquefois ce qu’avait dit autresois un étranger du
sénat de Rome : fai vu un confîjioire de rois. La plupart
de nos écrivains se sont élevés avec raison contre
l’ambition de cette cour; mais je n’en vois point qui
ait rendu assez de justice à sa prudence. Je ne sais
si une autre nation eût pu conserversi long-temps dans
l’Europe tant de prérogatives toujours combattues:
toute autre cour les eût peut-être perdues, ou par sa
fierté , ou par sa mollesse, ou par sa lenteur , ou par
sa vivacité ; mais Rome, employant presque toujours
à propos la fermeté et la souplelse , a conservé tout
ce qu’elle a pu humainement garder. On la vit
rampante sous Charles-Quintterrible au roi de France
Henri III, ennemie et amie tour à tour de Henri /F,
adroite avec j^ouis XHI , opposée ouvertement à
Louis XIV dans le temps qu’il fut à craindre , et
souvent ennemie secrète des empereurs , dont elle se
défiait plus que du sultan des Turcs.
Quelques droits , beaucoup de prétentions , de
la politique et de la patience , voilà ce qui reste
aujourd’hui à Rome de cette ancienne puissànce, qui
six siècles auparavant avait voulu soumettre l’Empire
et l’Europe à la tiare.
Naples est un témoignage subsistant encore de ce
droit que les papes lurent prendre autresois avec tant
hommes et sélon les temps. Les papes sont presque
toujours des italiens blanchis dans les affaires, sans
paillons qui les aveuglent; leur conseil est compote
de cardinaux qui leur ressemblent , et qui sont tous
animés du même esprit. De ce conseil émanent des
ordres qui vont jusqu’à la Chine et à l’Amérique :
il embrasse en ce sens l’univers , et on a pu dire
quelquefois ce qu’avait dit autresois un étranger du
sénat de Rome : fai vu un confîjioire de rois. La plupart
de nos écrivains se sont élevés avec raison contre
l’ambition de cette cour; mais je n’en vois point qui
ait rendu assez de justice à sa prudence. Je ne sais
si une autre nation eût pu conserversi long-temps dans
l’Europe tant de prérogatives toujours combattues:
toute autre cour les eût peut-être perdues, ou par sa
fierté , ou par sa mollesse, ou par sa lenteur , ou par
sa vivacité ; mais Rome, employant presque toujours
à propos la fermeté et la souplelse , a conservé tout
ce qu’elle a pu humainement garder. On la vit
rampante sous Charles-Quintterrible au roi de France
Henri III, ennemie et amie tour à tour de Henri /F,
adroite avec j^ouis XHI , opposée ouvertement à
Louis XIV dans le temps qu’il fut à craindre , et
souvent ennemie secrète des empereurs , dont elle se
défiait plus que du sultan des Turcs.
Quelques droits , beaucoup de prétentions , de
la politique et de la patience , voilà ce qui reste
aujourd’hui à Rome de cette ancienne puissànce, qui
six siècles auparavant avait voulu soumettre l’Empire
et l’Europe à la tiare.
Naples est un témoignage subsistant encore de ce
droit que les papes lurent prendre autresois avec tant