DEUXIÈME PARTIE
LA CONDITION DE L'AFRIQUE SOUS LE RÈGNE DE JUSTINIEN
CHAPITRE PREMIER
L'ÉTAT MATÉRIEL DE LAFRIQUE BYZANTINE
Dans un passage célèbre de VHistoire secrète, Procope a mar-
qué en traits déplorables les conséquences qu'eut pour l'Afri-
que la conquête byzantine. « L'Afrique, dit-il, qui s'étend sur
de si vastes espaces, fut si complètement ruinée que le voya-
geur, sur de longs parcours, s'étonne de rencontrer un homme.
Cependant les Vandales en état de porter les armes étaient
environ quatre-vingt mille, sans compter les femmes, les
enfants, les serviteurs; les Africains qui habitaient dans les
villes, qui cultivaient la terre, qui faisaient le commerce de
mer, formaient, je Fai vu de mes yeux, une telle multitude
qu'à peine pouvait-on l'évaluer; plus nombreux encore étaient
les Maures, et tous ont péri avec leurs femmes et leurs
enfants. Le même pays a dévoré bien des soldats romains, et
beaucoup de ceux qui de Byzance avaient suivi l'armée : en
sorte qu'en estimant à cinq millions d'hommes le nombre de
ceux qui sont morts en Afrique on demeurerait Je crois, encore
au-dessous de la réalité. Q'est que Justinien, après la défaite
des Vandales ne s'inquiéta point d'assurer la solide possession
du pays ; il ne comprit point que la meilleure garantie de l'au-
LA CONDITION DE L'AFRIQUE SOUS LE RÈGNE DE JUSTINIEN
CHAPITRE PREMIER
L'ÉTAT MATÉRIEL DE LAFRIQUE BYZANTINE
Dans un passage célèbre de VHistoire secrète, Procope a mar-
qué en traits déplorables les conséquences qu'eut pour l'Afri-
que la conquête byzantine. « L'Afrique, dit-il, qui s'étend sur
de si vastes espaces, fut si complètement ruinée que le voya-
geur, sur de longs parcours, s'étonne de rencontrer un homme.
Cependant les Vandales en état de porter les armes étaient
environ quatre-vingt mille, sans compter les femmes, les
enfants, les serviteurs; les Africains qui habitaient dans les
villes, qui cultivaient la terre, qui faisaient le commerce de
mer, formaient, je Fai vu de mes yeux, une telle multitude
qu'à peine pouvait-on l'évaluer; plus nombreux encore étaient
les Maures, et tous ont péri avec leurs femmes et leurs
enfants. Le même pays a dévoré bien des soldats romains, et
beaucoup de ceux qui de Byzance avaient suivi l'armée : en
sorte qu'en estimant à cinq millions d'hommes le nombre de
ceux qui sont morts en Afrique on demeurerait Je crois, encore
au-dessous de la réalité. Q'est que Justinien, après la défaite
des Vandales ne s'inquiéta point d'assurer la solide possession
du pays ; il ne comprit point que la meilleure garantie de l'au-