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MÉLANGES D’ARCHÉOLOGIE.

sacré, mettait dans ses résolutions le propos de dînera dix heures, et de souper à six.
il établit même ce règlement pour les religieuses de la Visitation. De là venait le proverbe
auquel nous avons beaucoup dérogé :
« Dîner à dix, souper à six.
Coucher à dix, lever à six,
Font vivre l’homme dix fois dix. »
On voit qu’il y aurait fort à commenter si l’on voulait faire ressortir tout ce qui s’ajou-
tait d’arbitraire à la peinture des traits dont l’Écriture sainte faisait le fonds, et où les
artistes s’accordaient de la marge, selon les écoles1. Toutefois, bien des observations
curieuses résulteraient de semblables études faites avec attention, et des experts s’en
aideraient utilement au cas de doute sur l’authenticité d’un objet d’art.
Diverses circonstances de la Passion, comme le crucifiement, prêteraient aussi
à mainte distinction qui caractérisent une époque pour l’observateur attentif. La croix
à trois clous ne se rencontre guère avant le xme siècle; et jusqu’au |xne les pieds du
crucifix sont presque ordinairement appuyés sur une planchette horizontale. Plus on
remonte vers les premiers âges de l’Église, plus on est sûr de trouver largement
étendus les bras de Notre-Seigneur mourant. Bref, certaines particularités que l’on
prendrait aujourd’hui pour insignifiantes, n’ont pas été considérées par nos ancêtres
comme facultatives. A part même le style et le faire qui se transmettent peu d’une
génération aux autres, des hommes entendus se croient sûrs de déterminer l’époque
et le lieu d’origine d’un crucifix, sur la seule draperie qui lui ceint les hanches et les
reins. Avis aux faussaires modernes qui se permettraient des pastiches ! Copier un vieux
modèle, passe encore; en mêler plusieurs pour une même composition, ce serait se
trahir presque certainement. Du reste le Calvaire nous a déjà occupé avec quelque soin
dans les Vitraux cle Bourges et dans la Ire série de ces Mélanges.
Le sens donné aux représentations historiques de l’Ancien Testament est bien quelque
chose aussi, dont il faut tenir compte pour saisir la pensée des peintres ou des sculpteurs.
Ce n’est pas toujours pour lui-même qu’un fait biblique est offert aux regards des fidèles,
le vrai but est communément ce que l’on pourrait appeler le sens superhistorique ; c’est-
à-dire, Notre-Seigneur voilé sous les figures de Tancienne Loi, et révélé dans la nou-
velle 2. Cela est si fondamental dans la doctrine constante de l’Église, que le besoin d’en
exhiber les preuves est presque une honte pour notre siècle. Si l’enseignement*d’autrefois
n’a pas été sans abus, c’est parce que Je principe général passait pour tout à fait incon-
testable; on doutait si peu de la sûreté d’un tel sol, que plusieurs y courraient comme les
yeux fermés, sans consulter les voies battues. Il y a, Dieu merci! et en bon nombre, de

1. Il doit être bien entendu que Flamands et Lombards
modernes n’ont rien à faire dans ces considérations sur
l’art du moyen âge. Les fantaisies pittoresques (ou même
burlesques) des Breughel, Bassano, Paul Véronèse même et
autres, cherchaient l’originalité en s’éloignant de la tra-
dition autant que possible. Nos vieux artistes, tout au
contraire, se piquaient fort peu d’innover; ils s'abandon-
naient à la pente insensible d’une transformation continue,
sans même en soupçonner l’impulsion irrésistible qui avait
agi sur leurs devanciers depuis des siècles, à l’insu de
tous : « Crescit occulto velut arbor ævo.

2. Presque tout le texte des Vitraux de Bourges a pour
but de faire toucher au doigt que l’art du moyen âge
latin est ordinairement inintelligible sans cette clef qui
en ouvre le sens. Les Grecs, avec une magnifique pro-
fusion de mosaïques et de peintures, couvrent de récits
bibliques les murailles de leurs églises. Pour être plus
sobres, nous n’en sommes que plus saisissants; parce que
l’Évangile, rapproché sans cesse des patriarches, indique
au simple peuple combien Jésus-Christ est grand aux yeux
du Père éternel, qui prétend le glorifier par-dessus toute
créature et le montrer toujours comme vrai médiateur.
 
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