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L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne — 2,1.1899/​1900

DOI Heft:
No. 15 (Décembre 1899)
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La Jeunesse, Ernest: Joseph Granié
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https://doi.org/10.11588/diglit.34203#0120

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L'ART DÉCORATIF

définit, se résume, s'éternise pour l'art: il ne
s'est pas contenté de nous rendre plus vivant et
plus immatériel que jamais, humain et divin, le
Christ dans des toiles inoubliables et d'asseoir
devant l'émotion des siècles ce portrait de Mar-
guerite Moréno qui est au Luxembourg et où,
transfigurée des rêves qu'elle incarne, les yeux
chantants, les lèvres en murmure, les mains
hiératiques et cependant, frémissantes (à peine)
du frisson de l'autre vie, truchement des poètes
et poète elle-même, âme et femme, l'actrice
s'offre comme un symbole de la vie et une


J. GRAN!É

entité. Il ne s'est pas contenté de ses harmonies
de couleur, de son trait large et évocateur, de
son dessin puissant et fin, de ses raccourcis et
de ses reliefs ; cet amoureux de la perfection
a voulu trouver la perfection en sa quintessence,
ne devoir rien à la facilité. Il interrogea tout
à la fois les vieux maîtres d'Allemagne, les
moines byzantins et d'ailleurs qui, au bord des
livres saints et des vieilles chroniques, dépo-
sèrent leur respect en lents ornements et en
riches traductions graphiques d'une naïveté pré-
cieuse et documentaire. Il leur emprunta leurs
secrets, grâce à un labeur opiniâtre (et quelque

bonheur), puis héroïquement il décida non dé
les imiter, mais de les remplacer, de reprendre,
à ce crépuscule électrique d'un siècle d'affaires
et de trucs, leur tradition de patience, de sin-
cérité, qui demande tant d'abnégation, tant de
coeur — et une âme! C'est ainsi que l'en-
luminure put ressusciter, plus admirable, plus
parfaite, plus jeune que jamais. Fidèle à la devise
de M. André de Chénier :
il ennoblit les événements modernes, les pay-
sages d'aujourd'hui des procédés du passé,


ENLUMINURES SUR PARCHEMIN

apporta à la science antique le mouvement et le
dessin, le drame incessant que les siècles surent
conquérir peu à peu, le sang actif que les siècles
infusèrent à la froideur figéê, à la roideur morte
des «ùaù/Awj d'autrefois. Ses
enluminures ne sont pas un anachronisme :
qu'il nous présente en haut d'un feuillet de
vélin un homme rustiquement vêtu retenant
un cheval robuste, nous voyons immédiatement
«le seigneur de la plaine et du mont)) dont
parlent les chansons d'antan: le château blanc,
le village et le clocher doucement violacés, si
menus derrière la masse du cheval, c'est à la

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