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Polska Akademia Umieje̜tności <Krakau> / Komisja Historii Sztuki [Editor]; Polska Akademia Nauk <Warschau> / Oddział <Krakau> / Komisja Teorii i Historii Sztuki [Editor]
Folia Historiae Artium — N.S. 8/​9.2002/​3

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Boespflug, François; Załuska, Yolanta: Le Prologue de l'Évangile selon saint Jean dans l'art médiéval (IX-XII siecle): L'image comme "commentaire"
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https://doi.org/10.11588/diglit.20620#0019
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Bede11 et d’autres, Jean aurait puise sa sagesse de
la poitrine meme du Seigneur, sur laąuelle il repo-
sa pendant la Cene (Jn 13,2 5)12.

Un autre courant de l’exegese patristique suivi par
l’exegese medievale a etabli une correspondance
entre les quatre eyangelistes et les quatre “grands
moments” de la vie du Christ (Incarnation, Mort en
croix, Resurrection et Ascension) mentionnes dans
le Credo, correspondance inseparable de celle qui
etablit un rapport entre les quatre Eyangelistes, les
cherubins decrits par Ezechiel (Ez 1,6.10) et les
quatre Vivants du chapitre quatrieme de 1’Apoca-
lypse, ces derniers n’etant d’ailleurs qu’une variante
des cherubins yeterotestamentaires.

Cette exegese fut developpee pour la premiere
fois par Irenee de Lyon, dans un texte qu’il faut ci-
ter en depit de sa longueur. Les quatre figures des
Cherubins, pour lui, “sont les images de l’activite du
Fils de Dieu”. “Le premier [...] est semblable a un
lion” (Ap 4,7), ce qui caracterise la puissance, la
preeminence et la royaute du Fils de Dieu; “le se-
cond est semblable a un jeune taureau” (Ap 4,7), ce
qui manifeste sa fonction de sacrificateur et de pre-
tre; “le troisieme a un visage pareil a celui d’un
homme” (Ap 4,7), ce qui evoque clairement sa venue
humaine; “le quatrieme est semblable a un aigle qui
vole” (Ap 4,7), ce qui indique le don de l’Esprit vo-
lant sur 1’Eglise. Les evangiles seront donc eux aus-
si en accord avec ces vivants sur lesquels siege le
Christ Jesus. Ainsi, l’evangile selon Jean raconte sa
generation (cf. Is 53, 8) preeminente, puissante et
glorieuse qu’il tient du Pere, en disant “Au commen-
cement etait le Verbe, et le Verbe etait aupres de
Dieu , et le Verbe etait Dieu” (Jn 1, 1), et “Toutes
les choses ont ete faites par son entremise et sans lui
rien n’a ete fait” (Jn 1, 3). Cest pourquoi aussi cet

11 Beda Venerabilis, Hom. I, 8 (In nativitate Domini),
Opera, t. III (Opera homiletica), CCSL, CXXII, Turnhout 1955,
p. 52.

12 Cette conviction est a la base du theme iconographiąue
figurant saint Jean reposant sur la poitrine du Seigneur, qui
aboutira a la creation du “Christus-Johannes Gruppe” dans la
sculpture allemande du XIVe siecle. La litterature sur ce theme
est tres abondante. Particulierement pertinent pour notre pro-
pos: E. S. Greenhill, “The Groupe of Christ and St. John as
Author Portrait: Litterary Sources, Pictorial Parallels”, dans
Festschrift Bernhard Bischoff, Stuttgart, 1971, p. 406—416; et
pour la fin du Moyen Age surtout, Hamburger, op. cit., p. 30,
74,94-98,106-109,111,131-132.

13 Irenee de Lyon, op. cit., III, 11, 7—8, t. 2, p. 163—169.

l4Ambroise de Milan, Traite sur l’evangile de Luc...,

p. 44—45: “Plerique tamen putant ipsum dominum nostrum in
quattuor eyangelii libris quattuor formis animalium figurari,
quod idem homo, idem leo, idem vitulus, idem aquila: homo
quia natus ex Maria est, leo, quia fortis est, yitulus, quia hostia

Eyangile est rempli de toute espece de hardiesse : tel
est en effet son aspect. L’evangile selon Luc, etant de
caractere sacerdotal, commence par le pretre Zacha-
rie”13; on le voit, Irenee passe ici a un autre rapport,
celui entre les symboles et les debuts des evangiles,
abandonnant provisoirement le rapport particulier
avec la vie du Christ, sur lequel il va neanmoins ter-
miner cette section. “Les memes traits se retrouvent
aussi dans le Verbe de Dieu lui-meme: aux patriar-
ches qui existerent avant Moise, il parlait selon sa
diyinite et sa gloire; aux hommes qui yecurent sous
la Loi, il assignait une fonction sacerdotale et mi-
nisterielle; ensuite, pour nous, il se fit homme; en-
fin, il envoya le don de 1’Esprit celeste sur toute la
terre, nous abritant ainsi sous ses propres ailes (cf. Ps
16,8; 60,5). En somme telle se presente l’activite du
Fils de Dieu, telle aussi la formę de ces vivants, et
telle la formę des vivants, tel aussi le caractere de
l’Evangile: quadruple formę des vivants, quadruple
formę de l’Evangile, quadruple formę de l’activite du
Seigneur”. On notera que 1’attribution des vivants
aux Eyangelistes n’est pas encore celle qui s’est im-
posee par la suitę dans la tradition de 1’Eglise, qui al-
louera 1’aigle a Jean et le lion a Marc.

Une conception analogue est exprimee par Am-
broise de Milan14, chez qui la Natiyite est associee a
1’homme, symbole de Matthieu, la Resurrection a
1’aigle, le sacrifice [en Croixl au jeune taureau. Am-
broise ne fait pas mention de 1’Ascension. L’exegese
ulterieure comblera cette lacune. Dans un commen-
taire sur les evangiles qui fut attribue a Jeróme mais
dont 1’auteur est en realite un irlandais du VIIe ou
YIIIe siecle15, on peut lirę ce systeme de correspon-
dances: “Iesus Christus totum impleyit, homo nas-
cendo, yitulus immolando, leo resurgendo et aquila
ascendendo”16. L’idee fut reprise par des auteurs

est, aquila, quia resurrectio est.” Cette question est developpee
par K. Hoffmann, “Die Evangelistenbilder des Miinchener
Otto-Evangeliars (Clm 4453)”, Zeitschnft des deutschen Yereins
fur Kunstuńssenschaft, 20, 1966, p. 17—46 (part. p. 19—23). On
peut se referer toujours a W. Neuss, Das Buch Ezechiel in
Theologie und Kunst bis zum Ende des 12. Jahrhunderts,
Munster, 1912, p. 46 s., 108 s., 200, et a Fr. van der Meer,
Maiestas Domini, Theophanie de l’Apocalypse dans l'art chre-
tien, Citta del Vaticano, 1938, p. 223—229, 347—351.

15 Cette attribution, generalement acceptee, a ete proposee
par B. Bischoff, “Wendepunkte in der Geschichte der
lateinischen Exegese im Fruhmittelalter”, Sacris Erudiri, 6,
1954, p. 189—279 (reed. dans Id., Mittelalterliche Studien, I,
Stuttgart, 1966, p. 205—273).

16 PL 30, col. 534A. Voir aussi R.E. McNally,
“The Evangelists in the Hiberno-Latin Tradition”, dans
Festschrift Bernhard Bischoff, Stuttgart, 1971, p. 111—122
(part. 116): 1’auteur attire 1’attention sur 1’influence possible de
Gregoire le Grand sur cette exegese.

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