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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 9.1893

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Nr. 4
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Wyzewa, Teodor de: Le mouvement des arts en Allemagne et en Angleterre
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https://doi.org/10.11588/diglit.24662#0372

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

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M. Seidel a pris pour point de départ de ses recherches sur les collections de
Frédéric II la correspondance du roi avec son ambassadeur à la cour de France,
le comte Rothenbourg, et avec divers agents qu’il entretenait à Paris. A en juger
par cette correspondance, Frédéric II, du moins dans la première moitié de son
règne, se préoccupait surtout d’acquérir des Watteau, et, autant que possible, des
Watteau d’un grand format. C’est ainsi que ses agents parisiens lui ont fait
acheter l'Embarquement pour Cythère, l’Enseigne de Gersaint, et aussi plusieurs
autres grands Watteau, qui étaient grands à souhait, mais qui malheureusement
n’étaient pas de Watteau. L’Enseigne de Gersaint, divisée, comme on sait, en deux
morceaux, paraît avoir passé, dès le début, à la cour de Prusse, pour une œuvre
capitale; car, en 1760, d’Argens, décrivant à Frédéric les dégâts causés à Char-
lottenbourg par les Autrichiens, ajoute : « Par un cas singulier, on a laissé les
(rois plus beaux tableaux, les deux enseignes de Watteau. et le portrait de cette
femme (la Trompetina), que Pesne a peinte à Venise. » M. Seidel suppose, après
cela, que d’Argens s’est trompé, ou bien a menti pour rassurer Frédéric : car c’est
sans doute de l’invasion autrichienne que date la dégradation, hélas! irrémé-
diable, subie par les deux fameuses moitiés de l'Enseigne de Gersaint.

Frédéric aimait les grands Watteau, mais il aimait aussi beaucoup les Watteau
à bon marché. Il trouvait « exorbitante » l’offre qu’on lui faisait de deux Watteau
formant pendant, pour la somme de 8,000 livres. Un des plus grands et des plus
beaux Watteau de sa collection, en 1744, lui avait coûté 1,400 livres. La même
année, il avait acheté pour 3,000 livres deux merveilleux Lancret, le Moulinet et
la Danse, qui avaient été payés 10,000 livres à Lancret lui-même par le prince de
Carignan, leur précédent possesseur. Un autre Lancret des Palais royaux prussiens,
un Bal rustique, peut être également considéré comme une des œuvres les plus
importantes du maître : il est en effet signé en toutes lettres, et daté (1732), ce
qui est chose rare.

Watteau, Lancret, Pater, Boucher, Chardin, sont les peintres dont Frédéric
aimait et achetait de préférence les tableaux. Op trouve aussi, dans les collections
qu’il a formées, beaucoup d’ouvrages des maîtres de second ordre français, Bou-
logne, Coypel, Carie Van Loo, de Troy, Silvestre, Raoux, Gazes, etc. Les peintures
de Gazes ont été, pour la plupart, recommandées au roi de Prusse par son ami
d’Argens, à qui Cazes avait autrefois enseigné le dessin. En 1756, à la vente Tallard,
Frédéric achète, par l’intermédiaire de son agent Metra, un Christ guérissant les
aveugles de Lesueur, tableau au sujet duquel Mariette a écrit dans son Catalogue :
« 11 y en a une estampe par Surugue. Je l’ai vu autrefois entre les mains de la
veuve Gautiel. On dit que Lesueur l’avait peint pour elle. Cela se peut, car Lenfant,
premier mari de la veuve (Gautiel, était curieux. Je le trouve très beau : il est de
son meilleur temps, cependant la figure du Christ est un peu courte. Si tout était
comme celle de l’aveugle, ce serait un morceau sans défaut. Une fente dans la
planche sur laquelle il est peint dépriso un peu le tableau. » Ramené à Paris
en 1806, ce tableau a, depuis 1815, repris sa place dans la galerie de Sans-Souci.

A la vente Julienne (1767), Frédéric II achète un Carie Van Loo, Lekain et la
Clairon en Jason et Médée (signé et daté de 1759). Il paraît d’ailleurs avoir eu
pour Carie Van Loo une estime spéciale : il essaie, par l’intermédiaire de d’Argens,
de le décider à venir s’établir à Berlin; et, sur son refus, il lui commande pour le
nouveau Palais de Potsdam un grand Sacrifice d'Iphigénie. Il commande en même
 
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