Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 29.1903)

EUGÈNE MÜNTZ

La disparition d’Eugène Müntz,
surpris en pleine production par la
mort, à l’âge de cinquante-sept ans
seulement, est pour la critique d’art
de ce temps une perle irréparable.
L’érudition française, dont il soute-
nait pour une si grande partie le bon
renom à l’étranger, en sentira cruel-
lement le coup, et dans son extérieure
fierté, et dans le train de scs travaux,
privée que la voilà désormais de l’aide
qu’apportait, aux recherches des plus jeunes, la personne de ce
savant éminent et serviable.

Ceux qui l’ont approché savent quels furent la douceur de son abord,
la modération de son caractère, la bienveillance de ses façons, la
sûreté de ses renseignements, l’à-propos de ses conseils. Ceux qu’il
aimait ont connu la bonté de son cœur. Tout ce qui lisait, en France
et en Europe, a mesuré l’étendue de ses connaissances et l’excellence
de sa critique.

Elle s’exercait depuis trente ans, dans une constance de production
et une égalité d’éclat que peu de ses confrères auront fournies.
Eugène Müntz était né à Soultz-sous-Forêts, en Alsace, en 1845. Il
étudia au lycée Bonaparte, depuis lycée Fontanes et lycée Condorcet,
prit le grade de licencié en droit, puis, curieux des monuments de
l’art, voyagea successivement en Allemagne et en Angleterre. Dans la