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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
main, puis Versailles, Trianon et Marly : il ne passe à Paris que
bien rarement et encore n’y reste-t-il qu’une demi-journée; désor-
mais on ne le voit plus jamais dans aucun théâtre. Et cependant il
adore les représentations; il s’en fait donner sans cesse, il en
donne lui-même en jouant divers rôles devant ses sujets et il fait
organiser des fêtes splendides composées de réjouissances variées,
dont le théâtre est un des principaux attraits.
Ce n’est pas à sa cour que la première de ces fêtes a lieu en
France, mais dans le château de Vaux chez Fouquet. Louis XIV en
est le principal spectateur; il en fut même dans la suite le principal
acteur puisque les splendeurs déployées en cette circonstance bles-
sèrent à ce point l’orgueil du jeune monarque que, sur l’heure, il
décida la perte de son ministre.
A Vaux fut représentée pour la première fois la Comédie des
« Fâcheux » de Molière sur un théâtre mobile *.
Au moment où la Cour, après un divertissement, se trouvait
rassemblée, ce théâtre, monté sur des galets, fut amené du fond d’une
allée jusqu’à un endroit favorable.
Il semble que dans ce parc magnifique de Vaux, la fête donnée
par Fouquet ait été une réminiscence de celles que les rois d’Espagne
organisaient dans leur palais de Buen Retiro, au commencement du
siècle.
A Saint-Germain comme à Versailles le roi fait venir tantôt la
troupe de Fhôtel de Bourgogne, tantôt celle des Italiens, tantôt celle
de Molière. Chacune d’elles joue une pièce déjà connue de son
répertoire ou bien une oeuvre encore inédite. Molière donne succes-
sivement soit au Louvre, soit à Versailles, la critique de YÉcole des
femmes, Y Impromptu de Versailles et le Mariage forcé. Dans cette
dernière comédie qui a lieu dans l’appartement d’Anne d’Autriche
au Louvre, le 29 janvier 1664, le roi assiste à la représentation et
figure ensuite dans le ballet en costume d’Egyptien.
Pour la première fois, à cette date, Molière reçoit la commande
d’une comédie-ballet qui doit tenir sa place dans une série de fêtes
données en l’honneur de Mllede la Vallière et qui prennent le nom de
1. Voir à ce sujet la lettre de La Fontaine à Maucroix où est relatée la fête de
Vaux (publiée en appendice dans le Molière de la collection des Grands Écrivains,
t. III, p. 97). Le poète admire surtout la partie de la décoration qui consiste à faire
sortir les nymphes et les déesses des marbres qui les renferme. « C’est une fort
plaisante chose, dit-il, que de voir accoucher un terme et danser l’enfant en venant
au monde. »
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
main, puis Versailles, Trianon et Marly : il ne passe à Paris que
bien rarement et encore n’y reste-t-il qu’une demi-journée; désor-
mais on ne le voit plus jamais dans aucun théâtre. Et cependant il
adore les représentations; il s’en fait donner sans cesse, il en
donne lui-même en jouant divers rôles devant ses sujets et il fait
organiser des fêtes splendides composées de réjouissances variées,
dont le théâtre est un des principaux attraits.
Ce n’est pas à sa cour que la première de ces fêtes a lieu en
France, mais dans le château de Vaux chez Fouquet. Louis XIV en
est le principal spectateur; il en fut même dans la suite le principal
acteur puisque les splendeurs déployées en cette circonstance bles-
sèrent à ce point l’orgueil du jeune monarque que, sur l’heure, il
décida la perte de son ministre.
A Vaux fut représentée pour la première fois la Comédie des
« Fâcheux » de Molière sur un théâtre mobile *.
Au moment où la Cour, après un divertissement, se trouvait
rassemblée, ce théâtre, monté sur des galets, fut amené du fond d’une
allée jusqu’à un endroit favorable.
Il semble que dans ce parc magnifique de Vaux, la fête donnée
par Fouquet ait été une réminiscence de celles que les rois d’Espagne
organisaient dans leur palais de Buen Retiro, au commencement du
siècle.
A Saint-Germain comme à Versailles le roi fait venir tantôt la
troupe de Fhôtel de Bourgogne, tantôt celle des Italiens, tantôt celle
de Molière. Chacune d’elles joue une pièce déjà connue de son
répertoire ou bien une oeuvre encore inédite. Molière donne succes-
sivement soit au Louvre, soit à Versailles, la critique de YÉcole des
femmes, Y Impromptu de Versailles et le Mariage forcé. Dans cette
dernière comédie qui a lieu dans l’appartement d’Anne d’Autriche
au Louvre, le 29 janvier 1664, le roi assiste à la représentation et
figure ensuite dans le ballet en costume d’Egyptien.
Pour la première fois, à cette date, Molière reçoit la commande
d’une comédie-ballet qui doit tenir sa place dans une série de fêtes
données en l’honneur de Mllede la Vallière et qui prennent le nom de
1. Voir à ce sujet la lettre de La Fontaine à Maucroix où est relatée la fête de
Vaux (publiée en appendice dans le Molière de la collection des Grands Écrivains,
t. III, p. 97). Le poète admire surtout la partie de la décoration qui consiste à faire
sortir les nymphes et les déesses des marbres qui les renferme. « C’est une fort
plaisante chose, dit-il, que de voir accoucher un terme et danser l’enfant en venant
au monde. »