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DU BESTIAIRE : SA FORME ARMÉNIENNE.

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L’excrément de ses entrailles 1 guérit les yeux fermés à la lumière 2. Il se trouve
quelquefois à la cour des rois. Lorsqu’un homme est attaqué de maladie mortelle, si le
charatrius détourne de lui son regard, signe funeste ! La mort va s’emparer du pa-
tient. Mais si celui-ci doit après son mal voir des jours heureux, l’oiseau le regarde,
absorbe son infirmité, et le mal est guéri.
Le charatrius est l’image de la belle figure {est le type d’une belle réalité?). Car Notre-
Seigneur est sans tache, comme il le dit lui-même : « Le prince de ce monde vien-
dra ; mais ne pourra me rien reprocher. » Il (N. S.) est venu du ciel vers les Juifs, mais
ceux-ci ne voulurent pas voir leur médecin; il alla donc aux Gentils, et guérit leurs
maladies et leurs douleurs. Crucifié, « il réduisit l’esclavage en servitude », vainquit
le démon, détruisit le péché. « Venu dans son héritage, il n’a pas été accueilli par
les siens. »
VI.— LE PÉLICAN3.
David a dit : « J’ai été comme le pélican. »
Le Physiologue enseigne que cet oiseau aime tendrement ses petits ; mais que ceux-
ci, quand ils sont devenus grands, frappent leur père et leur mère. Leurs parents
alors les frappent à leur tour, jusqu’à les tuer. Puis cette colère une fois apaisée,
ils s’affligent et déplorent la perte de leurs enfants. Vers le troisième jour 4, le père,
déchirant son côté, verse son sang sur ses petits et les ressuscite.
Ainsi, Notre-Seigneur dit par la bouche d’Isaïe : « J’ai donné le jour à des fils, je
les ai nourris, et ils m’ont méprisé. » Le Créateur nous a mis au monde, et nous
l’avons frappé; car nous avons adoré la créature au lieu du Créateur. Il est venu se
faire crucifier, versa son sang pour nous faire goûter {retrouver ?) la vie, et l’eau par
le baptême lumineux {qui transforme nos âmes, (poiuapa), et pour le pardon des péchés.

1. C’est parler comme les textes latins et grecs.
2. La jaunisse aura semblé aux Arméniens être une
simple maladie des yeux ; supposé qu’ils aient songé ici à
la jaunisse, comme paraît l’avoir fait le moyen âge. Ceci,
du reste, a l’air de n’être que l’indication d’une propriété
(nature) qui n’occupe guère le moraliste (Physiologus) dans
ses applications instructives pour les chrétiens.
3. Mélanges d’archéologie, ibid., t. II, p. 137, sv.— Spicil.
Solesm., loc. cit., p. 3â3, sq. — Augustin., inpsalm. ci. —
Pétri Damiani, loc. cit., cap. 15 (Opp. t. III, p. 815).— Pau-
lini Epist. (Bibl. PP., t.VI,p. 208).— Eucherii Formai, (ibid.,
p. 831). —Ælred., in Isai. xvi (ibid., xxm, p. 68). Mais
j’en ai cité bien d’autres, et souvent plus anciens, en
expliquant la première planche des Vitraux de Bourges
(§ 52, sv.). J’y indiquais en outre les variations multiples
par lesquelles passe cette légende sans dévier d’un thème
général longtemps reconnaissable ; et la même histoire se
pourrait reconstruire pour d’autres enseignements du
Bestiaire.
Le SpéculumEcclesiœ ne manque pas d’accorder une place
à notre merveilleux oiseau dans l’homélie pour le jour de
Pâques (fol. 122, vü) :
« Fertur etiam quod pellicanus in tantum pullos suos diligat,

Uteos unguibus interimat.
Tertia vero die per dolorem seipsum lacerat ;
Et sanguis de latere ejus, super pullos distillans, eos a morte excitât.
Pellicanus significat Deum, qui sic dilexit mundum
Utpro eo daret Filium suum unigenitum;
Quem tertia die victorem mortis excitavit,
Et super omne nomen exaltavit. »
Il est facile de reconnaître qu’IIonorius se met à l’aise
avec le symbolisme ancien ; mais il le suit toutefois dans
les grands traits figuratifs. Sous cette forme remaniée, il
n’a pas dû nuire à la fortune du Bestiaire, car nous trou-
vons ses discours au nombre des modèles employés dans
la rédaction de VHortus deliciarum due à l’abbesse Ilerrade.
En quoi je n’ai pas l’intention de décider si le livre d’Odi-
lienberg est l’ouvrage d’Ilerrade personnellement, ou si
elle n’a fait que présidera l’exécution de ce travail comme
abbesse d’Hohenbourg, ayant des chapelains disponibles
pour une besogne commandée par elle.
Ce fameux manuscrit d’Oditienberg est probablement
brûlé aujourd’hui par les bombes allemandes (septembre,
1870).
h. Ceci ne s’éloigne guère du grec et du latin, quoique
menant à peu de chose pour la moralité.

i.— 16
 
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