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Polska Akademia Umieje̜tności <Krakau> / Komisja Historii Sztuki [Hrsg.]; Polska Akademia Nauk <Warschau> / Oddział <Krakau> / Komisja Teorii i Historii Sztuki [Hrsg.]
Folia Historiae Artium — N.S. 8/​9.2002/​3

DOI Artikel:
Boespflug, François; Załuska, Yolanta: Le Prologue de l'Évangile selon saint Jean dans l'art médiéval (IX-XII siecle): L'image comme "commentaire"
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https://doi.org/10.11588/diglit.20620#0018
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finir, nous tenterons de rassembler quelques refle-
xions sur 1’iconographie en tant que commentaire
sui generis des textes qu’elle illustre, ou en d’autres
termes, sur l’iconographie comme “exegese pictu-
rale” (3).

I. ClNQ PREALABLES

1.1. Illustration medievale du debut des evangiles

Le Moyen Age a connu et pratique deux modes
principaux d’illustration des textes de la Bibie: l’il-
lustration narratwe, qui montre, quand il y a lieu,
une “histoire” et son deroulement, et compose des
tableaux plus ou moins detailles constituant pour
ainsi dire des equivalents yisuels ou des resumes du
recit et de son scenario; et 1’illustration thematiąue,
qui veut en presenter, non plus le deroulement, mais
le ou les sens, par une ou des figures, une ou des
scenes servant d’enseigne au texte auquel elle intro-
duit.

Or, les sujets, au sens pictural du terme, de cette
illustration thematique ont ete empruntes, dans
la majorite des cas, aux parties initiales du texte a
illustrer. Le recours priyilegie au debut d’un texte,
lorsqu’il s’agissait d’en creer Tenseigne, ne fut pas
d’abord, loin s’en faut, une commodite voire une
paresse des artistes, qui se seraient tournes, sans trop
y reflechir, vers ce qu’ils avaient sous les yeux; ce
recours obeit bien plutót a une conception exegeti-
que ancienne, encore tres repandue au Moyen Age,
selon laquelle le theme principal d’un livre biblique
est enonce tout au debut de son texte. Concernant
les evangiles, ladite conception prit, a de rares excep-
tions pres3,1’allure d’un principe en vertu duquel les

3 Augustin, De consensu evangelistarum, I, 6 (CSEL, 43,
Vienne, 1904, p. 9), preconise de chercher le theme du livre
aussi dans d’autres parties du texte.

4 Ainsi Ambroise de Milan, Traite sur l'evangile de
saint Luc, ed. Dom Gabriel Tissot, SC, 45 bis, Paris, 1971, p.
40M3. C’est Augustin toutefois qui a adapte la division plato-
nicienne a la pensee chretienne: Augustin, La Cite de Dieu,
t. I, Livres I-IX, introd. d’I. B och et, trąd. G. Combres re-
vue et corr. par G. Madec, Paris, 1993 (“Nouvelle Bibliothe-
que augustinienne”, 3), p. 455—456. Cet enseignement a ete
repris entre autres par Isidore de Sevillz, Differentiarum
libri II, lib. II, XXXIX, PL 83, col. 93—94, puis dans nombre
de commentaires exegetiques medievaux.

5 Augustin, De consensu evangeli star urn..., p. 2. Sur

1'importance de cet aspect pour 1’iconographie anglo-saxonne,

J. 0’Reilly, “St John as a Figurę of Contemplative Life: Text

and Image in the Art of the Anglo-Saxon Benedictine Reform”,

dans N. Ramsey, M. Sparks, T. Tatton-B rown, ed., St

artistes caracterisaient chacun des evangiles par le
rapport que son auteur est cense avoir entretenu
avec le debut de son texte, et par son animal sym-
bolique. En examinant 1’illustration placee en tete de
chacun des eyangiles, thematique dans la plupart
des cas, il est donc indispensable d’avoir en tete cette
exegese traditionnelle. Elle seule, en effet, permet de
comprendre pourquoi ont ete peintes une Natiyite
au debut de Matthieu, une Resurrection au debut de
Marc, une Crucifudon au debut de Luc, et, enfin une
Ascension au debut de Jean. Mais cette faęon de
faire s’est appuyee sur 1’interpretation patristique du
Prologue et plus generalement du debut des evan-
giles, dont il convient maintenant de rappeler les
grandes lignes.

L2. LTnterpretation patristique du Prologue

En se referant a la division platonicienne de la
philosophie en “morale”, qui correspond au cóte actif
de la vie humaine, en “naturelle”, qui correspond a
son aptitude a la contemplation et, enfin, en “ration-
nelle”, qui constitue une sorte de synthese des deux
precedentes, les Peres de 1’Eglise attribuaient la sa-
gesse morale a Matthieu, la naturelle a Jean et la
rationnelle a Marc4. Ils etaient egalement sensibles
au fait que Jean fut 1’apótre prefere de Jesus et le
temoin oculaire de sa vie5. Selon Origene, aucun
evangeliste n’aurait montre la diyinite du Christ de
faęon aussi absolue et parfaite que Jean6. D’apres
une tradition ancienne remontant au moins a Irenee
de Lyon (fin du ne siecle)7, illustree par Jerome dans
la preface de son Commentaire sur Matthieu8, reprise
dans la preface Plures fuisse9 regulierement copiee
dans les Evangiles medievaux, puis par Augustin10,

Dunstan. His Life, Limes and Cult, Woodbridge, 1992, p. 165—
185.

6 Origene, Commentaire de l'Evangile selon s. Jean, I, 22 ;
PG 14, col. 29—32 ; ed. C. Blanc, SC, 120, t. I, Paris 1966,
p. 69-71.

7 Irenee de Lyon, Contrę les heresies, III, 1, 1, ed. A.
Rousseau et L. Doutreleau, SC, 211-212, t. 2, Paris 1974,
p. 24-25.

8 Jerome, Commentaire sur saint Matthieu, ed. E. Bon-
nard, SC, 242, Paris, 1977, p. 62: „ultimus Iohannes apostolus
et evangelista, quem Iesus amavit plurimum qui super pectus
Domini recumbens plurissima doctrinarum fluenta potavit”.

9 F. Stegmiiller, Repertorium biblicum Medii JEvi, Ma-
drid, t. 1, 1940, n° 596; ed. D. De Bruyne, Lesprefaces de
la Bibie latine, Namur, 1920, p. 155—156.

10 Augustin, De consensu evangelistarum, p. 7: “tam-
quam de pectore ipsius domini, super quod discumbere in eius
convivio solitus erat, secretum divinitatis eius uberius et
quodammodo familiarius biberit”.

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