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Bourgery, Jean Baptiste Marc; Jacob, Nicolas Henri [Hrsg.]
Traité complet de l'anatomie de l'homme: comprenant la médicine opératoire (Band 6, Text): Médecine opératoire — Paris, 1837

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https://doi.org/10.11588/diglit.18363#0010
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1

DISCOURS PRÉLIMINAIRE.

en est au défaut d'harmonie entre les hommes de talens
divers, mais étrangers au langage et aux habitudes l'un de
l'autre, qui doivent concourir à leur exécution. En géné-
ral , l'artiste, pour exercer son crayon, ne se croit pas obligé
de comprendre la science, tandis que le savant, fort de son
idée, nette et lucide dans son esprit, mais souvent peu fa-
milier avec les moyens de traduction graphique, s'épuise
en vain à se faire comprendre du dessinateur dont il at-
tend des résultats incompatibles avec les ressources de son
art. Aucun plan général ne pouvant être convenu d'avance
entre des esprits si différens, il faut bien que l'oeuvre té-
moigne du désaccord entre la fin et le moyen, et de l'ab-
sence d'une idée unitaire qui ait présidé à sa composition.
Loin de nous la pensée de blâmer ou de critiquer qui que
ce soit : nul ne peut tout savoir, et sur-tout nul n'est tenu
de connaître ce qui n'a pas dû entrer dans le cercle de ses
études. L'inhabileté dans ce cas n'est pas le fait des colla-
borateurs, souvent fort distingués, chacun dans sa spécia-
lité, mais le résultat inévitable du genre d'éducation in-
verse qu ils ont reçue. Si les exemples d'une harmonie
convenable de connaissances, et en quelque sorte d'une
alliance ou d'une fusion d'esprit entre les savans et les ar-
tistes, pour coopérera une même oeuvre, sont encore si
rares; si ces deux sortes de capacités auxiliaires, ou plutôt
complétives l'une de l'autre, se sont toujours tenues isolées,
c'est que jusqu'à présent on n'avait pas évalué assez haut
les services que le dessin pouvait rendre aux sciences et
aux arts qui en dépendent. Quelques hommes éminens, et
parmi eux il suffit de nommer l'illustre Bichat, prévenus
contre l'emploi scientifique de 1 'iconologie, et malheureuse-
ment trop justifiés dans leur opinion par tant de mauvaises
planches qu'ils avaient pu voir, en condamnant dans leurs
écrits ces sortes de représentations, ont peut-être beaucoup
nui aux progrès des sciences naturelles. Heureusement,
grâce à l'influence d'esprits non moins excellent, Mascagni,
Scarpa, Soemmerring, Cuvier, A. Cooper, Dupuytren,
C.Bell, Breschet, Magendie, et tant d'autres en différens
genres, parmi les jeunes savans dont les titres se pressent,
mais qu'il serait trop long de nommer, par-tout aujourd'hui
on peut signaler une tendance contraire, et désormais in-
vincible, qui promet les résultats les plus heureux pour
l'avenir.

Au reste, en ce qui concerne plus particulièrement la
médecine opératoire, s'il s'agissait de discuter les incon-
véniens de l'inexpérience en iconologie, il serait facile de
démontrer historiquement par des faits à quel point l'infir-
mité à comprendre le dessin entraîne l'incapacité de se
former des images vraies : inconvénient grave pour le chirur-
gien, qui ne doit jamais agir que guidé par une image nette,
préconçue dans son esprit. Delà tant de fautes, d'hésitations
ou d'erreurs dans la pratique d'opérations, dont quelques
unes néanmoins sont devenues célèbres, parfois même
malgré leur insuccès, parce que l'auteur n'avait pas jugé à
propos d'en faire connaître toutes les circonstances.

Ainsi, outre les avantages propres de l'iconologie, on ne
saurait trop se convaincre à quel point les habitudes
d'esprit qu'elle entraîne sont précieuses pour exercer à
combiner des images. C'est une grande erreur, et trop
communément partagée, de croire (pion sait l'anatomie

d'une partie seulement parce qu'on l'a souvent disséquée.
Le nombre est considérable d'anatomistes qui compren-
nent chaque détail isolément, mais dont l'esprit se refuse
à les grouper et les coordonner dans un ensemble. Les
hommes parvenus à cet état ne sont jamais que censés
savoir, mais, par le fait, ils ignorent, et, soit par la nature
de leur esprit ou par le résultat de leurs mauvaises habi-
tudes d'observation, ils ne s'aperçoivent même pas que
d'autres retiennent mieux, et se trouvent, quant à eux,
frappés d'un arrêt de développement et incapables de
progrès à l'avenir.

S'il nous était permis de constater l'influence que nous
croyons avoir exercée à cet égard, et de nous applaudir d'un
excellent résultat auquel nous espérons avoir concouru,
nous dirions que, depuis le commencement de la publica-
tion de notre ouvrage, nous pensons avoir contribué, par
notre exemple, à propager dans le public médical le goût et
l'intelligence de l'iconographie. Tous les jours, et sur quel-
ques centaines de personnes, nous remarquons un progrès
régulier dans ce genre de connaissances. Le même pro-
grès se manifeste dans les planches qui se publient, et où,
sans parler de celles qui ne sont que des copies de notre
ouvrage, plus ou moins ingénieusement déguisées, nous
pouvons réclamer net la part d'emprunt qui nous appar-
tient dans la manière dont y sont représentés les objets.
Personne ne se contenterait plus aujourd'hui de ces figures
dont l'étrange naïveté faisait honte au bel art du dessin,
qu'elles auraient pu faire supposer encore au berceau.
Cependant, quoique ces tristes ébauches, comme le pensait
Bichat, fussent bien plus propres à fausser le sens iconolo-
gique qu'à le féconder, tout le monde, il y a moins de dix
ans, les louait et les admirait de bonne foi, et cela, d'un
concert tellement unanime, qu'il est douteux que les plus
beaux ouvrages que l'on pourra faire à l'avenir soient
jamais accueillis avec les fastueux éloges dont ceux-là ont
été salués à leur apparition.

Toutefois, écartant la question de l'utilité, aujourd'hui
bien reconnue, ce n'est pas une œuvre facile qu'un traité
iconographique de médecine opératoire. L'objet que l'on se
propose étant de faire comprendre ou supposer, par le
dessin, une succession demouvemens, l'opération, même
la plus simple, offre, pour la représentation, bien d'autres
difficultés que les préparations les plus compliquées de
l'anatomie, où l'immobilité du modèle s'accorde si bien avec
les moyens et les possibilités de l'art du dessin.

D'un autre coté, dans un sujet si délicat, et qui touche
de si près aux intérêts et à l'amour propre des auteurs, qui
peut s'assurer de posséder assez de tact pour glisser toujours
avec bonheur entre les droits et les prétentions, sans blesser
des susceptibilités, des illusions ou des croyances honora-
bles, et surtout sans être injuste ni servi le à l'égard de qui
que ce soit ? Quelque réserve que l'on y apporte, on ne
peut toujours éviter de se placer comme arbitre entre des
prétentions rivales, et, malgré soi, partagé entre les égards
si respectables dus aux auteurs et le devoir d'être vrai en-
vers le public, incertain, au milieu de faits palpitans d'ac-
tualité , de posséder toujours le dernier mot, que tant d'in-
térêts couvrent d'un voile impénétrable, quelque bonne
foi que l'on y apporte, on se trouve souvent dans un singu-
 
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