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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 9.1893

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Nr. 4
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Meissner, Franz Hermann: Arnold Boecklin, [1]: artistes contemporains
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https://doi.org/10.11588/diglit.24662#0337

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308

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Cette stérilité artistique du romantisme allemand a eu deux
causes essentielles. D’abord, on s’est trop souvent contenté de
transporter simplement dans l’art moderne les modèles laissés par
Durer et ses contemporains, la naïveté et le maniérisme de leur
style, sans s’occuper d’étudier plus à fond les particularités diverses
de cette peinture primitive, et les vraies sources de son action
esthétique. Son action esthétique avait ses sources'dans la profondeur
du sentiment personnel, dans l’expression volontiers humouristique
du caractère et de l’individualité, et par-dessus tout dans le soin
constant de représenter, à ,T’aide de ces qualités diverses, la vie
contemporaine. Or c’est tout le contraire que nous trouvons dans la
peinture des romantiques allemands : nous y trouvons un constant
dédain du présent, un retour absolu et irraisonné vers le passé, la
complète abdication de tout sentiment moderne au profit d’un culte
idolâtre du moyen âge, considéré comme l’unique et parfaite incar-
nation de tout art et de toute poésie.

La seconde cause de l’impuissance finale du romantisme allemand
est d’un ordre plus général et tient à l’esprit même de la race. Au
fond, le tempérament artistique de l’Allemagne est un tempérament
musical et littéraire qui avait besoin d’une longue éducation pour
arriver à s’exprimer sous une forme plastique. Aussi l’école roman-
tique était-elle condamnée à l’impuissance, faute de posséder une
technique assez développée. Issue d’un point de vue littéraire, pour-
suivant en somme un compromis entre la poésie et la peinture, elle
ne s’occupait que d’illustrer les traditions populaires, les légendes et
les mythes du moyen âge. Acharnée à fuir toutes les influences
modernes et particulièrement étrangères, elle se défendait par là
même de faire profiter sa technique des progrès obtenus dans les
autres écoles et les autres pays. Seul Cornélius ne dédaignait pas,
dès ses premières oeuvres, et malgré leur romantisme, de s’inspirer
de l'antique, dont il devait s’inspirer davantage encore, quelques
années plus tard, pour fonder notre école de peinture monumentale.
Il a été le plus grand artiste de l’Allemagne, depuis Durer. Mais,
dessinateur excellent, avec un véritable génie pour la composition,
jamais il n’a pour ainsi dire soupçonné ce que c’était que la peinture.

Phénomène singulier et très digne d’être signalé : cette école
qui a passé si vite et qui a si vite disparu sans presque laisser de
traces pour être remplacée par une école réaliste, c’est seulement
après qu’on la croyait à jamais finie qu’elle a produit sa fleur la plus
magnifique. Cette fleur du romantisme allemand s’offre à nous dans
 
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