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AVANT- PROPOS.

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empire, la marche en ayant n’est pas contestable, malgré des fadeurs sans nombre dont
nous sommes encore environnés.
Quant à l’orfèvrerie ecclésiastique et la chasublerie, une impulsion vraiment puissante leur
fut donnée en France par mon ancien collaborateur durant les dernières années de sa vie.
Les tissus ornementés en ont ressenti le contre-coup, qui ne fera peut-être que s’étendre,
si les frivolités du goût actuel sont peu viables, comme j’aime à le croire pour l’honneur de
l’avenir. Le P. A. Martin avait été vivement pressé en Angleterre, par l’illustre cardinal
Wiseman, de faire appel au goût du clergé français, pour modifier parmi nous, dans une
sage mesure, la forme un peu dénaturée des vêtements ecclésiastiques. Il s’agissait d’adopter
modérément la chasuble plus ample et plus flexible du moyen âge, de préférer pour les
orfrois des broderies empruntées à l’art du xme siècle L M. Yiollet-le-Duc et autres n’ont pas
laissé de contribuer pour leur part à ce retour, quoique plus tard et avec moins d’activité,
si je ne me trompe. Mais mon ancien collaborateur jugea même qu’il importait de modifier
la passementerie et les grands tissus de soie pour ne plus tailler chapes ou chasubles dans
des étoffes à fantaisies profanes. Plusieurs modèles de sa main furent accueillis avec plaisir
par des fabricants de Lyon, qui n’ont pas eu, je crois, à regretter ce retour vers un style
plus religieux et plus franc. Bien des ornemanistes, parfois à leur insu, ont exploité les
motifs mis en circulation de la sorte; et souvent de simples ouvriers ont signalé tout de
suite la vraie source de ces pseudo-inspirations. Quelqu’un de l’atelier disait à première
vue: « C’est du Martin, ça ! »
Beaucoup plus fin qu'il n’en avait ordinairement la mine, avec son visage ouvert, ses
distractions fréquentes et ses brusqueries (parfois calculées), il a été çà et là exploité par
quelque industriel ou praticien, qui mettait comme en coupes réglées ce curieux talent.
Mais il s’en doutait un peu, en définitive ; et ne se livrait que mollement à des instances
qui lui paraissaient trop intéressées. Ceux donc qui ont critiqué plusieurs de ses com-
positions doivent savoir ce qu’il répondit souvent à mes remarques, quand je le pressais
de donner une forme achevée à des conceptions trop peu mûries : « Bah ! pour ce que
» j en retire, s’imagine-t-il que je m’en vais passer mes journées à lui combiner des
» plans qui soient le dernier mot d’un projet possible ! » Là-dessus il arrêtait ses ébauches,
quoique je prétendisse le pousser jusqu’au type définitif de ce qu’il avait entrevu de loin,
fout en voulant faire face à des frais considérables pour ses gravures sur bois, il ne se
oOuciait point de rêver longtemps une œuvre accomplie sur commande où il se trouvait

1. C’est ce qui lui fit publier, parles soins deM. Hubert
Ménage, un album de broderies avec des patrons dessinés
en grand. 11 prétendait ainsi combattre avec plus de suc-
cès les traditions fâcheuses ou insignifiantes qui régnaient
dans les ateliers des brodeurs, et servir les bonnes inten-
tions de plusieurs dames chrétiennes qui consacrent leurs

loisirs à l’embellissement des autels. Il semblait vouloir
augmenter ce premier recueil lorsque la mort interrompit
ses projets. Mais ses planches, faites à grandeur d’exécution,
n’étaient presque pas réalisables typographiquement et
son projet en ce genre n’a pas eu de suites, quoiqu’il pût
être utilisé.
 
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