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Gau, Franz Christian
Antiquités de la Nubie ou Monumens inédits des bords du Nil, situés entre la première et deuxième cataracte — Stuttgart, 1822

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https://doi.org/10.11588/diglit.4729#0006
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INTRODUCTION.

Uans une partie de l'Egypte et surtout en Nubie, il faut voyager sous le charme des souvenirs; il faut, par
l'imagination, restituer à ces contrées cette splendeur que révèlent ses monumens, et prêter à une nature,
maintenant aride et dénuée, la parure qu'elle put tenir d'une population active, avant que la superstition et la
barbarie eussent amené la solitude sur cette terre historique. Sans le secours d'un tel prestige, le voyageur ne
trouve autour de lui qu'une affligeante réalité : son œil, attristé par l'aspect d'un pays dépouillé de toute
végétation, fatigué par une teinte uniforme et triste, n'embrasse que des montagnes nues, des plaines brûlantes,
un désert de sable. Le climat est d'une désespérante immobilité; les jours et les nuits se succèdent sans variation-
point de pluies , et rarement de ces vents qui éteignent un peu l'ardeur des premiers feux du jour, ou rafraîchissent
son déclin : enfin ? aucun de ces phénomènes météorologiques dont on aime l'influence passagère, ne fût-ce que
pour échapper à l'uniformité de la vie.

Les productions des anciens et les mœurs des modernes portent l'empreinte de la monotonie et de l'aridité
qui s'étendent sur le sol que les derniers habitent, comme sur l'atmosphère sous le poids de laquelle on les voit
languir. Chez eux, l'industrie est nulle, parce que l'abrutissement rétrécit l'intelligence : de faibles ressources
suffisent à des besoins plus faibles encore, et la sobriété de ces orientaux est une sorte de résignation, née de la
force d'inertie qui les empêche de se façonner une meilleure situation. Si parfois l'amour du bien-être surgit de
cette permanente léthargie, rien, dans les habitudes accoutumées, ne peut le servir : incapable de créer, à
l'aide de son intelligence, l'objet qu'il convoite, l'ambitieux qui apparaît de loin en loin, songe à le conquérir
par l'abus de la force : aussi le peu que nous connaissons de l'histoire moderne de ce pays n'offre-t-il que
pillage, tyrannie et destruction.

Cependant, si l'attention de l'observateur sait percer l'enveloppe de cette civilisation négative, il aperçoit, chez
les habitans de la Haute-Egypte et de la Nubie, les traces des qualités domestiques qui distinguaient les anciens
Arabes : ils sont hospitaliers, attachés à leur religion et sobres par vertu. Il y a plus : en interrogeant avec-
sagacité leur caractère, on y retrouve endormis, mais faciles à éveiller, le courage et l'énergie dont ils se serviront
incontestablement un jour pour secouer le joug des hordes asiatiques. Ces nations, comme toutes celles, qui,
tour-à-tour, ont langui, dominé, langui de nouveau et dominé encore, n'attendent qu'une impulsion pour sortir
de la torpeur où nous les voyons plongés aujourd'hui. Les mœurs actuelles des Turcs prouvent au contraire une
décadence qui ne peut manquer d'amener la chute de leur domination. Uniquement occupés de commander,
ils n'ont aucune habitude du travail, ne se livrent à aucun exercice que les plaisirs et la débauche.

Le merveilleux plaît aux voyageurs : s'ils ne le rencontrent pas dans leurs courses aventureuses , ils se
décident à l'inventer. On a beaucoup exagéré les difficultés et les inconvéniens attachés aux excursions dans ces
climats. En effet, il est aisé de vivre en bonne intelligence avec les naturels du pays : je puis à cet égard
citer mon propre exemple. Je laissai voira ces orientaux le but ouvert et pacifique de mon voyage; je n'étalai
point à leurs regards l'appareil d'équipages luxueux qui eussent pu tenter leur cupidité; mais je n'affectai
pas, non plus, une gêne qui n'eût pas manqué d affaiblir leur considération. C'est pour s'être presque toujours
éloigné de cette conduite mitoyenne, que plusieurs de mes devanciers ont échoué dans l'entreprise dont la
 
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