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DU BESTIAIRE : SON ORIGINE.

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aujourd’hui. Cependant, puisque Tatien nous dit qu’il a fait un livre sur les animaux1,
et comme nous trouvons précisément un opuscule grec sur ce sujet, connu dès les pre-
miers siècles de l’Église 2, il n’est pas du tout nécessaire de recourir à quelque hypothèse
branlante pour déposséder celui qui réclame prescription. Presque toutes les traces
d’hérésie qui se peuvent reconnaître dans les plus anciens manuscrits du Physiologus
conviennent assez exactement aux détails que nous avons sur les erreurs de Tatien,
quoique nous ne puissions plus en parler d’après les pièces originales; mais les témoi-
gnages contemporains, ou à peu près, subsistent encore.
Pour la descente de Jésus-Christ sur la terre et pour son ascension (dans le cha-
pitre du Lion), chaque ordre céleste est censé lui prêter quelque chose3, et plusieurs
anges ont peine à le reconnaître. Cela sent bien le TtXvjpw/xa, ou les éons des novateurs
asiatiques et l’incarnation dérobée à la connaissance des anges 4.
Notre-Seigneur, dans le même chapitre, est ressuscité par son Père, et non par sa
propre vertu ; indice d’une tendance à rabaisser le Fils de Dieu au rang de simple
créature, ou peu s’en faut
— Ève est tentée par Adam 6, ou du moins l’origine du péché est attribuée à la
convoitise de la chair.— Dans la troisième nature du Serpent7, la moralité renferme
un texte de saint Paul qui était le grand recours des sectaires, pour excuser leurs
déportements et le mystère de leur conduite8.
— L’article Castor9 expose avec des airs de simplicité insidieuse un enseignement

1. Ibid., t. II, p. 88. Tatien (Contra Grœcos, ed. W. Worth,
n° 2Zi, p. 57), quand il parle de son livre, s’y donne préci-
sément comme moralisateur, et prétend élever l’homme
à l’intelligence du monde spirituel.
2. On fait valoir quelques prétentions en faveur de Phi-
Ion de Carpathos, d’après les Arméniens (Spic. Sol., ibid.,
p. lxiv, lxvj, etc.). Mais puisque le Physiologus était cité
avant la naissance de cet écrivain, il faudra bien convenir
que sa collaboration compterait tout au plus comme rema-
niement. De même pour saint Épiphane, qui pourrait bien
n’être intervenu que comme épurateur (s’il y a travaillé,
comme on le dit) : comprenant sans doute que ce livre
était trop répandu pour être supprimé, et qu’il fallait se
contenter de lui enlever son venin. Aussi le décret de saint
Gélase prête-t-il à conclure que le Bestiaire se lisait en
beaucoup de provinces, et passait pour écrit édifiant.
Eh bien ! tout cela ne méritait-il pas quelque discus-
sion, avec examen des motifs à l’encontre ou à l’appui ?
3. Mélanges d’archéologie, Ire série, t. II, p. 109.
On peut voir dans les Philosophumena attribués à Origène
(ed. Em. Miller, Oxford, 1851, p. 273) quelques lignes de
Tatien. Du reste, ce n’est pas le seul renseignement qui
nous soit parvenu au sujet de cet hérésiarque.
U. Il y en a trace encore dans le texte picard de Y Aimant
[Mélanges, ibid., t. IV, p. 65), en dépit d’un mot de saint
Paul, qui regarde au moins la résurrection de Jésus-Christ
{Ilebr. I, 6). Mais je ne l’ai remarquée dans aucun des mss.
grecs que j’avais copiés dès 1848, à la Bibliothèque du roi.
N’est-ce pas le y.purro; dépouillant les sphères qu’il tra-
verse de la portion de lumière qui résidait en chacune
d elles, pour amener ce renfort à la qu’il s’agissait
d aflranchir ? C’est là une doctrine Valentinienne, et l’on
sait que Tatien avait fait plus d’un emprunt à Valentin.

Selon Valentin encore, une espèce de cotisation aurait été
combinée entre les éons et l’Esprit-Saint qui conspiraient
pour former Jésus-Christ.— Cf. Iren., libr. I, cap. ii, n° 6.
Il me sera permis sans doute à cette occasion, de signaler
le Scandalum pharisaicum (si ce n’est Scandalum puerorum)
d’un docteur allemand qui jugeait intolérable la liberté
prise par moi de citer çà et là saint Irénée en latin, dans
les Vitraux de Bourges. Ce critique montrait fort innocem-
ment qu’il ignorait l’état où nous sont parvenues les
œuvres du grand évêque de Lyon. Il fallait donc même
qu’il n’eût pas lu à ce sujet les simples histoires littéraires
qui nous en parlent en gros. Mais aussi comment se refuser
la consolation de dire (surtout devant ceux qui n’y enten-
dent rien) que l’érudilicn n’est pas comprise en France !
Si ce docteur m’avait adressé cette critique, par écrit ou
de vive voix, je suppose qu’il n’aurait pas pris goût à la
répéter comme il Ta peut-être fait depuis en digne Fran-
zosenfresser.
5. Cf. Thomassin, De incarnatione, libr. VIII, cap. xr;
et libr. X, cap. xi,sq.—Schweilzer, Thesaur. Eccl.,\. Aurc0eo;
et Avacrrafftç (c’est notre Deum verum de Deo vero). —
Pétau, De incarnat., libr. XI, cap. v; et libr. XIII, cap.
xvn; etc. On peut voir aussi Rom. vi, 6; II Cor. xiii, 4;
Act. i, 13; Apoc. i, 8; etc., etc.; et le sermon de Bourda-
loue pour Pâques, sur le texte Surrexit, non est hic.
6. Mélanges d’archéologie, ibid. [Eléphant), t. IV, p.58,sv.
Tatien niait le salut d’Adam.— Cf. Suarez, De op. sex dier.,
libr. IV, cap. ix, nos 7 et 10. — Philosophumena, VIII, 16.
7. Mélanges, ibid., t. IV, p. 68, sv.
8. Aussi cela est-il atténué dans l’édition attribuée à
saint Epiphane.
9. Mélanges, ibid., t. II, p. 229, sv. Cf. Neander, Allgem.
Geschichte d. christl. Firche, 1.1, II Theil, p. 731. On pour-
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