SOURCES PRINCIPALES OÙ PUISAIT L’ART ECCLÉSIASTIQUE
DU MOYEN AGE.
Après ce qui vient d’être dit sur divers renseignements étranges dont on ne saurait
se passer pour saisir l’intention des artistes au moyen âge, il ne sera pas inutile
d’indiquer quelques-unes des sources qui alimentaient le répertoire des ateliers. Mais
qu’on ne s’attende pas à tous les détails imaginables dans une question si générale, et
qui n’est traitée ici qu’en bloc, pour ceux qui veulent être mis au courant sans
exiger qu’on leur enseigne tout (mais, tout) à forfait en quelques pages.
I. — ÉCRITURE SAINTE.
L’Ancien Testament et le Nouveau étaient bien connus des peintres ou des sculpteurs,
et surtout de ceux qui dirigeaient leur œuvre. Lorsque Bède écrit les actions des fonda-
teurs de Wiremouth et de Jarrow, il fait surtout remarquer l’intention de saint Benoit,
Biscop dans le choix des nombreuses peintures historiques qui décoraient son église1.
« Ainsi, dit-il, le plus humble des fidèles, incapable de rien apprendre dans un livre, se
remettait en mémoire notre aimable Sauveur et ses bons Saints; songeait davantage an
bienfait de l’incarnation, et descendait attentivement dans sa conscience pour parer
au terrible examen du jugement dernier. »
Nul doute que la parole du prêtre ne vint seconder cet éveil donné à l’âme par les
yeux. En ce moment, la prédication orale n’est pas l’objet de notre étude. Mais pour la
forme extérieure donnée par les vieux artistes aux faits qu’exposent ou prédisent les
Livres saints, il faut tenir compte de plusieurs légendes qui couraient le monde, ou qui
avaient crédit dans certaines provinces. Ainsi l’arbre du paradis terrestre2 aura souvent
presque toutes ses branches terminées en tête d’homme ; le tentateur aura une tête de
femme, pour causer plus insidieusement avec Ève en façon de commère; etc. Lamech
tuera Caïn d’un coup d’arbalète. Dans les pays Scandinaves, le diable se glissera parmi
les habitants de l’arche,-cramponné subrepticement aux épaules de la femme de Noé;
moyen de survivre au déluge sous un pavillon si propre à couvrir la marchandise,
1. Vita BB. abbatum Wiremuth. (Opp. ed. Giles, t. IV, les salves fraternelles des Badois) le lignum vitœ, qui a
p. 368). Cf. ibid., 375, sq. (avait, donc; pour la bonne raison susdite) chacune de ses
2. Dans YHortus deliciarum, c’est (cela était écrit avant branches terminée par une tâte humaine.
I, — 34
DU MOYEN AGE.
Après ce qui vient d’être dit sur divers renseignements étranges dont on ne saurait
se passer pour saisir l’intention des artistes au moyen âge, il ne sera pas inutile
d’indiquer quelques-unes des sources qui alimentaient le répertoire des ateliers. Mais
qu’on ne s’attende pas à tous les détails imaginables dans une question si générale, et
qui n’est traitée ici qu’en bloc, pour ceux qui veulent être mis au courant sans
exiger qu’on leur enseigne tout (mais, tout) à forfait en quelques pages.
I. — ÉCRITURE SAINTE.
L’Ancien Testament et le Nouveau étaient bien connus des peintres ou des sculpteurs,
et surtout de ceux qui dirigeaient leur œuvre. Lorsque Bède écrit les actions des fonda-
teurs de Wiremouth et de Jarrow, il fait surtout remarquer l’intention de saint Benoit,
Biscop dans le choix des nombreuses peintures historiques qui décoraient son église1.
« Ainsi, dit-il, le plus humble des fidèles, incapable de rien apprendre dans un livre, se
remettait en mémoire notre aimable Sauveur et ses bons Saints; songeait davantage an
bienfait de l’incarnation, et descendait attentivement dans sa conscience pour parer
au terrible examen du jugement dernier. »
Nul doute que la parole du prêtre ne vint seconder cet éveil donné à l’âme par les
yeux. En ce moment, la prédication orale n’est pas l’objet de notre étude. Mais pour la
forme extérieure donnée par les vieux artistes aux faits qu’exposent ou prédisent les
Livres saints, il faut tenir compte de plusieurs légendes qui couraient le monde, ou qui
avaient crédit dans certaines provinces. Ainsi l’arbre du paradis terrestre2 aura souvent
presque toutes ses branches terminées en tête d’homme ; le tentateur aura une tête de
femme, pour causer plus insidieusement avec Ève en façon de commère; etc. Lamech
tuera Caïn d’un coup d’arbalète. Dans les pays Scandinaves, le diable se glissera parmi
les habitants de l’arche,-cramponné subrepticement aux épaules de la femme de Noé;
moyen de survivre au déluge sous un pavillon si propre à couvrir la marchandise,
1. Vita BB. abbatum Wiremuth. (Opp. ed. Giles, t. IV, les salves fraternelles des Badois) le lignum vitœ, qui a
p. 368). Cf. ibid., 375, sq. (avait, donc; pour la bonne raison susdite) chacune de ses
2. Dans YHortus deliciarum, c’est (cela était écrit avant branches terminée par une tâte humaine.
I, — 34