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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 7.1892

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Nr. 6
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Pottier, Edmond: Les Salons de 1892, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.24660#0485

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LES SALONS DE 1892.

445

Nocturnes de M. Whistler. De tous ces novateurs le plus original et
le plus puissant n’expose pas : c’est M. Claude Monet. Entre les deux
partis oscillent les tempéraments conciliants qui, sans nier la puis-
sance d’effet obtenue par les concentrations de couleur, ne veulent
point renoncer à garder aux objets leur autonomie, leur ton accou-
tumé. Telles sont, aux Champs-Elysées, les toiles de MM. Berton,
Gosselin, Nozal, Streeton, et un pastel de M. Foubert. J’ai beaucoup
goûté entre autres une étude de M. Pointelin qui a réussi à mettre
une sorte de poésie émouvante dans un paysage plat et morne, le
Pays bas du Jura : une prairie aux herbes longues et sauvages, la
courte lisière d’un bois dans le fond, un jour sombre, pas un être
vivant, cela suffit pour charmer et attendrir, tant il y a d’air et de
mélancolie dans cette toile que reproduit plus loin un fusain de l’ar-
tiste. Au Champ-de-Mars nous citerons la belle toile deM. Baertsoen,
En ville flamande, dont l’auteur a exécuté lui-même pour la Gazelle
une eau-forte que l’on trouvera ci-jointe et dans laquelle il a rendu
fidèlement l’effet du tableau, le contraste énergique des hautes
maisons noires se reflétant dans une eau qui flambe et qui se dore
sous les derniers reflets du jour mourant.

Le paysage moderne a fait une autre conquête. La sollicitude qui
pousse beaucoup de peintres contemporains à s’intéresser aux humbles
et aux déshérités du genre humain se retrouve, par une curieuse
action réflexe, chez les paysagistes eux-mêmes. La nature, en effet,
comme l’humanité, a ses pauvres honteux, en particulier aux envi-
rons des villes; la silhouette des banlieues, des fortifications, des
carrières et des rues lépreuses de faubourgs n’attire le plus souvent
l’attention du passant que par un air de vulgarité et de laideur assez
répugnantes. De généreux artistes ont entrepris cependant de prouver
que nous nous trompions, qu’un œil attentif sait surprendre, au
milieu de ces laideurs, de matinals et poétiques brouillards, de chauds
soleils où les loques se revêtent d’une inattendue splendeur. Regardez
au Champ-de-Mars la Route au Soleil de M. Raffaelli, les Paysages
suburbains de M. Billotte, la Neige à Montmartre de M. Dulac et la
Baignade au Pont Sully de M. Lepère; vous comprendrez ce qu’un œil
d’artiste sait voir dans des sites réputés banals ou tristement
vulgaires.

Pour terminer l’énumération des progrès réalisés par l’école
du plein air, il me reste à dire quelques mots des marines. Ce n’est
pas d’aujourd’hui qu’on étudie la mer : une promenade au Louvre
 
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