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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 10.1884 (Teil 2)

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Hymans, Henri: Le livre des peintres de Carel van Mander, [2]: Pierre Aertsen
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https://doi.org/10.11588/diglit.19702#0135

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ii4 L'ART.

Il donnait fréquemment ses œuvres à vil prix, et les plus remarquables furent acquises par
Jacques Raeuwaert.

Dans la Hollande septentrionale, à Warmenhuisen, il y avait aussi de lui un grand tableau
d'autel, un Crucifix, où, notamment, on voyait un homme qui brise à coups de hache les jambes
du larron. C'était traité avec beaucoup d'effet. Les volets extérieurs complétaient la composition.

En 1566, la populace égarée détruisit cette œuvre à coups de hache, bien que la dame de
Sonneveldt, à Alkmaar, en eût offert cent livres. Mais au moment où le tableau sortait de l'église
pour être livré à cette dame, les rustres tombèrent dessus comme des furieux et anéantirent
cette belle page.

Pierre déplorait souvent que les œuvres qu'il avait espéré léguer à la postérité fussent ainsi
détruites, se laissant aller parfois, à ce propos, à employer un langage très violent et s'exposant
de la sorte à des dangers. Il mourut à Amsterdam Tan i5y3, le 2 juin, âgé de soixante-six ans1.

Il laissa trois fils qui embrassèrent aussi la carrière artistique.

Pierre Pietersz, qui fut un très bon maître, adopta la manière de son père dont il était
l'élève; toutefois il s'appliqua beaucoup au portrait, par la raison que, de son temps, on produisait
peu de grands tableaux. Il peignit cependant la Fournaise ardente pour les boulangers de
Harlem, œuvre d'une ordonnance extrêmement heureuse2. S'il avait voulu s'y appliquer il eût
créé des choses surprenantes. Il mourut à Amsterdam en i6o3, âgé de soixante-deux ans.

C'était un homme réservé, disert, de grand sens et de savoir.

Le deuxième fils, Aert Pietersz, âgé d'environ cinquante-quatre ans, fut aussi de bonne heure
un habile artiste, détourné par le portrait — un genre dans lequel il excelle — de peindre
l'histoire, bien que ses dispositions le rendissent particulièrement apte à ce genre3.

Théodore (Dirk) Pietersz, le plus jeune des fils, était de huit ans le cadet d'Alart. Il fut
également peintre et élève de son père. Il habitait Fontainebleau, en France, et à l'époque de la
dernière guerre y a malheureusement péri.

Pierre Pietersz, l'aîné des fils précités, a laissé, à son tour, un fils portant son nom et qui
suit dignement comme peintre les traces paternelles.

COMMENTAIRE

Même en Hollande, les œuvres de Pierre Aertsen sont devenues fort rares, ce qu'il n'est permis d'attribuer que
partiellement aux destructions signalées par van Mander et qui malheureusement anéantirent les peintures les plus
importantes du maître. Remarquons, toutefois, que Pierre le Long ne peignit pas exclusivement des sujets religieux ;
qu'en réalité les scènes de mœurs occupent une place très considérable dans son œuvre; qu'il ne lui déplaît pas de
combiner les épisodes de l'histoire sacrée avec la représentation de la vie populaire de son temps.

Il existe, par exemple, une série de cinq estampes gravées par Jacques Matham d'après Pierre Aertsen *,
œuvres du plus grand mérite, dans lesquelles le peintre a relégué à l'arrière-plan les Disciples d'Emmaus, la Parabole
du Maître de la vigne, le Festin du mauvais riche, tandis que la partie essentielle de l'œuvre est occupée par des
marchés aux légumes, aux fruits, aux poissons, etc. Ce système, que nous avons vu pratiquer déjà par Joachim
Beuckelaer, permet de croire que plus d'une peinture attribuée à ce dernier émane, en réalité, du pinceau de son maître.
Beuckelaer eut une carrière fort courte et besogneuse ; il fut le collaborateur de plus d'un des maîtres de son temps;

1. Le catalogue du Muse'e d'Amsterdam nous apprend que le peintre fut enterré le 21 septembre, ainsi qu'il résulte d'une découverte
de M. Scheltema.

L'épitaphe de Pierre Aertsen, conçue en vers, disait a peu près ceci : « Le maître-peintre Pierre le Long et ses deux fils reposent ici ;
ils atteignirent un âge avancé, leur nom sera célèbre parmi les artistes. MDCLXXV. » De Jongh, dans son édition de van Mander, dit 1573-

De Meester Schilder Lange Pier
Met beyd'zyn Soonen Schilders hier,
Begraven, lang en oud bejaart
Blyven noch al in kunst vermaart.

Anno MDCLXXV.

2. Musée de Harlem, n° 1. Daté de i5y5.

3. Il y a de lui un important tableau de corporation à l'hôtel de ville d'Amsterdam. Dix-neuf peï-sonnages y sont réunis. Il est daté de
15gg. (Voyez Scheltema: Historische Bcschrijving der Schilderijen van het Raadhuis te Amsterdam, 1879, page 32, et une Leçon d'anatomie
du docteur Sébastien Egbcrts^ de Vry à l'Académie des Beaux-Arts d'Amsterdam.) Ce tableau, où vingt-neuf personnages sont réunis, est
daté de iCo3 et signé du monogramme A-P- et du trident. Aert Pietersz est mort à Amsterdam en 1612. (P. Scheltema, Historische
Bcschrijving der Schilderijen van het Raadhuis te Amsterdam (Verbeterblad), Amsterdam, 1879.)

4. Bartsch, n™ 164-168.
 
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