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L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne — 2,1.1899/​1900

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No. 16 (Janvier 1900)
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Jacques, G. M.: Les limites du décor
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https://doi.org/10.11588/diglit.34203#0167

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JANVIER 1900 -(^=5-

satisfaction en face d'une simple table justement
proportionnée en toutes ses parties, dans l'épais-
seur et la saillie de la tablette, dans la hauteur
de la ceinture, dans la section des pieds, puissants
à la racine, amincis vers le sol, que ceux-là ne
se mêlent point de juger la beauté; l'instinct
du beau n'est pas en eux. C'est chez ces
âmes-là que /à? surpasse la neuvième
symphonie, la façade de music-hall Notre-Dame,
et les minauderies des sisters ëarrison la subli-
mité de Phryné. Derrière tout ce qui nous
touche par une beauté pure, il y a ce qu'Euclidr
et Pythagore ont lu dans l'apparent chaos.
L'essence de la beauté de tout ce que nos yeux
voient pénètre l'humble ouvrage que paraît cette
table.
Je me résume. Le décor nécessaire dans
l'intérieur, c'est celui des surfaces inertes et des
inutilités qui ne sont là que pour divertir notre
esprit, pour distraire nos yeux de la calme
beauté des lignes géométriques sous lesquelles
apparaissent les choses nécessaires. Celles-ci
se suffisent à elles-mêmes, sont décoratives par
le seul fait de leur nécessité et des formes issues
de cette nécessité ; sur elles, le décor, s'il existe,
ne peut être que l'accessoire, et ses prétentions
doivent s'enfermer dans des bornes modestes.
D'où cette conséquence pratique, immédiate-
ment utilisable si l'on voulait, qu'il est beau-
coup plus facile de composer irréprochablement
un intérieur modeste qu'un intérieur luxueux,
7/ZÔ777,f zZCW Aj 777gyz77.y /7'ùx-7'777^zZ7yùz7'A ZZC/ZZZ'/A-
7//u/z/ h Az r/è<2<rz/7z. Il commence,
en effet, à ne pas manquer de matériaux pour
la décoration des surfaces. On trouve sans
trop de difficulté des étoffes, des papiers, des
frises, des tapis agréablement ou tout au moins
passablement dessinés et colorés, à des prix
accessibles à la moyenne et même à la petite
bourgeoisie. Avec rien qu'un peu (très-peu!)
d'esprit inventif et de goût, tous ceux qui
veulent se composer un intérieur aimable peuvent
trouver mille ressources pour sortir de la banale
ordonnance des murs, du fâcheux papier peint
collé de haut en bas, imposant aux yeux
l'inexorable obsession de son dessin de quelle
que manière qu'ils se tournent; de ce papier
peint, cauchemar encore plus que décor. Les
meubles les plus simples du commerce (ce sont
les seuls passables) et quelques jobs bibelots entre
quatre murs bien divisés et rendus intéressants
à la bonne place, et le problème est résolu.
Ce n'est pas sur les meubles qu'il faut faire porter
les largesses; ne leur demandez que la bonne
exécution; c'est sur le décor mural, (qui n'est
lui même pas bien coûteux si l'on sait s'y prendre),
sur les tapis, les étoffes et les objets accessoires.
Qu'on excuse ces conseils terre à terre, toute

une classe de personnes peut y trouver profit :
celle où se rencontrent ces aspirations pas très-
bien définies, mais sincères vers quelque chose
de mieux que l'existant, ces bonnes volontés
qui ne demandent qu'à «marcher», et qu'on
décourage à plaisir en leur montrant, sous
prétexte d'art moderne, des extravagances quand
c'est de raisonnable qu'elles ont soif, et des
bibelots de cent francs où des objets de cent
sous bien compris feraient l'affaire. C'est à
ceux-là que ces lignes s'adressent.
Plus le rang social veut de luxe, plus la
difficulté grandit. Le petit bourgeois trou-
vera le moyen de s'arranger quelque chose de
propre s'il n'est pas dévoré d'un sot besoin
d'ostentation; mais l'homme de 30000 francs
de revenu (parlons américain, puisque le mot
exprimant la chose n'existe pas en français),
trop riche pour se contenter des petits moyens,
mais pas assez pour s'adresser à l'artiste, est
prisonnier du «beau meuble de style» et des
fausses splendeurs du magasin de nouveautés.
Il se pose donc cette question non encore
résolue et certainement la plus difficile de toutes
à résoudre pour l'art industriel moderne:
«Comment décorer rationnellement des meubles
de prix correspondant à chacun des degrés de
l'échelle sociale?* Evidemment, c'est au modelé
des pièces, ou de certaines pièces des meubles
qu'il faut demander la réponse, et non aux
décorations sculpturales ou picturales, contraires
à leur nature, — ni, comme on tente de le
faire de differents côtés, à l'exagération de
l'importance de certains détails (poignées, pen-
tures), à des applications métalliques, décor si
factice qu'il en devient puéril, dans lequel
quelques novateurs sont tombés par besoin de
remplacer par quelque chose la sculpture et la
marqueterie, dont ils ne voulaient plus. Le
modelé fournit seul une solution naturelle ; mais
si le principe est clair, je conviens que la mise
en œuvre n'en est pas facile. Aux artistes
qui viennent d'entrer dans cette voie saine,
il faudra beaucoup de tact pour trouver des
formules de modelé à la fois assez riches pour
satistaire aux besoins de représentation, et assez
sobres pour ne pas empiéter sur la souveraineté
des formes élémentaires.
Quant au décor sculptural proprement dit
sur l'objet usuel, il ne peut être que l'apanage
du plus haut luxe. Il est si difficile d'incorporer
un tel décor à l'objet et de le maintenir dans
son rôle subordonné en lui donnant cependant
un charme propre sans lequel il perd toute
raison d'être, que les plus habiles artistes devraient
seuls se permettre d'essayer; et nous avons vu
tout-à-l'heure qu'un des premiers entre les
maîtres peut iaîllir aussi bien que réussir dans
!8*

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