carolingiens, notamment par Chretien de Stavelot17
et par Raban Maur18. Au xie siecle, nous la retrou-
vons dans l’une des legendes du portrait de saint
Jean dans le Codex d’Uta (Munich, BSB, Clm
13601, f. 89v), manuscrit sur lequel nous reyien-
drons. L’exegese du xne siecle la connait egalement:
Rupert de Deutz en fait etat et rappelle que ces
quatre evenements de la vie du Christ font partie des
mysteres (sacramenta) qu’aucun chretien ne peut
ignorer19; cet enseignement est entre aussi dans la
Glosę ordinaire20 et, de la, dans la deuxieme preface
a l’evangile de Matthieu de la Bibie parisienne du
xme siecle21.
Dans le Prologue, Jean-Baptiste apparait comme
temoin du mystere du Verbe preexistant (Jn 1,6—
8.15); et au-dela du Prologue, le Precurseur est ce-
lui qui designe le Christ comme 1’Agneau de Dieu
(1, 29). L’exegese patristique et medievale fut tres
attentive aux temoignages du Baptiste et de
l’Evangeliste lui-meme - ils fourniront (l’un ou l’au-
tre, parlois ł’un avec 1’autre) l’un des themes de
1’imagerie medievale utilise comme enseigne du
quatrieme evangile (voir plus loin, notre paragraphe
sur les “Majestes”). Enfin, ii faut signaler que selon
Jeróme, dans le De viris illustribus22 et dans sa preface
au Commentaire sur Matthieu23, Jean aurait ecrit
son Eyangile a la demande d’eveques d’Asie, pour
s’opposer aux premieres heresies christologiques.
17 Christiani Druthmari, Expositio in Matthaeum
evangelistam, PL 106, col. 1259 s., part. 1264D-1265A: “Fi-
gura istorum animalium etiam Domino conveniunt, qui homo
factus est nascendo, vitulus moriendo, leo factus est resurgendo,
aąuila exstitit ascendendo”.
18 Raban Maur, De Universo, PL 111, col. 71.
19 Rupert de Deutz, De gloria et honore filii hominis.
Super Matthaeum, PL 168, col. 1311A: “ąuatuor nobis
sacramenta pietatis necessario credenda proposuit, scilicet
incarnationis sive nativitatis, passionis, resurrectionis, ascensionis
quorum nullum christiano ignorare licuit unquam aut licebit”.
20 Biblia latina cum glossa ordinaria. Facsimile Reprint, of
the Editio Princeps Adolph Rusch of Strasburg, '1480—1481, t.
4, Turnhout, 1992, p. 3-
21 Preface Matthaeus cum primo praedicasset (Steg-
miiller, op. cit., n° 589), Texte edite par De Bruyne, Prefa-
ces, p. 183—184, avec une attribution erronee a Walafrid Stra-
bon. Voir aussi Y. Załuska et alii, Manuscrits enlumines de
Dijon, Paris, 1991, p. 340—341.
22 PL 23, col. 623.
23 J e r ó m e, Commentaire sur Matthieu..., p. 64—65.
24 Ainsi, le commentaire anonyme et inedit sur la Bibie,
Paris, BNF, ms lat. 11561, f. 130: “maxime tunc hebeonitarum
(ebionites) dogma consurgens quia adferunt Christum antę
Mariam non fuisse”. Sur ce commentaire, probablement irlan-
dais, voir Bischoff, Wendepunkte... Une opinion analogue
se retrouve, entre autres, chez Rupert de Deutz, Com-
mentaria in evangelium sancti lohannis, ed. R. Haacke,
Cette conviction se retrouve dans l’exegese medie-
vale24, qui considere parfois le In principio erat Verbum
comme un argument contrę 1’heresie arienne et les
heresies en generał, comme si Jean, dans son Prolo-
gue, les avait refute toutes par avance25.
1.3. CORPUS DE RJEFERENCE
Le corpus de manuscrits enlumines qui sert de
base documentaire a cet article a ete cree par Yolanta
Załuska pour preparer un trayail sur la genealogie
du Christ selon Matthieu (Mt 1,1—17)26 *. Portant au
point de depart sur ce seul eyangile, il a ete progres-
sivement elargi aux trois autres. Pour entrer dans ce
corpus, un manuscrit doit presenter une illustration
thematique se referant au debut du texte pour au
moins l’un des evangiles, et il doit aussi contenir le
texte correspondant. Un simple portrait d’evange-
liste accompagne ou non de son symbole ne suffit
pas : car une chose de faire un portrait d’auteur, une
autre d’illustrer son texte.
En consequence, ce corpus se compose principa-
lement de livres d’Evangiles, d’Evangeliaires
(evangiles de 1’annee) et de Bibles. On y trouve en
outre des manuscrits du Diatessaron21, quelques
liyres d’heures tardifs, ou parmi les extraits des evan-
giles est copie le Prologue de Jean28, et certains
liyres juratoires29. En theorie, les commentaires sur les
CCCM, IX, Turnhout, 1969, p. 5: “irrupuerant in ecclesiam
heretici quasi in distituta pastore ovilia łupi Marcion, Cerinthus
et Ebion ceterique antichristi, qui Christum fuisse antę Mariam
negantes”.
25 Ainsi chez B e d e, Elom. I, 8 (In nativitate Domini), CCSL,
CXXII, p. 53: “Fuere namque heretici qui dicerent, si ergo
natus est Christus, erat tempus quando ille non erat”. Ainsi
encore Jean Scot, sans doute sous 1’infłuence de Bede: Jean
Scot, Homelie sur le prologue de Jean, introd., texte critique,
trąd. et notes de E. Jeauneau, SC, 151, Paris 1969, p. 229,
301, et commentaire de 1’editeur, p. 72.
26 Cf. Y. Załuska, “Antenati di Cristo”, Enciclopedia
de ll’ar te medieuale, Ronie, t. 2, 1993-
27 Concordance evangelique remontant a Tatien (IIe s.); Fr.
Boespflug et Y. Załuska, “Les evangiles dans la Bibie mo-
ralisee et le Diatessaron latin ”, Magistro et amico amici dis-
cipuliąue. Melanges offerts a Lech Kalinowski, Cracovie, 2002,
p. 427M45.
28 V. Leroquais, Livres d’heures manuscrits de la Biblio-
theąue Nationale, Paris, t. 1, 1927, p. XXIII ; R. S. Wieck et
alii, Time Sanctified. The Book ofHours in Medieval Art and Life,
New York, 1988, p. 55-59 et 158-159.
29 Des depouillements pour reperer ces derniers ont ete
menes a bien par Annę Granboulan en vue du Corpus des Evan-
giles et Evangeliaires qu’elle prepare avec Y. Załuska. Voir aussi
Y. Załuska et A. Granboulan, “Jurer sur l’evangile” (en
preparation).
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et par Raban Maur18. Au xie siecle, nous la retrou-
vons dans l’une des legendes du portrait de saint
Jean dans le Codex d’Uta (Munich, BSB, Clm
13601, f. 89v), manuscrit sur lequel nous reyien-
drons. L’exegese du xne siecle la connait egalement:
Rupert de Deutz en fait etat et rappelle que ces
quatre evenements de la vie du Christ font partie des
mysteres (sacramenta) qu’aucun chretien ne peut
ignorer19; cet enseignement est entre aussi dans la
Glosę ordinaire20 et, de la, dans la deuxieme preface
a l’evangile de Matthieu de la Bibie parisienne du
xme siecle21.
Dans le Prologue, Jean-Baptiste apparait comme
temoin du mystere du Verbe preexistant (Jn 1,6—
8.15); et au-dela du Prologue, le Precurseur est ce-
lui qui designe le Christ comme 1’Agneau de Dieu
(1, 29). L’exegese patristique et medievale fut tres
attentive aux temoignages du Baptiste et de
l’Evangeliste lui-meme - ils fourniront (l’un ou l’au-
tre, parlois ł’un avec 1’autre) l’un des themes de
1’imagerie medievale utilise comme enseigne du
quatrieme evangile (voir plus loin, notre paragraphe
sur les “Majestes”). Enfin, ii faut signaler que selon
Jeróme, dans le De viris illustribus22 et dans sa preface
au Commentaire sur Matthieu23, Jean aurait ecrit
son Eyangile a la demande d’eveques d’Asie, pour
s’opposer aux premieres heresies christologiques.
17 Christiani Druthmari, Expositio in Matthaeum
evangelistam, PL 106, col. 1259 s., part. 1264D-1265A: “Fi-
gura istorum animalium etiam Domino conveniunt, qui homo
factus est nascendo, vitulus moriendo, leo factus est resurgendo,
aąuila exstitit ascendendo”.
18 Raban Maur, De Universo, PL 111, col. 71.
19 Rupert de Deutz, De gloria et honore filii hominis.
Super Matthaeum, PL 168, col. 1311A: “ąuatuor nobis
sacramenta pietatis necessario credenda proposuit, scilicet
incarnationis sive nativitatis, passionis, resurrectionis, ascensionis
quorum nullum christiano ignorare licuit unquam aut licebit”.
20 Biblia latina cum glossa ordinaria. Facsimile Reprint, of
the Editio Princeps Adolph Rusch of Strasburg, '1480—1481, t.
4, Turnhout, 1992, p. 3-
21 Preface Matthaeus cum primo praedicasset (Steg-
miiller, op. cit., n° 589), Texte edite par De Bruyne, Prefa-
ces, p. 183—184, avec une attribution erronee a Walafrid Stra-
bon. Voir aussi Y. Załuska et alii, Manuscrits enlumines de
Dijon, Paris, 1991, p. 340—341.
22 PL 23, col. 623.
23 J e r ó m e, Commentaire sur Matthieu..., p. 64—65.
24 Ainsi, le commentaire anonyme et inedit sur la Bibie,
Paris, BNF, ms lat. 11561, f. 130: “maxime tunc hebeonitarum
(ebionites) dogma consurgens quia adferunt Christum antę
Mariam non fuisse”. Sur ce commentaire, probablement irlan-
dais, voir Bischoff, Wendepunkte... Une opinion analogue
se retrouve, entre autres, chez Rupert de Deutz, Com-
mentaria in evangelium sancti lohannis, ed. R. Haacke,
Cette conviction se retrouve dans l’exegese medie-
vale24, qui considere parfois le In principio erat Verbum
comme un argument contrę 1’heresie arienne et les
heresies en generał, comme si Jean, dans son Prolo-
gue, les avait refute toutes par avance25.
1.3. CORPUS DE RJEFERENCE
Le corpus de manuscrits enlumines qui sert de
base documentaire a cet article a ete cree par Yolanta
Załuska pour preparer un trayail sur la genealogie
du Christ selon Matthieu (Mt 1,1—17)26 *. Portant au
point de depart sur ce seul eyangile, il a ete progres-
sivement elargi aux trois autres. Pour entrer dans ce
corpus, un manuscrit doit presenter une illustration
thematique se referant au debut du texte pour au
moins l’un des evangiles, et il doit aussi contenir le
texte correspondant. Un simple portrait d’evange-
liste accompagne ou non de son symbole ne suffit
pas : car une chose de faire un portrait d’auteur, une
autre d’illustrer son texte.
En consequence, ce corpus se compose principa-
lement de livres d’Evangiles, d’Evangeliaires
(evangiles de 1’annee) et de Bibles. On y trouve en
outre des manuscrits du Diatessaron21, quelques
liyres d’heures tardifs, ou parmi les extraits des evan-
giles est copie le Prologue de Jean28, et certains
liyres juratoires29. En theorie, les commentaires sur les
CCCM, IX, Turnhout, 1969, p. 5: “irrupuerant in ecclesiam
heretici quasi in distituta pastore ovilia łupi Marcion, Cerinthus
et Ebion ceterique antichristi, qui Christum fuisse antę Mariam
negantes”.
25 Ainsi chez B e d e, Elom. I, 8 (In nativitate Domini), CCSL,
CXXII, p. 53: “Fuere namque heretici qui dicerent, si ergo
natus est Christus, erat tempus quando ille non erat”. Ainsi
encore Jean Scot, sans doute sous 1’infłuence de Bede: Jean
Scot, Homelie sur le prologue de Jean, introd., texte critique,
trąd. et notes de E. Jeauneau, SC, 151, Paris 1969, p. 229,
301, et commentaire de 1’editeur, p. 72.
26 Cf. Y. Załuska, “Antenati di Cristo”, Enciclopedia
de ll’ar te medieuale, Ronie, t. 2, 1993-
27 Concordance evangelique remontant a Tatien (IIe s.); Fr.
Boespflug et Y. Załuska, “Les evangiles dans la Bibie mo-
ralisee et le Diatessaron latin ”, Magistro et amico amici dis-
cipuliąue. Melanges offerts a Lech Kalinowski, Cracovie, 2002,
p. 427M45.
28 V. Leroquais, Livres d’heures manuscrits de la Biblio-
theąue Nationale, Paris, t. 1, 1927, p. XXIII ; R. S. Wieck et
alii, Time Sanctified. The Book ofHours in Medieval Art and Life,
New York, 1988, p. 55-59 et 158-159.
29 Des depouillements pour reperer ces derniers ont ete
menes a bien par Annę Granboulan en vue du Corpus des Evan-
giles et Evangeliaires qu’elle prepare avec Y. Załuska. Voir aussi
Y. Załuska et A. Granboulan, “Jurer sur l’evangile” (en
preparation).
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