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Bulletin du Musée National de Varsovie — 16.1975

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Nr. 4
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Sandoz, Marc: Les peintures decoratives de la Chambre des Seigneurs du Château de Varsovie: "aujourd'hui au Musée National de Varsovie
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https://doi.org/10.11588/diglit.18860#0129
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Deux mois plus tard, Mme Geoffrin écrit au roi : "... Votre tableau de la tête de Pompée est
presque fini. Il sera exposé au Salon ; j'en suis assez contente. Je crois que celui de César et de
la statue d'Alexandre le sera aussi..."12.

Voici, en effet, paraître trois des quatre grands tableaux de Stanislas-Auguste au Salon de
176713.

Sans doute Mme Geoffrin, en bonne "maman" qui connaît bien son fils avait-elle précipité
le mouvement, et avait-elle commandé ferme les peintures pour lesquelles elle avait reçu une
provision de 2.000 thalers, sans s'attarder aux remarques du roi, faute de quoi les peintures
n'auraient certainement pas été prêtes pour l'ouverture du Salon.

Le tableau de Vien (fig. I)14 porte cette désignation : "César débaraquant à Cadix trouve
dans le temple d'Hercule la statue d'Alexandre, et gémit d'être inconnu à l'âge où ce héros
est déjà couvert de gloire. Le tableau... appartient à S.M. le Roi de Pologne." L'épisode se
rattache à la questure du César, âgé de 23 ans, en Espagne méridionale. Suétone rapporte ainsi
les circonstances : "il parcourait les lieux d'assises de cette province pour rendre la justice par
délégation du préteur, lorsque, étant venu à Cadix, il remarqua près du Temple d'Hercule une
statue d'Alexandre le Grand : il se mit alors à gémir et comme écoeuré de son action, en pensant
qu'il n'avait encore rien fait de mémorable, à l'âge ou Alexandre avait déjà soumis toute la
terre, il demande tout de suite un congé pour saisir le plus tôt possible, à Rome, les occasions
de se signaler"15.

L'artiste a, suivant les suggestions de Mme Geoffrin, très heureusement utilisé la forme ingrate
du tableau, en dressant une colonnade et une architecture dans la partie supérieure. La scène
est représentée avec aisance et naturel.

Aujourd'hui, ce grand tableau présente un certain intérêt comme monument de goût eu
peinture : on y sent à la fois la tradition et la nouveauté. La tradition est cette colonnade sertie
d'un tableau de Poussin, et le réalisme bolonais des visages du prêtre et des compagnons d'armes
de César. La nouveauté est le goût marqué pour ce qu'on appelait "le costume", et que nous
appellerions la précision archéologique, qu'enseignait avec autorité le peintre Dandré-Bardort
à l'Ecole des élèves protégés, dont Vien devait devenir le directeur en 1771. C'est une préoccupa-
tion qui vient de Rome à la suite des découvertes faites à Herculanum et à Pompéi. Il en résulte
un goût marqué pour se rapprocher de l'art antique, à l'instar de Raphaël, mais plus particulière-
ment de la statuaire antique, qu'illustrent des peintres comme Pittoni et Batoni, et dont Vien
est le meilleur adaptateur à Paris : mais le peintre français, plus conforme à l'esprit de Le Sueur,
compose une scène calme, où sommeille la nostalgie séculaire du "classicisme". Notons qu'un
sujet analogue, sinon peut-être le même, avait été traité par Sebastien Bourdon (1616-1671):
Auguste devant le tombeau d'Alexandre (Musée du Louvre, Catalogue Briere (1924) no 74, page 17).

Ce néo-clasicisme français avait fait son apparition avec éclat dans la grande peinture de Vien
(fig. 2), parue au Salon de 1757 : Proserpine ornant la statue de Cérès, sa mère, avec des fleurs qu'elle
et ses compagnes viennent de cueillir : Pluton en devient amoureux. Ce tableau est au roi et est

12. Lettre du 3 août 1767 (Correspondance... op. cit., p. 302).

13. Cf. lu critique de Diderot au sujet des tableaux commandés par le roi dans Diderot Salons, texte établi et présenté par
J. Seznec et J. Adhèmar, III, Salon 1767, Oxford 1963 ; texte publié ici-même, pp. 118.

14. Joseph-Marie Vien, César devant la statue d'Alexandre, signé : J.M. Vien ; toile, 298 X 158,5 cm ; Musée National de Varsovie,
no inv. 130912. Publié: Estournet 1767; L. Dussieux, Les artistes français à l'étranger, Paris, 1856, p. 92 (mentioné
au chapitre "Allemagne, eleetorat et royaume de.Saxe*'); Correspondance... op. cit.; L. Réau, Histoire de l'expansion de
l'art français moderne, Le monde slave et l'Orient, Paris, 1924, p. 30-32 ; T. Mańkowski, op. cit, no 868; K. Broki, Prze-
wodnik po Zanku Królewskim u' Warszawie, Warszawa, 1936, p. 56 ; H. Bardon, "Les Peintures à sujets antiques au
XVIIIe siècle d'après les livrets de salons", Gazette des Beaux-Arts, VI/LX1, 1963, p. 233 ; Diderot op. cit., III, p. 11,
19-20, 84-87 ; National Museum of Warsaw, Catalogue of Paintings, Foreign Schools, Warsaw, 1969-1970, no 1381 ; Sztuka
francuska w zbiorach polskich 1230-1830, Muzeum Narodowe w Poznaniu, Poznań, 1973 (catalogue de l'exposition), no 60.

15. Suétone, De vita duodecirn Caesarum Libri XII, Liber I, Caput VII (ed. II. Ailloud, Paris, Les Belles-Lettres, 195]).

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