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Bulletin de l' art pour tous — 1888

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No 35 (Novembre 1888)
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BULLETIN DE L’ART POUR TOUS

(Sxpo^iïtcm^ 4- fTfcu^ée^

L’exposition rétrospective de l'Art français
en 1889

Les travaux de préparation de l’exposition ré-
trospective de l’art français en 1889 sont très avan-
cés, et tout fait prévoir que cette exposition sera
complète. Voici quelle est la méthode adoptée par le
commissariat des Beaux-Arts pour le recrutement
des œuvres qui doivent figurer à celte exposition.
Dès le mois de juillet dernier, M. Anton in Proust a
demandé au ministre de constituer une commission
composée de douze membres pour rechercher* dans
les musées nationaux les œuvres qu’il est indispen-
sable de leur emprunter et qui doivent aider à dé-
montrer ce qu’a été l’école française au cours du
siècle qui vient de s’écouler. En même temps que
cette commission fonctionnait, on faisait, au palais
de l’Industrie, un relevé de tout ce qui mérite d’être
signalé dans les musées des départements, dans les
monuments publics et dans les collections privées de
France et de l’étranger.

Le commissariat des Beaux-Arts demande en ce
moment au ministre d’adjoindre à la première com-
mission nommée au mois de juillet, une seconde
commission composée des inspecteurs et des con-
servateurs des musées de départements, et une troi-
sième composée des possesseurs de collections. Ces
diverses commissions, formant la grande commission
de l’exposition rétrospective, pourront faire leur tra-
vail rapidement au moyen des fiches rédigées par les
soins du commissariat. Ce qu’il est permis de dire
dès aujourd’hui, c’est que presque tous les collec-
tionneurs pressentis ont répondu favorablement à
l’appel qui leur a été adressé. M. Antonin Proust a
proposé, d’autre part, au ministre, de convoquer une
commission dite du catalogue et qui, dès mainte-
nant, rédigerait les éludes et notices qui prendront
place dans le catalogue de l’exposition rétrospec-
tive de l’art français. Dans toutes ses communica-
tions, le commissariat insiste sur la nécessité non
pas de l'aire une exhibition nombreuse d’œuvres
d’art, mais de montrer par un choix rigoureux la
puissance et l’éclat de l’école française au cours de
notre siècle.

Exposition d’art monumental à Bruxelles

A l’occasion du grand concours des Sciences et de
l’Industrie — ouvert en ce moment à Bruxelles — le
gouvernement belge a ouvert une Exposition d’art
monumental, c’est-à-dire de travaux décoratifs appli-
qués aux monuments publics.

« Les œuvres réunies dans le département des tra-
vaux décoratifs, dit le correspondant de la Chronique
des Arts, dégagent un enseignement qu’il m’a paru
utile de consigner ici. Disons d’abord que, grâce à
l’empressement des artistes et au concours des muni-
cipalités étrangères, on a pu rassembler les ma-
quettes et les cartons de quelques-uns des principaux
travaux d’art décoratif de ces derniers temps. Déjà, à
Bruxelles, en 1861, une tentative analogue avait ou-
vert la voie; on s’était borné toutefois, alors, aux car-
tons d’un certain nombre de maîtres allemands et
français. L’exposition actuelle élargit le champ de
l’étude en y faisant participer non seulement la pein-
ture, mais la sculpture, et en adjoignant aux maîtres
étrangers les artistes belges, dont les œuvres, jusqu’à
présent, avaient été rarement réunies.

« Tout d’abord, il convient de fixer la caractéris-
tique des principales écoles en présence. Ce serait
méconnaître l’évidence que de mettre en doute la
prééminence de l’art décoratif français sur les travaux
similaires des aulres pays. Il a pour lui la grâce et le
charme, la vie dans le mouvement et une vie qui, s’af-
franchissant de la stricte imitation des devanciers,
évolue dans le sens d’une modernité fine et subtile.
Si quelquefois il échoue dans un certain maniérisme
non exempt de mièvrerie, du moins il s’efforce à re-
nouveler les traditionnels canons en s’inspirant des
milieux pour lesquels il travaille et en reflétant le
goût contemporain pour les formes curieuses et jolies.
Il recherche en peinture les taches claires et vibran-
tes, les colorations en bouquet, les aspects riants, une
certaine volupté pour l’œil et qui éveille en l’esprit
des sensations heureuses. Par là, il se rapproche de
l’une des conditions essentielles de l’art décoratif en
ses applications aux édifices privés, je veux dire le
besoin d’éveiller par des images Séduisantes l’aspira-
tion à une vie intellectuelle plus haute et plus raffi-
née. Cependant — on s’en aperçoit bien à Puvis de
Chavannes — il ne répugne pas à un effort plus sé-
vère. La décoration des édifices publics, en le con-
traignant à restreindre sa fantaisie, le porte vers des
combinaisons où éclate la même tendance à renou-
veler les modes expérimentés. Et dans la statuaire,

,p\j

c’est encore le parti pris d’une plastique dég3» J

des choix h1311


l’imitation et qui s’attache à
d’attitudes et de lignes, où se fait jour une
rare modernité.

« Avec les Allemands, nous pénétrons da"^
esprit tout différent. Le sens décoratif, si cia" ,
lumineux en France, chez eux est circonscrit el%
arrangements classiques et littéraires qui vise^J
à la symétrie qu’à l’impression décorative proprU
dite. 11 n’est pas permis de contester leur réellee J
lion ; mieux que personne, ils s’entendent à J’e"j
ciler archaïquement une époque ; on pourra'1
qu’ils possèdent toutes les qualités négatives d" ,
savoir : ténacité, inspiration réflexe. Ce q"1
échappe, c’est presque toujours le sentiment U
vie immédiate, la perception des atmosphères i"16,
tuelles du temps où ils vivent,— et dans la d"6
lion, — l’heureuse faculté, si française, de sti""1 J
sensation. Ils semblent travailler dans une cav">,
des prestiges du grand jour, loin delà nature, 1°^

leurs contemporains. La plupart s’en tiennent3

101

répétitions, à des ordonnances de la Renais"3
recherchent les formes ampoulées et redonda3
canalisent en de froides académies le grand je,
ri eux d’un Michel-Ange. Pour les autres, ceux
risquent à la vie moderne, ils y apportent un j,
nisme patient et sérieux, mais sans inséniosiF’ ■
qualités de mise en scène bien équilibrée et ,
traordinaire indigence de coloris. Il n’est pas
lout le compartiment allemand, une seule mad'U
qui puisse, à ce point de vue delà couleur, nv3 ,
avec la saveur de la moindre esquisse de Fr8 |
Tonalités mortes et lourdes, aspects crus et vi° j(
gammes achromes et veules, il n’y a presque J
autre chose. Leurs motifs décoratifs se conih’U
comme des motifs de tableaux. Ce sont des ca1
sur lesquels on a répandu une couleur arbitrai1'6
insipide. J

« Quant aux artistes belges, l’exposition est F
être moins renseignante qu’on ne l’eût souba'16'
part Leys et MM. Swerts et Griffens, l’élément d61
ratif— dans son sens le plus large — semble 3
été sacrifié au profit d’une simple exhibitio" .
tableaux commandés pour les édifices publics- 11 q
eu ici confusion: un tableau, certes, peut conc ,
à la décoration d’un édifice, mais il n’en constitué
partie intégrante. Le gouvernement, il est vra" >
paraît guère avoir encouragé la peinture décora11.

depuis quelque vingt ans; et, d’autre part, le go"1
tableaux s’est si universellement répandu, q"e

»

Nous étions, pendant nos travaux, restés étrangers
aux discussions des savants qui se développaient à
celte époque autour de cette question, comme aussi
à toute influence étrangère, en sorte que les Notices
sur le résultat général de nos recherches, que bientôt
après mon retour, je livrai à l’impression (en 1834)
sous forme de brochure, apportèrent une sorte de
diversion inattendue dans la lutte engagée.

Cependant, cet écrit, rapidement jeté sur le papier,
ne devait servir que comme annonce d’un ouvrage
sur la polychromie qui, en trois volumes, devait com-
prendre l’art grec, l’art étrusco-romain et celui du
moyen âge.

La publication de cet ouvrage ne s’est jamais effec-
tuée, quoique la première livraison fût complètement
prête à paraître ; elle se trouve en quelques exem-
plaires dans des bibliothèques publiques et privées.
Plusieurs causes extérieures se contrariant, et des
considérations personnelles me déconseillèrent de
continuer mon travail.

Il n’y aurait aucun intérêt général à rappeler les
premières : qu’il me soit permis de dire quelques mots
des secondes pour ma justification, ce qui peut se
faire sans m’écarter de mon sujet.

D’abord, le plan de l’ouvrage annoncé n’était pas
d’une conception heureuse. Il eût fallu un plan plus
général, embrassant la polychromie de tous les temps
et de tous les pays, ou bien se réduire en des limites
plus étroites encore.

Pour commencer un travail sur un plan plus large,
il semblait que la matière manquait encore en géné-
ral: d’autre part, j’étais convaincu de l’insuffisance de
mes forces, de mon temps et de mes moyens, dé-
pourvu d’aide comme je l’étais, pour maîtriser, même
d’une façon satisfaisante, les documents que j’avais
devant moi.

Je me serais donc volontiers borné à la communi-

collection la plus complète et la plus digne de foi qui existe sur
la polychromie. L’esprit d’ordre de Goury, une de ses vertus, fait
supposer que certainement tout s’y trouve préparé pour être pu-
blié. Ces dessins, que sont-ils devenus après sa mort?

J cation de mes dessins sur les antiquités d’Athènes
j avec quelques compléments sur la polychromie des
anciens. Mais, rien qu’à cause de leur parenté histo-
rique avec des ouvrages d’autres époques et d’autres
j nationalités, la compréhension nouvelle de l’Antique
S qui s’en dégageait et qui répondait si peu aux con-
ceptions de polychromie ayant cours alors, eût suffi
pour les faire apprécier comme une œuvre s’élevant
de fort peu au-dessus d’une utopie ordinaire.

Mais plus encore que la critique des savants et des
connaisseurs, je redoutais l’inintelligence des enthou-
j siastes. En réalité, les premiers essais polychromes,
i en Allemagne, n’étaient pas faits pour encourager
mon entreprise, si bien que je commençai à douter
qu'elle fût bien en conformité avec son époque. Ils
éveillèrent en moi une telle épouvante (1), que j’ai,
depuis, dû renoncer à toute envie d’appliquer la
) polychromie antique, et je dus suivre plus volontiers,
j dans mes décorations, les traditions des anciens Ila—
j liens, unies à l’emploi des matériaux colorés, là où
j les circonstances le permettaient, comme répondant
; le mieux aux conditions actuelles de la peinture con-
j temporaine.

Par bonheur, l’enthousiasme philhellénique s’était
' alors déjà éteint, et la polychromie des Grecs dut
j céder la place à la polychromie du moyen âge.

Je pense qu’en Allemagne celte direction fut d’abord
occasionnée par la restauration du dôme de Bam-
J berg, où l’on retrouva les anciens ornements romans,
et beaucoup de traces de peinture aux statues et bas-
(, reliefs. Pour cette période de l’art on ne manquait
! pas de points de repère, principalement en Italie, et
les essais faits dans ce style, qui s’ensuivirent, ne
réussirent pas aussi mal que les essais de style grec,

! quoique, ici encore, il n’y eût aucun avenir à espé-

(1) Les divers systèmes de la polychromie antique trouvèrent
leur application pratique. Tandis qu’ici se produisait comme du
pur grec un très joli style de confiseries éventées, ailleurs se pré-
lassait un style de boucherie rouge sang-, prétendant au grec
' comme pas un autre.


rer: car on n’avait compris que les caractères SpL
fiques de ce style, ses rudesses et ses raideurs, a"
des grands principes ayant cours partout, qu’il 1
ferme.

La polychromie gothique trouva ensuite scs
riens, en France principalement, où récemment J
puis qu’on y fait beaucoup pour la restauration ri
églises gothiques, s’est formée une école roman11^
d’architectes. Avec l’habileté propre à cette nall,J|
furent exécutées des restaurations polychromes dc
verses églises romanes et gothiques, parmi lesqd6U
la Sainte-Chapelle se distingue par l’abondance e
richesse de son système polychrome, documep16
par les vestiges mis à jour.

C’est ainsi que le moment favorable pour la p"L
cation d’un ouvrage sur la polychromie antique
passé, et des considérations décourageantes a va1
pris la place de l’ardeur juvénile. j.’

Il semblait que la création de Prométhée, redev"'" ^
statue inanimée, devait alors, sur l’appel d’un entbj
siasme récent, environnée de rayons brillants et C<1 ^
rés, descendre de son piédestal parmi nous. Ma|3,|
divine image se résoud en des formes grimaçai'1 !
L’homme avisé, de l’heureux Empire du M'1' j|
abaisse devant elle son regard et nie l’apparilio"' ,
retourne à son cabinet d’antiques auprès de sa st" ' j
blanche, qui se laisse comprendre et toucher, do"1,
peut décomposer anatomiquement et motiver esth6 i
quement. les beautés: il s’en sert pour prouver, de'f3|,
des dames et devant des messieurs, comment et p"
quoi les Grecs furent une nation plastique, et acco1'6
à l’occasion, qu’Hèlène portait une tunique à bord3
de couleur.

L’artiste désintéressé attend vainement que le
riage se transforme en un beau harmonique. F ^
est impossible de revenir à ces idées anciennes cl
séparant l’Art de la Vie, permettaient du moi"5 ^
celui-ci, à notre époque si peu harmonique et si P£
artiste, une sorte d’existence à part. (A suivre.)
 
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