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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 9.1893

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Nr. 1
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Lostalot, Alfred de: La princesse Clémentine de Metternich: peinture de Lawrence, gravée en couleurs par M. A. Bertrand
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https://doi.org/10.11588/diglit.24662#0044

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36

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Mme la princesse de Metternich, qui a bien voulu nous autoriser à
graver ce portrait, a eu l’extrême obligeance de nous communiquer
quelques renseignements sur le modèle et sur les circonstances où
Thomas Lawrence fut appelé à reproduire ses traits charmants.

La princesse Clémentine naquit le 30 août 1804; elle était la fille
du prince de Metternich, le célèbre chancelier d’État autrichien, et
de la princesse Eléonore, née comtesse de Kaunitz-Rietberg *. Un
jour qu’elle se promenait dans Vienne, accompagnée de son institu-
trice, elle fut rencontrée par Lawrence qui s’y trouvait alors. Frappé
de la merveilleuse beauté de la jeune fille, Lawrence se mit à la
suivre, et la voyant entrer sous la porte cochère de la chancellerie
d’État, il se renseigna auprès du portier.

Sans perdre une seconde il se fait introduire auprès du prince
qu’il connaissait beaucoup, et à brûle-pourpoint le supplie de lui
laisser peindre la beauté merveilleuse qu’il venait d’entrevoir. Le
prince hésitait, ne cachant pas que le prix auquel était coté le talent de
l’artiste l’effrayait un peu... Bref, Lawrence insista et le prince lui
permit de faire une esquisse au crayon, remettant à plus tard l’exécu-
tion de la peinture. La princesse Clémentine posa une fois seulement.
On a conservé dans sa famille le dessin de Lawrence qui est, paraît-il,
un chef-d’œuvre : la ressemblance était si frappante que les hésitations
du prince de Metternich ne tinrent pas contre son désir de posséder
la peinture. Lawrence se mit aussitôt à l’œuvre. C’était en 1819.

Le portrait était à peine terminé, quand un affreux malheur
vint frapper la famille de Metternich : la princesse Clémentine
succombait en quelques jours à une maladie de poitrine. Le tableau,
que Lawrence avait emporté en Angleterre pour en terminer les
détails, tels que l’aigle et les fonds, arriva à Vienne la veille de sa
mort qui eut lieu le 6 mai 1820. Avant de mourir, la malheu-
reuse enfant demanda à voir son portrait; après l’avoir longuement
contemplé, elle voulut qu’on lui apportât un miroir, mais après y
avoir jeté un regard, elle le laissa retomber aussitôt en s’écriant :
« Mon Dieu ! que je suis changée ! » La pauvre Hébé succombait à
l’âge de 16 ans; le monde ne l’aura connue sous d’autres traits que
ceux de la déesse de la Jeunesse que la nature lui avait donnés et
qui revivront éternellement dans la peinture de Lawrence. 1

1. M. le prince de Metternich, ambassadeur d’Autriche à Paris, de 1839 à 1871,
est le frère de la princesse Clémentine : mais il est né du second mariage du
chancelier d’État.
 
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