REMBRANDT ET L’ART ITALIEN.
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l’antique, un volume rempli de statues dessinées d’après nature
par Rembrandt.
On reconnaîtra sans peine qu’étant donnée une nature aussi
vibrante, les voyages pouvaient passer pour superflus : une estampe
tombée par hasard sous ses yeux, il n’en fallait pas davantage pour
allumer son imagination, pour lui faire entrevoir des régions, des
mondes, qu’il n’avait jamais visités.
II.
i
!
Le fait seul d’avoir collectionné des bustes d’empereurs romains,
ou des tableaux, des dessins, des estampes, ayant pour berceau
l’Italie, ne suffit pas à établir que Rembrandt se soit inspiré de tels
modèles. Tout au plus, ses investigations nous apprennent-elles
qu’en lui l’artiste se doublait d’un amateur, d’un curieux, et que
ce qui pouvait passer pour un manque de culture était tout simple-
ment du parti pris.
J’irai même plus loin et soutiendrai que le choix de motifs
empruntés à l’Antiquité ou à la Renaissance italienne ne prouve en
aucune façon que Rembrandt ait entendu se rallier aux principes
classiques. L’influence de son maître Lastman, non moins que le
goût régnant, ont pu le décider à s’attaquer parfois à la mythologie,
ainsi qu’à dessiner d’après les marbres ou les moulages (l’inventaire
de 1656 mentionne un paquet de dessins d’après l’antique, et un
volume de dessins de statues). N’oublions pas, en effet, que dès lors
les symboles de l’Antiquité, tout cet appareil mythologique, étaient
aussi populaires à Amsterdam qu’à Rome, aussi populaires à Nurem-
berg qu’à Paris. Les grandes machines pompeuses pseudo-classiques
l’emportaient aux yeux des Hollandais du siècle de Louis XIV sur
la fraîcheur et la vivacité des sentiments.
Ainsi s’explique comment, dans l’œuvre peint de Rembrandt,
aussi bien que dans son œuvre gravé, les compositions empruntées
à la mythologie ou à l'histoire romaine abondent. Parmi les
tableaux, je citerai, d’après Yosmaer, Vénus et l’Amour, l’Enlève-
ment d’Europe (1632), l’Enlèvement de Ganymède (1635), la Nymphe
Calisto (1635), Danaé attendant Jupiter (1636), Diane et Endymion (1643),
Philémon et Baucis (1643), Vertumne et Pomone (1649), la Reine Arté-
niise (1634), deux Lucrèce (1658 et 1664), l’Entrée triomphale d’un
Général (Scipion?) (1646). Parmi les dessins, je relève : Cerès et Bubona,
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l’antique, un volume rempli de statues dessinées d’après nature
par Rembrandt.
On reconnaîtra sans peine qu’étant donnée une nature aussi
vibrante, les voyages pouvaient passer pour superflus : une estampe
tombée par hasard sous ses yeux, il n’en fallait pas davantage pour
allumer son imagination, pour lui faire entrevoir des régions, des
mondes, qu’il n’avait jamais visités.
II.
i
!
Le fait seul d’avoir collectionné des bustes d’empereurs romains,
ou des tableaux, des dessins, des estampes, ayant pour berceau
l’Italie, ne suffit pas à établir que Rembrandt se soit inspiré de tels
modèles. Tout au plus, ses investigations nous apprennent-elles
qu’en lui l’artiste se doublait d’un amateur, d’un curieux, et que
ce qui pouvait passer pour un manque de culture était tout simple-
ment du parti pris.
J’irai même plus loin et soutiendrai que le choix de motifs
empruntés à l’Antiquité ou à la Renaissance italienne ne prouve en
aucune façon que Rembrandt ait entendu se rallier aux principes
classiques. L’influence de son maître Lastman, non moins que le
goût régnant, ont pu le décider à s’attaquer parfois à la mythologie,
ainsi qu’à dessiner d’après les marbres ou les moulages (l’inventaire
de 1656 mentionne un paquet de dessins d’après l’antique, et un
volume de dessins de statues). N’oublions pas, en effet, que dès lors
les symboles de l’Antiquité, tout cet appareil mythologique, étaient
aussi populaires à Amsterdam qu’à Rome, aussi populaires à Nurem-
berg qu’à Paris. Les grandes machines pompeuses pseudo-classiques
l’emportaient aux yeux des Hollandais du siècle de Louis XIV sur
la fraîcheur et la vivacité des sentiments.
Ainsi s’explique comment, dans l’œuvre peint de Rembrandt,
aussi bien que dans son œuvre gravé, les compositions empruntées
à la mythologie ou à l'histoire romaine abondent. Parmi les
tableaux, je citerai, d’après Yosmaer, Vénus et l’Amour, l’Enlève-
ment d’Europe (1632), l’Enlèvement de Ganymède (1635), la Nymphe
Calisto (1635), Danaé attendant Jupiter (1636), Diane et Endymion (1643),
Philémon et Baucis (1643), Vertumne et Pomone (1649), la Reine Arté-
niise (1634), deux Lucrèce (1658 et 1664), l’Entrée triomphale d’un
Général (Scipion?) (1646). Parmi les dessins, je relève : Cerès et Bubona,